Après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, de nombreux fonctionnaires russes ont sombré dans la dépression et ont commencé à chercher du réconfort dans l'alcool. Selon des interlocuteurs anonymes du média russe Verstka, la journée dans l'administration présidentielle russe commençait autrefois par un verre de vodka. Maintenant, on parle d'une bouteille.
L'ancien député russe Ilia Ponomarev a récemment rapporté que Dmitri Medvedev, ancien président, avait «bu dur» depuis 2012, date à laquelle il a laissé son siège à Vladimir Poutine dans le cadre d'une rocade. Dmitri Medvedev menace constamment de recourir aux armes nucléaires et qualifie les autorités ukrainiennes de «forces des ténèbres».
Lors des banquets officiels d'Etat, les invités se voient également offrir une bonne dose d'alcool, qui se traduit par une bouteille de vin et une de vodka par personne, selon le chef de cuisine du Kremlin Anatoly Galkin. Les fonctionnaires russes préfèrent le champagne, le vin et le cognac de production étrangère.
C'est ce que montrent les données du site officiel russe Goszakupki: l'usine alimentaire Kremlevsky a récemment commandé de la vodka d'Espagne, de France et d'Italie pour un montant de 5 millions de roubles (environ 53 500 francs suisses). Il y a également une commande d'Etat pour du vin de Macédoine du Nord pour environ 7400 francs suisses. Selon le groupe de médias The Insider, rien qu'en novembre et décembre derniers, de l'alcool étranger a été importé en Russie pour une valeur d'au moins 3,9 millions de francs.
En mars 2022, l'UE a interdit l'importation de vin d'une valeur supérieure à 300 euros par bouteille en Russie dans le cadre d'un paquet de sanctions. L'entrepreneur et analyste économique russe Dimitri Potapenko explique pourtant que l'achat d'alcool en Russie ne pose actuellement aucun problème. Le prix de l'alcool étranger a augmenté, mais il est toujours disponible dans l'assortiment.
Selon lui, le moyen le plus populaire d'introduire de l'alcool premium étranger en Russie est de passer par un pays tiers. Les entrepreneurs russes l'ont déjà fait par le passé afin de réduire les frais de douane. Cela se fait via des pays asiatiques et certains pays européens, explique Dimitri Potapenko. Et de poursuivre:
Les hommes d'affaires russes affirment que les entreprises étrangères sont fermement décidées à continuer à coopérer avec la Russie et ne veulent pas subir de pertes. Mais ils ne veulent pas non plus enfreindre les règles établies par l'un ou l'autre Etat.
La deuxième méthode consiste en un transfert fictif par la Russie vers d'autres pays de l'union douanière. Par exemple, l'acheteur d'un envoi sur papier peut être une entreprise kazakhe pour laquelle la livraison est effectuée via la Russie. Pendant le transit sur le territoire russe, le destinataire kazakh refuse le chargement et les documents sont à nouveau délivrés à l'acheteur russe.
Tous les Russes ne peuvent pas se permettre d'acheter de l'alcool étranger, qui est livré par des voies aussi compliquées. Les statistiques montrent que les Russes, tout comme les fonctionnaires, boivent plus d'alcool qu'avant le début du conflit.
Les ventes de boissons à faible teneur en alcool ont augmenté de 46% en Russie en 2022, celles de vin de 8,6%. En conséquence, la production d'alcool dans le pays a augmenté de 9,8%. Le président Vladimir Poutine accepte que le niveau d'alcoolisme en Russie augmente, mais propose aux gens de «s'occuper du développement personnel et de passe-temps intéressants.»
Certains ont décidé de fabriquer leur propre alcool. Ainsi, 106 personnes ont récemment été intoxiquées par du cidre de substitution et 36 en sont mortes. La boisson mortelle a été fabriquée à partir d'un liquide alcoolisé volé dans un entrepôt de la police.
Dimitri Potapenko affirme que les gens achètent de l'alcool bon marché de qualité douteuse et de la contrefaçon. «Sur le marché noir russe, il est facile de trouver des bouteilles de cinq litres portant l'inscription 'Chivas Regal'. Bien entendu, ces boissons n'ont aucun lien avec la marque ou le whisky.»