Depuis des mois, des rapports parfois contradictoires faisaient état de la livraison de missiles iraniens de courte portée à la Russie. Le gouvernement américain a désormais confirmé qu'une telle livraison avait eu lieu, malgré les avertissements de l'Occident.
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a annoncé de nouvelles sanctions contre l'Iran, et l'Europe a également réagi. Des mesures «immédiates» seront prises pour suspendre les accords aériens bilatéraux avec l'Iran, selon une déclaration commune des ministres des Affaires étrangères allemand, français et britannique.
D'après le secrétaire d'Etat américain, l'Iran aurait livré des missiles de type Fath-360. Le journal britannique The Times avait précédemment révélé, en se référant à des sources des services de renseignement ukrainiens, que l'Iran avait livré le 4 septembre plus de 200 missiles Fath-360 à la Russie via un port de la mer Caspienne. Des images satellites auraient montré le navire transportant les missiles dans le port d'Olya, au sud de la Russie.
⚡️BREAKING:
— Current Report (@Currentreport1) September 11, 2024
Satellite image of cargo ship PORT OLYA 3 in the port of Olya on the Caspian sea coast, September 4 2024.
According to Western sources, the ship brought Fath-360 ballistic missiles from the Iranian port of Amirabad. pic.twitter.com/Z2dL3Z5DJw
Le Fath-360 est un missile balistique à courte portée doté d'une ogive de 150 kilogrammes. Comme tous les missiles de son genre, il est propulsé dans l'atmosphère par un moteur-fusée et plonge ensuite à grande vitesse vers sa cible. Contrairement aux missiles de croisière, qui sont guidés tout au long de leur vol, le Fath-360 n'est guidé que dans les premières phases après le lancement, ce qui le rend moins précis. Son avantage réside toutefois dans la vitesse énorme à laquelle il fonce vers sa cible: plus de 3200 kilomètres par heure.
En revanche, la portée du Fath-360 est relativement courte: 120 kilomètres au maximum. Les experts estiment que la Russie utilisera ces missiles pour attaquer des cibles militaires situées près de la ligne de front. En outre, la livraison d'armes par l'Iran permet à la Russie de réserver ses missiles plus coûteux et de plus grande portée, comme l'Iskander, pour des cibles plus éloignées en Ukraine. Celui-ci atteint des cibles situées jusqu'à 500 kilomètres de distance.
Mais les cibles militaires ukrainiennes ne sont pas les seules à être visées par les Fath-360. Des villes comme Kharkiv et Soumy, situées à seulement 30 kilomètres de la frontière russe, pourraient également être facilement atteintes.
Dans les colonnes de Kyiv Independent, l'expert militaire Fabian Hinz de l'International Institute for Strategic Studies à Berlin
«Si le dispositif de lancement est prêt et qu'une cible de grande valeur apparaît sur une image de reconnaissance, vous pouvez réagir très, très rapidement, beaucoup plus rapidement qu'avec des drones», poursuit Hinz.
La livraison des Fath-360 accentue considérablement les défis auxquels est confrontée la défense ukrainienne. En raison de la vitesse élevée des missiles balistiques, seuls les systèmes de défense aérienne les plus avancés sont en mesure de les intercepter. L'un de ces systèmes est le système américain Patriot, que l'Ukraine utilise déjà.
Selon Fabian Hinz, l'Iran a fait fi des sanctions de l'Occident car le pays avait un besoin urgent d'argent et de technologie militaire.
L'Iran avait déjà exigé un prix élevé lors de précédents transferts d'armes, comme les drones Shahed. «On peut supposer que des sommes importantes sont également en jeu ici», poursuit Hinz. En ce qui concerne la technologie militaire, l'Iran cherche depuis longtemps à acquérir des hélicoptères de combat Su-35 et des systèmes de défense aérienne S-400 auprès de la Russie, mais n'en a pas encore reçu.
En bref, comme le concède Hinz:
Nasser Kanaani, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, avait démenti les informations faisant état d'une livraison de missiles à la Russie. Il est regrettable que «certaines parties, qui font elles-mêmes partie de la guerre, accusent la République islamique d'Iran pour des raisons politiques», avait-il déclaré. Par le passé, l'Iran avait déjà livré des drones dits «kamikazes» à la Russie. Téhéran conteste également cette affirmation.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci