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L'avenir de l'Ukraine va dépendre de Trump et de ces 3 scénarios

Une solution pacifique pour l'Ukraine est-elle réaliste à l'heure actuelle? Trois scénarios se détachent.
Une solution pacifique pour l'Ukraine est-elle réaliste à l'heure actuelle? Trois scénarios se détachent.Image: Imago

L'avenir de l'Ukraine va dépendre de ces trois scénarios

Aboutira-t-on enfin à une solution pacifique pour l'Ukraine? Compte tenu des réserves de la Russie, cela semble peu réaliste. Et si Moscou refusait de négocier? Zoom sur trois scénarios.
28.11.2025, 05:3128.11.2025, 05:31
Simon Cleven / t-online
Un article de
t-online

Les discussions sur une solution de paix pour l'Ukraine battent leur plein. On les doit à un plan en 28 points imaginé par les Etats-Unis et la Russie, et qui respecte avant tout la volonté du Kremlin.

Une délégation américaine a ensuite rencontré des représentants ukrainiens et européens à Genève ce week-end. Les Européens ont alors aussi présenté leur propre plan. Après ces consultations, il ne restait plus grand-chose de la première solution.

Des progrès, mais aussi un mur

En effet, Kiev affirme avoir trouvé un terrain d'entente avec Washington sur les questions les plus importantes. Reste donc désormais à attendre une réaction du Kremlin. Il a envoyé en début de semaine une délégation à Abu Dhabi pour s'entretenir avec des représentants américains.

Le chef des services secrets militaires ukrainiens, Kyrylo Budanov a lui aussi fait le déplacement. La porte-parole de Donald Trump, Karoline Leavitt, a relevé, mardi, «d'énormes progrès», en mentionnant «quelques détails délicats, mais pas insurmontables» qui restent toutefois «à clarifier». Mais rien ne garantit que la Russie s'engagera dans des négociations sérieuses.

Pour le politologue Carlo Masala:

«La Russie va probablement rejeter tout plan de paix qui ne s'apparente pas à une capitulation de l'adversaire»

Cependant, tant la version européenne que la dernière mouture ukraino-américaine incluent certains aspects particulièrement chers à Kiev. «Pour les Russes, cela n'est donc pas acceptable».

Portrait
Le professeur Carlo Masala (né en 1968) est expert en sécurité. Il enseigne la politique internationale à l'Université de la Bundeswehr à Munich, où il dirige par ailleurs l'Institut Metis pour la stratégie et la prospective. Il a écrit plusieurs ouvrages. Son dernier livre, Wenn Russland gewinnt (Quand la Russie gagne), est paru en mars 2025.
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Image: Imago

Des voix critiques se sont élevées à Moscou, et la Russie ne devrait donc pas négocier sérieusement. A quelle évolution faut-il alors s'attendre?

Scénario 1

Blocage politique: rien ne change et Trump se retire

Il s'agit du scénario le plus probable, estime le spécialiste. Mais, en cas de blocage, «Trump pourrait se retirer complètement». Jusqu'à présent, la stratégie des Européens a été de maintenir le chef d'Etat américain dans le jeu «jusqu'à ce qu'il réalise que cette guerre est aussi la sienne», poursuit Masala avant d'ajouter:

«C'est précisément ce que Trump veut éviter à tout prix»

Pour l'instant, les Européens ont réussi. Ils ont apaisé le républicain en concluant un accord: au lieu de livrer directement des armes à l'Ukraine, les Etats-Unis les vendent désormais à leurs partenaires européens de l'Otan, qui les transmettent ensuite à Kiev.

Mais le président américain a toujours été réticent sur ce dossier, dont il rejette toute responsabilité. Il parle généralement de «la guerre de Biden», reportant toute la charge sur son prédécesseur.

Le milliardaire était pourtant entré à la Maison-Blanche avec la promesse de régler le conflit le plus rapidement possible. Dix mois plus tard, après plusieurs tentatives diplomatiques, les affrontements se poursuivent. En Europe, on craint donc que Trump ne se désintéresse pour de bon si son «plan de paix» échoue. Mais que se passerait-il alors?

Ici, le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte aux côtés de Donald Trump dans le Bureau ovale (photo d'archive): en juillet, ils sont parvenus à un accord permettant aux partenaires de l&# ...
Ici, le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte aux côtés de Donald Trump dans le Bureau ovale (photo d'archive): en juillet, ils sont parvenus à un accord permettant aux partenaires de l'Otan d'acheter des armes pour Kiev aux Etats-Unis.Image: Imago

«Washington cesserait de vendre des armes aux partenaires de l'Otan et de fournir des informations des services secrets à Kiev», envisage Masala. Cela pénaliserait non seulement les Ukrainiens, mais aussi l'Europe.

«Bruxelles devrait alors choisir: continuer à soutenir l'Ukraine ou non?»

Une distance toujours plus palpable

L'Europe pourrait certes fournir des éléments de renseignement à Kiev. «Mais ils ne seraient pas aussi précis et variés que ceux des Américains. Nous n'en avons pas les capacités», précise Masala.

L'expert souligne aussi que, sous Trump, les Etats-Unis prennent de plus en plus de distance avec l'Europe depuis plusieurs mois. Le plan initial en 28 points, favorable à Moscou, a contribué à cette distanciation vis-à-vis du Vieux Continent et de l'Otan. Les Etats-Unis s'y présentaient notamment comme médiateurs entre la Russie et l'alliance, alors qu'ils en sont eux-mêmes membres. Carlo Masala énonce:

«Ils prévoient de retirer leurs troupes de Roumanie, de suspendre leurs missions de formation dans les pays baltes et d'envoyer le porte-avions USS Gerald R. Ford dans les Caraïbes.»

Le plus grand porte-avions du monde était auparavant stationné en Méditerranée, près de l'Europe, mais il doit désormais participer à la guerre contre le narcotrafic menée par les Etats-Unis dans les Caraïbes.

«Un retrait d'Ukraine ne ferait que confirmer le départ progressif des Etats-Unis de l'Europe»
Carlo Masala

Scénario 2

Trump augmente la pression sur Kiev

Dans ce scénario, Washington ne franchirait pas le pas ultime d'un retrait complet, mais continuerait à œuvrer pour une issue rapide à la guerre. Si la Russie rejette un plan négocié par les Etats-Unis, l'Ukraine et l'Europe, Trump pourrait à nouveau faire pression sur Kiev. Objectif: l'amener à se plier à certaines exigences russes. Le politologue liste:

«La Maison-Blanche pourrait tenter de contraindre l'Ukraine à des concessions en la menaçant de suspendre les ventes d'armes et la transmission d'informations des services secrets. Mais au vu des dernières déclarations de Zelensky, le gouvernement ne semble pas disposé à céder.»

Après la publication de la première version d'un plan de paix russo-américain, le président ukrainien s'est adressé vendredi à la population en ces termes:

«Nous pourrions être confrontés à un dilemme: perdre notre dignité ou prendre le risque de perdre notre partenaire clé. Accepter 28 points difficiles ou se préparer à un hiver extrêmement rude.»
Volodymyr Zelensky et son épouse Olena Zelenska rendent hommage aux victimes de l'Holodomor à Kiev: c'est ainsi que l'on désigne la famine qui a frappé l'Union soviétique dans les  ...
Volodymyr Zelensky et son épouse Olena Zelenska rendent hommage aux victimes de l'Holodomor à Kiev: c'est ainsi que l'on désigne la famine qui a frappé l'Union soviétique dans les années 1930, provoquée par les dirigeants soviétiques.Image: Imago

Il a toutefois promis de ne pas «trahir» son pays et de travailler à des alternatives. Il est donc peu probable que Volodymyr Zelensky cède à une pression excessive. Cela signifierait probablement la fin de sa carrière politique, après qu'un scandale de corruption dans son entourage a grandement nui à sa popularité nationale.

Le dirigeant devrait se rendre à Washington ce mois-ci pour régler les derniers points litigieux d'un accord de paix. Trump l'accueillera-t-il convenablement ou l'Ukrainien risque-t-il une humiliation publique comme lors de sa visite de février?

Si la Maison-Blanche intensifie sa pression sur Kiev, «l'Europe se retrouverait dans une posture délicate, comme dans le premier scénario», commente Carlo Masala. La porte-parole de Donald Trump, Karoline Leavitt, avait déjà déclaré lundi que les Etats-Unis ne pourraient pas fournir «indéfiniment» des armes à l'Otan.

L'Europe ne lâche pas prise

Contrairement aux Etats-Unis, le continent européen reste uni derrière l'Ukraine, à quelques exceptions près, comme la Hongrie ou la Slovaquie. En Europe, on est conscient que le sort de l'Ukraine est étroitement lié à la sécurité du continent. Les Européens n'ont donc aucun intérêt à ce que Kiev aborde les négociations en position de faiblesse ou ne se résolve à faire des concessions importantes à la Russie.

Masala ne mâche pas ses mots:

«L'Europe doit enfin décider comment elle va gérer la guerre qui se déroule à ses portes, et ce, seule, sans les Etats-Unis»

Jusqu'à présent, le processus de négociation reste à privilégier. Cependant, comme le précise Masala:

«Mais je ne vois pas Moscou s'asseoir à la table des pourparlers. Si elle le fait, ce sera uniquement pour gagner du temps.»

Scénario 3

Trump augmente la pression sur Moscou

Fin octobre, Trump a imposé pour la première fois depuis le début de son second mandat des sanctions contre la Russie. Elles ont touché les grandes compagnies pétrolières Rosneft et Lukoil. Il a exprimé sa frustration envers Poutine:

«Chaque fois que je parle avec Vladimir, les discussions sont bonnes, mais elles ne mènent nulle part»

Un nouveau refus russe entraînerait-il des sanctions américaines supplémentaires? Les Etats-Unis disposent encore de leviers d'action: Washington pourrait autoriser la livraison de missiles Tomahawk à Kiev. Ce système de longue portée avec une grande puissance de frappe placerait Moscou sous une pression militaire accrue. Des sanctions économiques sont également envisageables, qui pourraient porter un énième coup à l'économie déjà fragilisée du Kremlin.

Vladimir Poutine et Donald Trump, lors de leur rencontre en Alaska, le 15 août 2025.
Vladimir Poutine et Donald Trump, lors de leur rencontre en Alaska, le 15 août 2025.Image: Imago

Pour Carlo Masala, «cela est peu probable». Trump rechignerait depuis toujours à fournir de telles armes. Il ajoute:

«Les sanctions contre le pétrole russe n'ont pas non plus été aussi impactantes que le permettraient les instruments dont dispose Washington.»

Le premier groupe gazier au monde, Gazprom, n'a ainsi pas été touché à ce stade.

Un manque de fermeté de l'UE

Si, contre toute attente, le dirigeant américain décidait de suivre cette voie, l'Europe se retrouverait à nouveau en position délicate. Le républicain critique depuis des mois la poursuite de l'approvisionnement en pétrole russe des pays de l'Union européenne.

Bruxelles avait imposé des interdictions d'importation étendues dans le domaine des énergies (charbon et pétrole), mais des exceptions demeurent. Pas plus tard que ce week-end, Trump a encore une fois accusé l'UE de financer indirectement l'offensive du Kremlin.

«Et on aurait pu totalement exclure la Russie du système Swift», ajoute Masala. Les banques russes ne pourraient alors pratiquement plus effectuer aucun paiement à l'échelle internationale. Cela restreindrait fortement le commerce avec des partenaires importants, comme la Chine. Masala conclut:

«Toutes ces possibilités existent pour accroître la pression sur Poutine. Je ne pense toutefois pas que Trump soit prêt à le faire»

(Adaptation en français: Valentine Zenker)

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