Husamettin D., l'homme qui refuse d'être le «violeur» de Gisèle Pelicot
Jugé coupable à Avignon du viol de Gisèle Pelicot, Husamettin D. est finalement le seul des 51 condamnés à avoir maintenu son appel, espérant se débarrasser d'un costume de «violeur» qui lui colle à la peau. Condamné à neuf ans de réclusion par la cour criminelle de Vaucluse en décembre, l'ouvrier de 44 ans comparaîtra donc seul du 6 au 9 octobre devant la cour d'assises du Gard à Nîmes.
Alors que les 16 autres condamnés ayant initialement fait appel se désistaient au fil des mois, ce père d'un enfant trisomique, né en Turquie et ayant connu la grande pauvreté pendant l'enfance, n'a pas varié. Il «entend maintenir son appel en intégralité, tant sur la question de sa responsabilité pénale que sur la peine», expliquait en juin son avocate, Sylvie Menvielle.
Comparaissant libre, après avoir fait 16 mois de détention provisoire, il s'était présenté au palais de Justice d'Avignon en boitant, appuyé sur une canne et le visage caché par un masque chirurgical. «Non, je ne reconnais pas les faits», avait-il lancé au premier jour d'un procès dont le retentissement allait largement dépasser les frontières de la France.
Gisèle Pelicot, 72 ans, a été droguée à son insu aux anxiolytiques pendant une décennie par son désormais ex-mari Dominique, avec qui elle a partagé 50 ans de sa vie, puis violée par celui-ci et des dizaines d'hommes qu'il recrutait sur internet.
Pour Husamettin D., les faits datent de juin 2019. Dominique Pelicot s'était, selon lui, présenté comme l'homme d'un «couple libertin» dont la femme ferait «semblant de dormir». «Elle est où ton épouse?», aurait-il demandé par messagerie. «Elle est à côté de moi», aurait répondu son interlocuteur. Dans la foulée, il aurait reçu un autre message:
«Elle est morte ta femme?»
Husamettin D. s'était rendu le soir même au domicile du couple à Mazan (Vaucluse), à 50 km de chez lui, où Dominique l'aurait fait entrer précautionneusement dans la chambre conjugale, Gisèle étant couchée sur le lit.
«J'ai commencé les préliminaires, j'ai vu qu'elle n'avait pas de réaction. J'ai dit: “Elle est morte ta femme?”». Il m'a dit: “Non, tu te fais des films”. Il l'a pénétrée et elle a un peu levé la tête», avait-il encore expliqué.
Les pénétrations, par les deux hommes, s'étaient poursuivies pendant au moins une demi-heure, jusqu'à ce qu'il entende clairement les ronflements de Gisèle Pelicot et décide de se «casser».
A une magistrate de la cour qui lui faisait remarquer que le viol se définit par toute pénétration sexuelle commise «par violence, contrainte, menace ou surprise», il finissait par admettre:
Son avocate avait néanmoins plaidé l'acquittement, provoquant même l'une des rares colères de Gisèle Pelicot pendant le procès en suggérant que les vidéos enregistrées ce soir-là «révèlent un jeu sexuel à trois» et qu'on pouvait la voir faire «un mouvement du bassin pour se positionner».
Husamettin D. est parti quand il a finalement «compris qu'il ne s'agissait pas d'un jeu» et il n'y a dès lors pas de raison de le condamner, avait argué sans succès Me Menvielle.
Si l'expertise psychologique a relevé chez l'accusé «une propension aux pratiques hors-normes dans la sphère sexuelle», il ne souffrait d'aucune anomalie mentale ayant pu altérer ou abolir son discernement, selon l'expertise psychiatrique. A Avignon, ses derniers mots avaient été:
A Nîmes, où il comparaîtra libre pour raisons de santé, il encourt à nouveau 20 années de réclusion.