La Russie sommée de rendre les enfants ukrainiens enlevés
Plusieurs familles d'enfants ukrainiens déportés en Russie ont tiré la sonnette d'alarme lundi, craignant d'être coupées de tout contact et lançant un appel à l'aide internationale.
Lors d'une rare conférence de presse à Paris, Darina Repina, tutrice légale de deux enfants emmenés de force en Russie après l'invasion de l'Ukraine par Moscou en 2022, a dénoncé que les autorités russes ignoraient toutes les demandes visant à faciliter leur retour. «Il n'y a aucun espoir d'être entendus», a dit Repina à des journalistes lors de cet événement organisé par la Fondation Emile, qui oeuvre pour le retour des enfants ukrainiens.
Margarita Prokopenko avait 10 mois lorsqu'elle et son frère Maksim ont été arrachés à leur orphelinat lors de l'occupation de Kherson, dans le sud du pays, en 2022. Les enfants ont été séparés. Maksim, âgé de 6 ans, se trouve dans un orphelinat russe, tandis que Margarita a été adoptée par la famille de Sergueï Mironov, un proche du président Vladimir Poutine, a déploré Repina.
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Les autorités russes ont selon elle cherché à donner une nouvelle identité à la petite fille, qu'elle dit craindre de ne jamais revoir.
Mironov, chef d'un parti pro-Kremlin, a nié avoir adopté Margarita Prokopenko, affirmant dans une publication sur les réseaux sociaux en 2023 que «les services spéciaux ukrainiens et leurs superviseurs occidentaux» cherchaient à le discréditer.
Près de 20 000 enfants enlevés
Repina élève la soeur aînée des deux enfants, et espère qu'un jour la famille sera réunie. Elle se préparait à ramener les deux plus jeunes enfants chez elle lorsque la Russie a envahi l'Ukraine, a-t-elle dit. La mère des enfants a depuis été déchue de ses droits parentaux.
Les petits-enfants de Lioubov Burina, Angelina et Yevhen, ont été emmenés en Russie après le début de l'invasion russe, suite à un placement temporaire dans un orphelinat de Kherson en raison d'une crise familiale. Ils avaient respectivement trois et un an au moment de leur enlèvement, a-t-elle précisé. Tous ses efforts pour retrouver ses petits-enfants sont restés vains.
Selon les dernières informations, les enfants se trouvent à Simféropol, en Crimée annexée par la Russie, a-t-elle indiqué. «Nous avons contacté la police et les services sociaux», a dit cette femme de 55 ans.
Selon Kiev, près de 20 000 enfants ukrainiens ont été emmenés de force en Russie ou dans les territoires occupés par la Russie depuis le début de l'invasion en 2022, un chiffre qui pourrait être sous-estimé.
Proches exclus des discussions
L'Ukraine a fait de la question des enfants enlevés une priorité diplomatique. Cependant, Mariam Lambert, cofondatrice de la Fondation Emile, note que les proches et les tuteurs légaux de ces enfants sont souvent exclus des discussions internationales concernant leur sort.
Le sujet, a-t-elle ajouté, est devenu trop politisé. «Nous avons donc décidé de le rendre public.»
Son organisation, fondée aux Pays-Bas, a, dit-elle, permis le retour de 48 enfants en Ukraine.
Un discours russe «totalement faux»
La Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt contre Vladimir Poutine et la commissaire russe aux droits de l'enfant, Maria Lvova-Belova, pour des allégations d'enlèvement d'enfants. La Russie a assuré avoir déplacé certains enfants ukrainiens de leurs foyers ou orphelinats pour les protéger de la menace d'hostilités.
Les autorités russes affirment que «ces enfants n'ont pas de famille et que "nous leur offrons donc une belle vie ici en Russie"», accuse Mariam Lambert. Or, assure-t-elle, ce discours est «totalement faux»: tous les enfants déportés en Russie ont de la famille en Ukraine.
Il n'y a pas de contact direct entre la Fondation Emile et le gouvernement russe, mais elle dit avoir demandé l'aide de pays tiers en relation avec Moscou, notamment les Etats-Unis, la Slovaquie et le Brésil. (jzs/afp)
