C’est une vidéo comme elle en poste souvent, face caméra, avec son ton malicieux et cette phrase devenue signature: «Hello les dodu(e)s!». Sauf que celle-ci, postée début juillet sur TikTok, a dépassé toutes les attentes: près de six millions de vues en quelques jours. Son thème? Comment voyager en avion quand on est gros(se).
Dans la vidéo, l’influenceuse lyonnaise de 37 ans parle d’expérience. Elle mesure 1,60 mètre, pèse 155 kilos et revendique haut et fort sa taille 54. Pas pour faire le buzz, pas pour choquer, mais pour rappeler une chose toute simple: exister dans l’espace public ne devrait pas être un combat. Encore moins lorsqu’il s’agit de voyager.
Sur TikTok, Virginie Grossat rassemble plus de 700 000 abonnés, dont une majorité de femmes. Elle y parle mode grande taille, bouffe réconfortante, moments de vie. Toujours avec un ton direct, drôle, et cette volonté de visibiliser les corps hors norme sans en faire un étendard victimaire. Lorsqu’elle donne ses conseils pour l’avion, elle ne cherche pas à émouvoir ni à choquer: elle veut aider.
Demander deux sièges quand c’est possible, ne pas hésiter à demander une rallonge de ceinture, apporter son propre coussin de confort, contacter les compagnies à l’avance pour éviter les mauvaises surprises… Des tips concrets, pensés pour les personnes grosses, sans tourner autour du pot.
Mais derrière les conseils pratiques, c’est surtout un message que la créatrice de contenu passe. Celle de ne pas s’excuser de prendre de la place. Celle de refuser la honte, le repli, les stratégies d’évitement. Dans les commentaires, des insultes et remarques grossophobes, mais aussi, de la part des personnes concernées, de la gratitude, du soulagement, parfois même «des larmes». Car ce que dit la Française, personne ne le dit dans les publicités des compagnies aériennes.
Pourtant, voyager quand on est obèse, ce n’est pas neutre. C’est anticiper les regards gênés ou insistants, c’est parfois négocier avec des compagnies peu accommodantes, c’est aussi dans certains cas payer plus cher pour ne pas subir. En France, 17% des adultes sont en situation d’obésité, selon les dernières données de Santé Publique France. Et à l’échelle mondiale, les corps grossissent plus vite que les sièges d’avion ne s’élargissent.
L’Association internationale du transport aérien (IATA) estime à près de 4,7 milliards le nombre de passagers aériens transportés en 2024. Parmi eux, des millions de personnes grosses, souvent invisibilisées.
Certaines compagnies, comme Southwest Airlines aux Etats-Unis, permettent déjà de réserver un siège supplémentaire sans frais, pour plus de confort. D’autres demandent aux passagers «hors gabarit standard» de payer un deuxième billet, faute de place. En Europe, ces politiques restent floues, rarement communiquées clairement, et bien souvent, les passagers concernés doivent improviser.
Dans ce contexte, la vidéo de Virginie Grossat agit comme un petit manifeste. Elle ne demande pas l’autorisation d’exister; elle existe, elle voyage, et elle invite les autres «dodu(e)s» à faire de même.
Alors oui, parfois, il faut acheter deux sièges. Oui, il faut insister pour avoir une rallonge de ceinture. Oui, le regard des autres peut être lourd. Mais la trentenaire se fait un malin plaisir de rappeler que ce n’est pas une raison pour rester cloué(e) au sol.