Il était environ 21h30 (03h30 Heure suisse) lorsque les forces de l'ordre ont fini par entrer sur l'immense campus de cette université devenue l'épicentre du mouvement de soutien à la cause palestinienne.
Un peu plus tôt, le porte-parole de Columbia, Ben Chang, n'avait pas mâché ses mots. Il avait menacé de «renvoyer» les manifestants de l'université, accusés de «vandaliser, casser et bloquer les accès» du Hamilton Hall, un bâtiment emblématique. Des dizaines de personnes y sont retranchées depuis la nuit de lundi à mardi. Les menaces ne les ont guère découragées.
Un camion de police avec une échelle s'est donc approché du bâtiment occupé. Après quoi, des dizaines de policiers en tenue anti-émeute ont grimpé pour atteindre une fenêtre afin de pénétrer dans le «Hamilton Hall»
La police a expulsé les manifestants du campus, les mains attachées derrière le dos, sous les cris de témoins scandant «Honte à vous». Vers 22h45, de nombreux manifestants s'étaient dispersés.
L'université de Columbia a confirmé dans un communiqué que «l'activité accrue» sur le campus avait pris fin et que la zone avait été dégagée. Sa présidente, Minouche Shafik, a déclaré qu'elle avait demandé à la police de maintenir une présence sur le campus jusqu'au 17 mai au moins.
Plus tôt dans la soirée, des manifestants ont égalment tenté de s'emparer d'un bâtiment administratif du City College, à Harlem. Les policiers ont pourchassé la foule peu après 19h30. Depuis, la police a arrêté des dizaines de manifestants et s'est installée dans le campement, où elle a procédé à de nouvelles arrestations.
A travers les Etats-Unis, les images de forces de l'ordre en tenue anti-émeute intervenant brutalement sur des campus ont fait le tour du monde. Depuis le week-end dernier, des centaines d'étudiants, enseignants, militants d'une vingtaine d'universités ont été interpellés, certains arrêtés et placés en détention.
A l'université du Texas à Austin (sud), près de 80 personnes étaient en garde à vue mardi et seront poursuivies en justice pour «délit d'intrusion», selon le bureau du shérif local.
En Californie, la police «a fait évacuer et sécurisé» à l'aube deux bâtiments de l'université Cal Poly Humboldt et arrêté 35 personnes, afin de «rétablir l'ordre» selon cet établissement. A Los Angeles, les responsables de l'université de Californie ont averti les manifestants qu'ils subiraient des conséquences s'ils ne partaient pas.
A l'Université de Caroline du Nord à Chapel Hill, un groupe d'étudiants a revendiqué avoir hissé un drapeau palestinien au centre du campus, avant que la police ne remette en place les couleurs des Etats-Unis, selon la presse.
A six mois de la présidentielle dans un pays polarisé, le mouvement estudiantin inquiète la Maison Blanche et l'ONU. Joe Biden, allié «indéfectible» d'Israël, a critiqué les tensions ravivées à Columbia, université privée qui forme l'élite. De son côté, aux Nations unies, le secrétaire général Antonio Guterres a jugé «essentiel en toutes circonstances de garantir les libertés d'expression et de manifestation pacifique» tout en insistant sur le fait que «les discours racistes étaient évidemment inacceptables». (mbr/ats)