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Guerre contre l'Ukraine

Zelensky brise le silence sur sa rencontre chaotique avec Trump

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La rencontre entre Zelensky et Trump a dégénéré devant les caméras.Image: EPA POOL

Zelensky brise le silence sur son face-à-face chaotique avec Trump

L'esclandre de fin février entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump a eu de lourdes conséquences politiques. Dans une interview au Times, le président ukrainien explique comment il en est arrivé là.
26.03.2025, 18:5527.03.2025, 09:45
Christoph Cöln / t-online
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Lorsque Volodymyr Zelensky a pris place sur l'une des chaises d'apparat rembourrées de la Maison-Blanche le 28 février, avec Donald Trump et son vice-président JD Vance, le président ukrainien ignorait encore que, quelques minutes plus tard, il prendrait déjà le chemin du retour, humilié.

Trump et Vance ont entraîné leur hôte dans un échange verbal enflammé et composé de toutes sortes de reproches. Ils ont visiblement pris Zelensky au dépourvu. Lui se tordait, répliquait en sifflant et cherchait une issue. L'une des démonstrations de diplomatie ratée les plus désagréables de l'histoire.

Zelensky revient sur les détails de cet esclandre pour la première fois. Dans une interview accordée au magazine britannique Times, il décrit dans sa globalité la situation dans le bureau ovale – et il raconte également le moment précis où tout a basculé.

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Comme il est d'usage lors de telles visites, le dirigeant ukrainien avait apporté deux cadeaux pour Trump: parmi eux, la ceinture de champion du monde des poids lourds, Oleksandr Usyk. Elle était posée sur une table à droite de Zelensky, prête à être remise. Un cadeau qui aurait certainement plu à Trump – après tout, il s'est aussi illustré depuis les années 1980 en tant qu'organisateur d'événements de boxe de haut niveau dans ses hôtels de luxe d'Atlantic City. Ils ont depuis fermé leurs portes.

Zelensky tend d'abord le dossier à Trump

Mais Zelensky n'a pas commencé par là. Il a plutôt décidé de donner la seconde attention, bien moins glamour. Il a alors sorti un dossier contenant des photos de victimes ukrainiennes de la guerre. Des prisonniers qui avaient vécu des choses atroces en détention en Russie.

Celui-ci a parcouru les images d'un air sombre. Ce qu'il a vu l'a fortement miné. Des soldats décharnés, traumatisés et parfois torturés. «That's tough stuff», a marmonné Trump.

«C'est du lourd»

Commence alors pour Zelensky un instant gênant qui semble durer pour toujours. Trump et Vance se mettent à attaquer sans relâche l'invité ukrainien sous les yeux du monde entier. Ils sont vigoureusement soutenu par un journaliste américain de droite, qui jette de l'huile sur le feu en demandant pourquoi Zelensky ne porte pas de costume malgré son invitation à la Maison-Blanche.

La situation s'envenime et Zelensky repartira bredouille, l'accord sur les matières premières qui aurait dû être signé après cette rencontre a été gelé. Quelques jours plus tard, les Etats-Unis ont suspendu leur aide militaire à l'Ukraine, y compris en ce qui concerne les informations des services de renseignement.

En conséquence, l'avancée ukrainienne s'est totalement effondrée en très peu de temps dans la région russe de Koursk. Kiev a ainsi perdu un atout majeur dans les négociations de paix à venir avec la Russie.

Le choix des images

Pourtant, le président ukrainien ne regrette pas d'avoir montré à Trump les images des soldats torturés, a-t-il déclaré au Times. Il a voulu faire sortir le président américain de son rôle d'«homme d'affaires» et faire appel aux sentiments du Trump, père de famille. Mais cela n'a pas vraiment fonctionné.

«Je cherchais à lui montrer ce que je défends. Mais ensuite, la conversation a pris une direction tout autre»
Zelensky

«Il a une famille, des proches, des enfants. Il a des sentiments, comme tout le monde», a déclaré Zelensky.

FILE - Vice President JD Vance, right, speaks with Ukrainian President Volodymyr Zelenskyy, left, as President Donald Trump listens in the Oval Office at the White House, Feb. 28, 2025, in Washington. ...
Zelensky avec Trump et le vice-président JD Vance.Image: keystone

La décision de montrer d'abord les photos pourrait avoir coûté très cher à l'Ukraine. Car on sait bien que le président des Etats-Unis ne se contente pas de prendre mal les attaques personnelles, il a aussi l'habitude de se venger. Volodymyr Zelensky aurait sans doute pu anticiper la réaction de son interlocuteur. Il connait probablement son fonctionnement et savait que ce n'était pas une bonne idée de confronter le républicain à une vérité désagréable devant les caméras.

«L'ego de Donald est très fragile»

Car ce que cela déclenche chez l'homme de la Maison-Blanche, sa nièce Mary Trump l'a décrit dès 2020 dans un ouvrage loin d'être passé inaperçu sur son oncle: des blessures à l'ego. Sa nièce affirme qu'il souffre d'une forme grave de trouble de la personnalité narcissique. «Cela va bien au-delà du narcissisme ordinaire», écrit Mary Trump, qui possède un doctorat en psychologie clinique.

«Donald n'est pas simplement faible, son ego est très fragile, il a besoin d'être constamment rassuré parce qu'il sait au fond de lui qu'il n'est pas ce qu'il prétend être»
Mary Trump

On peut, en revanche, supposer que Zelensky a grossièrement sous-estimé le psychisme de son hôte. Car le président américain n'a manifestement pas «des sentiments comme tout le monde», osait le président ukrainien. Selon les observateurs, Trump fonctionne différemment. Lorsqu'on le confronte, il s'emporte sans pitié.

Les diplomates et les hommes d'Etat expérimentés le savent, c'est pourquoi ils se rapprochent d'abord du républicain avant de lui soumettre des propositions. C'est ainsi qu'ont procédé Emmanuel Macron et Keir Starmer. Si Zelensky avait d'abord offert la ceinture, qui sait, l'affaire aurait peut-être pris une autre tournure.

Tombé dans le piège

Pourtant, Zelensky ne regrette pas sa démarche. Il l'a confié au Times.

«Dans cette conversation, j'ai défendu la dignité de mon pays»
Zelensky

Les Ukrainiens forment un peuple fier et très sensible. De plus, avant la visite à Washington, on espérait que les Etats-Unis, en tant qu'alliés, feraient preuve d'un tant soit peu de compassion. «Mais à ce moment-là, il n'en était rien. J'avais plutôt l'impression que nous n'étions plus alliés», a reconnu Zelensky. Il s'agissait de la deuxième grave erreur d'appréciation de la délégation ukrainienne.

Il ne l'a toutefois pas reconnue aussi clairement dans l'interview. Au lieu de cela, il a fait allusion à un autre élément, qu'il soupçonne d'avoir joué un rôle dans l'échec de la rencontre:

«Je pense que la Russie a réussi à influencer certaines personnes de l'équipe américaine en leur fournissant des informations. On leur a dit que les Ukrainiens ne voulaient pas mettre fin à la guerre et qu'il fallait agir pour les forcer à s'asseoir à la table des négociations.»

Le président a ainsi confirmé ce que même les meilleurs observateurs redoutaient déjà immédiatement après cet épisode: la visite de Zelensky n'était en fait qu'un vaste piège politique.

(Traduit et adapté par Valentine Zenker)

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