«Swiss all the way», tel est le slogan de la dernière campagne de pub de la compagnie helvétique. Suisse sur toute la ligne, donc. Mais à l'avenir, les avions de l'héritière de Swissair indiqueront clairement à qui ils appartiennent réellement.
L'inscription «Member of Lufthansa Group» sera visible sur le fuselage arrière des appareils de Swiss. Un petit pas, mais un pas symboliquement important. En effet, les passagers à travers le monde n'ont pas tous forcément conscience que Swiss fait partie de Lufthansa. Dans les aéroports internationaux, on entend d'ailleurs encore parfois résonner l'ancien nom de Swissair.
Lufthansa a dévoilé jeudi sa stratégie de marque pour l'ensemble de ses sociétés. Le groupe renforcera par conséquent aussi sa présence sur les avions des compagnies sœurs de Swiss, Austrian ou Brussels Airlines. Edelweiss l'avait déjà annoncé il y a quelques mois.
Le nouveau patron de la compagnie helvétique, Jens Fehlinger, ne voit pas de contradiction entre ce logo en plus sur la carlingue et la «suissitude» autoproclamée. Swiss fait désormais partie du groupe Lufthansa, et cela apporte de nombreux avantages. En Europe, on constate qu'il est presque impossible pour les petites compagnies aériennes de réussir dans leur coin sur le marché largement consolidé de l'aviation.
Il faut dire que Swiss a connu une année très faste en 2024. Elle a réalisé un bénéfice de 684 millions de francs, le deuxième plus élevé de son histoire. Le chiffre d'affaires a, lui, atteint un niveau record de 5,6 milliards. Et avec 18 millions de passagers - 9% supplémentaires - , la compagnie a presque retrouvé son niveau d'avant la pandémie. Avec ce résultat, l'entreprise confirme son statut de vache à lait au sein du groupe allemand, qui a vu son bénéfice baisser l'an dernier.
Le directeur financier de Swiss, Dennis Weber, reconnaît toutefois que ce bénéfice s'explique par des circonstances contextuelles. La filiale de Lufthansa est en effet confrontée - comme de nombreuses autres - à de longs délais d'attente pour la livraison de pièces de rechange, à des retards pour les réacteurs et à des travaux de maintenance inattendus, notamment sur les A320 et A220. Swiss a reçu des compensations de la part des fournisseurs pour les coûts supplémentaires que cela a engendré.
Si Denis Weber ne précise pas le montant de ces dédommagements, ils ne suffiraient cependant pas à couvrir le préjudice. Swiss a notamment dû augmenter le nombre de ses vols en «wet-lease» opérés par son partenaire letton Air Baltic afin de ne pas devoir procéder à des annulations. Le responsable estime en outre que les problèmes de réacteurs persisteront au-delà de 2027. C'est pourquoi des négociations sont en cours avec le constructeur américain Pratt & Whitney avec en ligne de mire, des compensations supplémentaires.
La mise en service des nouveaux engins long-courriers a également pris un léger retard. Swiss a commandé dix A350 à l'européen Airbus. Il a longtemps été question d'une mise en service cet été, mais cela devrait désormais plutôt se produire à la fin de la belle saison ou au début de l'automne. Selon Oliver Buchhofer, chef d'exploitation, les préparatifs vont bon train, de la reconversion des pilotes à la formation du personnel de cabine, en passant par les certifications de l'Office fédéral de l'aviation civile.
Le premier avion – environ 300 millions de francs, prix catalogue – arborera de sujets suisses inspirés de l'architecture, de la culture, du sport et de la nature. Parmi eux la statue de Freddie Mercury à Montreux, la cathédrale Grossmünster de Zurich, le pont couvert à Lucerne, le Palais fédéral, le siège de l'ONU à Genève ou encore le grand écran du festival du film de Locarno. Sans oublier la pomme de Guillaume Tell et Helvetia.
Parallèlement, Swiss lance un nouveau concept à bord des vols long-courriers, le «Swiss Senses». Il prévoit notamment des cubes de Sbrinz pour l'apéritif, au lieu de biscuits salés italiens. Dans les toilettes, on trouvera des savons et des crèmes pour les mains spécialement créés par l'entreprise zurichoise Soeder. La directrice commerciale de Swiss, Heike Birlenbach, ne confirme pas le retour du café gratuit à bord des vols courts. L'idée est en train d'être examinée, explique celle qui a dirigé la compagnie ad interim avant l'arrivée de Fehlinger.
Malgré les bons résultats financiers, il reste des éléments à corriger, comme le reconnaît le chef d'exploitation Oliver Buchhofer. La ponctualité, par exemple, laisse toujours à désirer. L'année dernière, seuls 65% des vols sont arrivés à l'heure. Selon le cadre, ce chiffre devrait atteindre 70% cette année, grâce à de nombreuses mesures d'efficacité.
Pour cela, on compte aussi sur la collaboration avec des partenaires comme l'autorité de contrôle aérien Skyguide, qui s'est récemment fait remarquer lors de pannes techniques, et l'entreprise d'assistance au sol Swissport.
Impossible en revanche de contrôler la météo qui, selon Buchhofer, entraîne de plus en plus de restrictions de capacité dans le ciel. Il en va de même pour la géopolitique, qui provoque des fermetures d'espaces aériens et contraint Swiss à emprunter des itinéraires plus longs. La compagnie doit ainsi faire un détour pour contourner l'espace aérien russe sur le trajet entre le pôle Nord et Tokyo. Les turbulences continuent par ailleurs de générer des coûts supplémentaires.
Au total, 2,5% de tous les bagages ont été perdus, ce qui correspond à des dizaines de milliers de valises.
Les compensations à la clientèle ainsi que les frais de taxi et d'hébergement à assumer en cas de retards importants et d'annulations de vols ont coûté 52 millions l'année dernière, selon le directeur financier. A cela s'ajoute le fait que le gouvernement américain exige depuis peu de Swiss et les autres des remboursements automatiques qui viennent aussi grever le bilan, comme CH Media en avait parlé.
(Traduit et adapté par Valentine Zenker)