Le président américain, dont le pays est le premier soutien de Kiev, a créé une onde de choc, mercredi, en convenant de négociations «immédiates» avec son homologue russe Vladimir Poutine.
Après leur conversation, Kiev et ses alliés craignent encore davantage que Washington n'accède aux désirs de Moscou et ne cesse son aide essentielle, bientôt trois ans après le début de l'invasion russe.
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Dans le froid mordant de la région de Donetsk, Artem, un commandant de la 93e brigade, admet sans ambages qu'un arrêt de l'assistance américaine aurait des conséquences «catastrophiques».
«On continuera à perdre» des hommes, prévient ce militaire de 42 ans, qui dit avoir perdu «beaucoup d'amis». Il supervise l'entraînement de ses nouveaux soldats, qui devront bientôt affronter le feu russe
Le militaire, prudent, n'est pas très à l'aise sur les sujets diplomatiques mais avoue que le changement de ton de Washington le rend «inquiet».
Mercredi, l'administration Trump a jugé qu'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan n'était pas réaliste, tout comme un retour de ce pays à ses frontières d'avant 2014, c'est-à-dire avec la Crimée, annexée cette année-là par Moscou.
Deux camouflets pour Kiev, qui s'ajoutent aux propos lundi de Donald Trump, qui avait évoqué la possibilité que l'Ukraine devienne «russe un jour».
Impensable pour le soldat Sava, qui vient d'enchaîner les pompes sous les ordres de son commandant. Il lance, les joues recouvertes d'une peinture couleur camouflage,:
Parmi ses camarades, des prisonniers qui ont choisi l'armée comme solution alternative à l'incarcération, les regards se font fuyant quand il s'agit de parler de Donald Trump.
Il assure cependant qu'il serait prêt à accepter que certains des territoires occupés soient cédés pour obtenir la paix. Oleksandre, un autre militaire de la 93e brigade, pense quant à lui que l'armée n'accepterait pas de laisser des territoires à la Russie:
Il affirme que lui et ses hommes sont prêts à se battre «avec des bâtons» s'il ne leur reste que ça.
A Kiev, les responsables ont été peu loquaces sur les récentes déclarations de Donald Trump, qui ont réjoui Moscou. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a néanmoins admis qu'il n'était «pas très agréable» que Donald Trump ait d'abord parlé au téléphone avec Vladimir Poutine. Et appelé à ce que Washington et Kiev conviennent d'un plan pour «arrêter» le maître du Kremlin, avant toute discussion.
Andriï Kovalenko, le directeur pour l'armée ukrainienne du centre de lutte contre la désinformation, actif sur les réseaux sociaux, a de son côté fustigé la «myopie» des «hommes politiques». Selon lui, l'Ukraine a besoin de «décisions rapides de la part de l'Europe».
Dans les rues de Kiev, la capitale, les propos étaient encore plus sévères. «Inacceptable», «inapproprié», réagit Sofia, une étudiante de 18 ans «révoltée» par les propos américains. Négocier unilatéralement avec le «dictateur» Vladimir Poutine est «tout simplement une trahison à notre égard», accuse-t-elle.
Dans de telles conditions, elle est persuadée que la paix ne durera que «10 ans, peut-être 15», avant que Donald Trump ne «décide de donner toute l'Ukraine à la Russie». Sofia appelle d'ailleurs le président américain à bien réfléchir: «la séparation par un océan ne vous sauvera pas d'une guerre avec Poutine». Pour Iaroslav, un médecin de 67 ans, «les négociations avec la Russie ne valent rien». Et surtout, est-il persuadé, aucune décision ne peut être prise «sans l'Ukraine».
© Agence France-Presse