«Les Russes sont encerclés et nous les éliminons progressivement»
La situation semble sans issue pour les derniers soldats russes au centre de Koupiansk. Selon les informations ukrainiennes, ils ne seraient plus que 200 au maximum, dispersés et retranchés dans des caves. Ils attendent des renforts qui ne viendront probablement pas.
Depuis fin août, les troupes ukrainiennes préparent la libération de cette petite localité du nord-est du pays, et elles sont à bout touchant. Selon le chef de l'armée, Oleksandr Syrsky, Kiev contrôle à nouveau près de 90% de la ville.
Une grande victoire ukrainienne en vue
Les annonces de succès ukrainiens de ce genre sont devenues rares au cours des dernières années de guerre. En 2022, les Ukrainiens avaient encore réussi à libérer Kherson, dans le sud, et la région de Kharkiv, dans l'est, grâce à des opérations spectaculaires. Mais à l'été 2023, l'offensive visant à percer le front sud a échoué face aux champs de mines ennemies.
Depuis, les forces ukrainiennes tentent d'affaiblir la Russie par des attaques stratégiques contre des cibles militaires et économiques très à l'intérieur du pays. Récemment, elles n'ont réussi aucune contre-offensive majeure. Mais l'Ukraine pourrait désormais remporter un succès opérationnel, temporairement au moins.
Poursuite des combats à Koupiansk
Au cours des dernières semaines, les unités ukrainiennes ont pris systématiquement plusieurs villages à l'ouest et au nord-ouest de la ville. Et elles auraient franchi une étape décisive dès la mi-octobre, en atteignant la rivière Oskil, au nord. Car la ligne d'approvisionnement des Russes vers le centre de Koupiansk est coupée depuis.
C'est ce qu'indique le commandant Yuri Butusov, en première ligne des affrontements sur place avec sa brigade Khartia. Mais, selon lui, il faut encore attendre pour parler de libération totale. Butusov décrit sur Telegram:
Des milliers de civils encore sur place
Le porte-parole de l'armée, Viktor Trehubov, a déclaré à la chaîne RBC Ukraine:
En effet, plus de 7000 des quelque 30 000 habitants de Koupiansk pourraient encore se trouver dans la ville assiégée. Beaucoup ont fui peu après l'invasion de février 2022, lorsque les troupes de Poutine ont conquis la ville pour la première fois. En septembre de la même année, les Ukrainiens ont réussi à la libérer, mais elle est restée disputée depuis.
On la considère comme un nœud de communication stratégique dans la région de Donetsk, où se croisent d'importantes routes et lignes ferroviaires. La conquête de Donetsk reste par ailleurs l'un des principaux objectifs de guerre de Vladimir Poutine.
Zelensky, Poutine et un selfie humiliant
A la mi-novembre, ce dernier avait affirmé que ses troupes avaient pris le contrôle total de Koupiansk. Il avait même invité des journalistes étrangers à se rendre sur place pour se faire leur propre idée de la situation. Mais ses généraux l'avaient apparemment mal informé.
Car, au lieu de la presse internationale, c'est le président ukrainien Zelensky qui a fait le déplacement, humiliant le Kremlin avec un selfie devant un panneau du nom de la ville, à seulement quelques centaines de mètres des combats. Et tandis que les blogueurs militaires russes de Telegram admettent depuis longtemps la défaite de leurs troupes, Moscou continue d'affirmer le contraire.
Entre-temps, on a pourtant cru à un retournement de situation. Grâce à un pipeline désaffecté de quatre kilomètres sous l'Oskil, les unités russes avaient progressé à plusieurs reprises jusqu'au centre et y avaient établi une tête de pont.
Au départ, le tunnel sous Koupiansk leur offrait une protection contre les attaques de drones. Mais il s'est transformé en piège mortel après que les Ukrainiens se sont frayé un chemin jusqu'à sa sortie, à l'ouest de la localité.
Une mystérieuse stratégie qui redonne espoir
Les soldats ayant survécu au périple épuisant vers Koupiansk à travers le tunnel ont été accueillis par des unités de drones ukrainiens. Cela n'aurait toutefois pas dissuadé les commandants russes d'envoyer toujours plus de troupes à la mort. Le site ukrainien United24, citant Ihor Raikow, commandant de drones de la brigade Khartia, rapporte:
Les Ukrainiens ont désormais définitivement barré le passage avec trois tonnes d'explosifs.
Et ils ne divulguent pas les détails de la tactique utilisée pour reprendre la zone. Les Russes y avaient stationné certaines de leurs meilleures unités. Grâce à leurs engins de surveillance, les soldats de Poutine avaient également une image claire de ce qui se passait au sol. Malgré cela, les adversaires semblent avoir réussi à traverser discrètement le «périmètre mortel» des drones kamikazes russes.
«Je ne peux pas décrire en détail les tactiques pour atteindre l'Oskil», écrit le commandant Butusov, avant d'ajouter:
Certaines des stratégies utilisées dans ce contexte pourraient aussi servir lors d'opérations futures. Mais la libération de la ville ne constitue pas seulement une victoire militaire. Elle devrait également redonner courage aux Ukrainiens.
Une possible nouvelle trajectoire pour l'Ukraine
En effet, sur le plan politique, Kiev s'est récemment retrouvée sur la défensive à cause du plan «de paix» négocié par Washington et Moscou. Lors des discussions du week-end dernier à Berlin, les représentants américains ont de nouveau exhorté Kiev à renoncer à ses revendications sur la région de Donetsk et à y abandonner sans broncher sa ceinture de fortifications.
Une demande jugée inacceptable, car elle permettrait aux Russes de poursuivre leur avancée à l'intérieur du territoire. Le succès de Koupiansk pourrait désormais améliorer la position des Ukrainiens dans les négociations. Car il contredit le discours du Kremlin selon lequel la guerre doit à tout prix se solder par une victoire russe.
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)

