«Il me reste quatre jours à vivre.» C'est le genre d'annonce qu'on a, fort heureusement, assez peu l'occasion de lire. Et encore moins d'écrire. Ce qui explique sans doute l'onde de choc suscitée par l'annonce de Virginia Roberts, aussi connue sous son nom de mariée Virginia Giuffre, 41 ans, il y a moins de dix jours, après un accident du bus.
L'image est aussi désarçonnante que les mots. La mère de trois enfants, une Américaine installée en Australie qui avait acquis une renommée mondiale en accusant publiquement le milliardaire et pédophile condamné Jeffrey Epstein d'avoir abusé d'elle pendant deux ans, entre 2000 et 2002, apparaît le visage gonflé et meurtri, couvert de bleus. Le tout, accompagné d'une légende glaçante:
Il n'en fallait pas plus pour susciter la curiosité et l'excitation des médias. Qui ne tardent pas à découvrir que le seul accident impliquant un bus recensé par la police d'Australie occidentale est un «incident mineur» survenu à environ une heure au nord de Perth, où Virginia était installée avec son mari et ses enfants.
Selon Ross Munns, le chauffeur du bus scolaire et plusieurs témoins interrogés par le Daily Telegraph, ce dernier a été contraint de freiner brusquement lorsque la personne qui conduisait la voiture, identifiée comme un «soignant» de 71 ans qui conduisait Virginia Giuffre, a tourné devant lui sans mettre son clignotant. Le bus n'aurait toutefois causé que de «légers dommages» au feu stop arrière de la Toyota.
Pas de quoi, en tout cas, provoquer le genre d'ecchymoses présents sur le visage de Virginia Roberts, affirment des témoins.
C'est par le biais d'un porte-parole que l'intéressée (toujours en vie, sept jours plus tard) s'est expliquée dans le magazine People. Ces bleus sur le visage? Des «violences conjugales» auxquelles elle n'a pu échapper que «récemment».
«J'ai pu me défendre contre Ghislaine Maxwell et Jeffrey Epstein, qui m'ont maltraitée et exploitée. Mais je n'ai pu échapper aux violences conjugales que récemment», dénonce-t-elle.
Violences conjugales. Le mot est lâché. Selon le porte-parole de Virginia, le dernier «passage à tabac» remonterait au 9 janvier, lors d'un voyage en famille pour fêter l'anniversaire d'un de leurs enfants. Elle aurait alors été battue si violemment qu'elle en serait sortie avec une fracture du sternum et une perforation de l'œil, selon les informations recueillies par People.
Suite à l'agression présumée, dont le média américain n'a pas pu se procurer le rapport de police, Robert Giuffre n'a été inculpé d'aucun crime.
C'est là que surviennent de nouveaux protagonistes dans cette affaire à couches: le frère de Virginia, Sky Roberts, et sa femme Amanda. Le couple, qui réside aux Etats-Unis, est venu appuyer la version de Virginia et fournir des détails supplémentaires. «Je pense que lors du dernier incident, elle a failli mourir», raconte Amanda à propos des évènements présumés du 9 janvier.
Bien qu'ils ignorent si les problèmes médicaux de Virginia ont été causés par son accident de voiture ou par des complications liées aux violences qu'elle a subies (ou une combinaison des deux), ils formulent une hypothèses:
A la surprise générale de la famille, Robert Giuffre, qui refuse de s'exprimer dans les médias sauf par l'intermédiaire de son avocat, aurait déposé une ordonnance de protection pour violence familiale de la part de sa femme, alléguant que c'est elle qui serait devenue violente avec lui.
«Malheureusement, comme c'est parfois le cas en Australie, l'agresseur a utilisé à son avantage le système destiné à protéger les victimes et a obtenu une ordonnance restrictive», réplique un porte-parole de Virginia. «Virginia a hâte de se défendre contre cette allégation malveillante. Elle est profondément préoccupée par le sort de ses enfants, toujours sous la garde de Robert.»
Enième volet dans cette affaire décidément complexe, la mère des trois enfants est accusée d'avoir violé l'ordonnance de protection le 2 février, comme le confirme People ce week-end. Elle doit désormais comparaître devant le tribunal d'instance de Joondalup, dans la banlieue de Perth, en Australie occidentale, le 9 avril. Le procès est agendé à 9h30, heure locale, et on ignore si elle s'y présentera, compte tenu de son état de santé.
En tout cas, cette échéance a de quoi alimenter les doutes et les suspicions des détracteurs de Virginia Roberts - et ils sont nombreux, après que la victime de Jeffrey Epstein ait lancé une offensive judiciaire et médiatique contre le prince Andrew, en 2021. Un litige réglé par un accord à l'amiable de plusieurs millions de dollars.
Cette affaire d'accident de bus ne serait-il qu'un habile moyen de contourner le tribunal de première instance, comme le spéculent des internautes sur les réseaux sociaux? Le frère de Virginia, Sky, met en garde les médias contre de telles suppositions.
«Ou peut-on simplement se montrer humain, examiner les faits et comprendre qu'il s'agit d'une personne légitimement impliquée dans un accident et souffrant de problèmes sous-jacents?»
Quant à sa publication Instagram très critiquée, sa famille stipule que Virginia pensait avoir publié le message sur sa page Facebook privée et s'était trompée de canal. Peut-être une méprise due aux analgésiques administrés à l'hôpital - peut-être une conséquence après s'être sentie «découragée et déprimée» d'être séparée de ses trois enfants.
Quant à l'histoire des «quatre jours à vivre», il s'agirait du pronostic d'un médecin si Virginia continuait à ne pas recevoir de soins. En attendant, l'Américaine serait toujours hospitalisée en Australie. «Elle va légèrement mieux mais son état reste grave», conclut son porte-parole dans People ce week-end.
L'étrange et sinistre affaire Virginia Roberts est donc loin, bien loin, de se terminer.