En rassemblant les 67 votes nécessaires pour ce vote de procédure, le Sénat a annoncé avec grandiloquence: ça y'est, le voilà avec suffisamment de voix pour faire approuver cette enveloppe. Un bel optimisme qui doit bientôt faire face au prochain vote: celui de la Chambre haute et des élus républicains de l'aide droite. La date de ce nouveau vote n'est pas encore connue, mais il pourrait se tenir en début de semaine.
Le processus reste semé d'embûches pour cette enveloppe colossale, qui prévoit notamment 60 milliards pour l'Ukraine, 14 milliards pour Israël contre le Hamas, ainsi que des fonds pour Taïwan, allié stratégique des Etats-Unis. La part du lion, qui reviendrait à l'Ukraine, l'aiderait à reconstituer ses stocks de munitions, d'armes et d'autres besoins essentiels, alors que le pays entre dans sa troisième année de guerre.
«L'Ukraine est dangereusement à court de réserves. Si l'Amérique n'envoie pas d'aide à l'Ukraine avec ce projet de loi sur la sécurité nationale, (le président russe Vladimir) Poutine a toutes les chances de réussir», avait averti avant le vote le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, qui n'a pas mangé de souligner le timing particulier de ce vote - un dimanche de Super Bowl, la très suivie grand-messe du football américain.
«Aujourd'hui, il n'est pas exagéré de dire que les yeux du monde sont tournés vers le Sénat américain», a de son côté lancé le chef de file des républicains à la Chambre haute, Mitch McConnell. «Nous n'avons pas doté les courageux peuples d'Ukraine, d'Israël ou de Taïwan d'équipement létal dans le but de remporter des distinctions philanthropiques (...). Nous le faisons parce que c'est dans notre propre intérêt», a-t-il ajouté.
Malgré des semaines de négociations et de jeux politiques, les élus semblent toujours incapables de se mettre d'accord sur la validation de nouveaux fonds. Alors que les démocrates sont dans l'immense majorité pour, les républicains, eux, sont divisés entre faucons interventionnistes, pro-Ukraine, et lieutenants de Donald Trump, bien plus isolationnistes.
Ces derniers critiquent vivement la poursuite de l'aide américaine à l'Ukraine, affirmant notamment que leur pays ne devrait pas continuer à débourser des dizaines de milliards de dollars tant que la frontière des Etats-Unis avec le Mexique ne sera pas «sécurisée».
En pleine campagne présidentielle, l'équation s'est transformée en bras de fer à distance entre le président démocrate Joe Biden, qui réclame de toute urgence ces nouveaux fonds, et son prédécesseur Donald Trump, qui assure que s'il était réélu en novembre, il réglerait la guerre entre la Russie et l'Ukraine «en 24 heures» - sans expliquer comment. Même sans mandat, l'ancien président a récemment réussi à torpiller la conclusion au Congrès d'un compromis sur l'enveloppe à l'Ukraine.
Et samedi, il a menacé, en cas de retour à la Maison Blanche, de ne plus garantir la protection des pays de l'Otan face à la Russie si ceux-ci ne payaient pas leur part, affirmant même qu'il «encouragerait» Moscou à s'en prendre à eux. Une déclaration qui, forcément, n'a pas manqué de faire grand bruit. (mbr/ats)