Robert Lewandowski n'était pas sur la pelouse, dimanche soir lors du déplacement du FC Barcelone sur le terrain de l'Atlético Madrid (victoire 1-0 des blaugranas). Le club catalan avait pourtant tout tenté pour faire annuler la suspension de trois matchs frappant son attaquant depuis novembre. Il avait dans un premier temps fait appel auprès de la Fédération, mais sa requête avait été rejetée. Il avait ensuite sollicité le Tribunal des sports espagnols (TAD) sans davantage de succès puis enfin la justice civile. Le tribunal central des contentieux de Madrid avait alors adopté une mesure conservatoire contre la suspension, permettant au buteur de jouer contre l'Espanyol le 31 décembre, avant que la sanction ne soit confirmée (et acceptée par le Barça) la semaine dernière.
De nombreux observateurs de cette saga en Espagne ont estimé que l'attitude du FC Barcelone était malvenue. D'abord parce que Lewandowski était en réalité suspendu pour un match (expulsion contre Osasuna) + deux matchs supplémentaires (geste d'humeur à la sortie du terrain). Or si le Barça n'a pas contesté l'expulsion elle-même, il a tout de même fait appel en bloc et obtenu une mesure conservatoire pour les trois matchs, le Tribunal de Madrid ignorant la distinction entre les deux sanctions.
Mais ce qui a le plus déplu ou inquiété, c'est que la démarche du club catalan risque de créer un dangereux précédent néfaste pour la Liga. Va-t-on vers une «judiciarisation» du football? Il est facile en effet de penser que les autres clubs vont désormais se tourner vers les tribunaux extra-sportifs pour tenter de faire annuler, ou de retarder, la suspension de leurs meilleurs éléments. C'est ce que soulignait un journal espagnol fin décembre:
L'affaire Lewandowski a agité le débat public ces dernières semaines en Espagne. Dans El pais, un lecteur a pris sa plume pour prédire «un précédent inquiétant» et cela pour deux raisons:
Une boîte de Pandore? Un dangereux précédent? Le Barça est pourtant dans son (bon) droit: il ne fait qu'utiliser les moyens à sa disposition pour défendre ses intérêts légitimes. «La question est toujours de savoir si l'affaire en question relève de la compétence civile ou de la compétence arbitrale du sport», pointe Jorge Ibarrola, avocat spécialiste du droit du sport. Contacté par watson, il rappelle qu'en Suisse aussi, un club de football peut contester une décision imposée par la Swiss Football League (SFL).
Reste tout de même que «le football a toujours fonctionné sur une certaine idée de noblesse: ne pas s'adresser aux tribunaux ordinaires pour régler les litiges dans les compétitions. Un principe général dans le sport», considère le journaliste du média madrilène Alfredo Relaño, ajoutant au débat un peu de la rivalité ancestrale entre le Real et le Barça. «C'est une remarque de journaliste», balaie Ibarrola. «En tant qu'avocat, s'il y a plusieurs voies possibles, je choisirai toujours celle qui est la plus intéressante pour mon client, qu'il s'agisse de justice civile (tribunal ordinaire), arbitrale (TAS) ou sportive (par exemple la Swiss Football League).»
Pour la petite histoire, Robert Lewandowski a donc purgé son premier match de suspension dimanche contre l'Atlético. Il lui en reste encore deux: face à Getafe (22 janvier) puis Gérone (29 janvier). Il pourra par ailleurs disputer la Supercoupe du Roi organisée en Arabie saoudite (11-15 janvier) puisque cette compétition n'est pas concernée par sa suspension.