Après une trentaine d'années passées aux CFF, il souhaitait quitter son poste, mais pas l'entreprise elle-même. Pourtant, vouloir changer de rôle lui a finalement coûté son emploi. En effet, lorsqu’il a postulé pour une autre place interne en janvier 2022, il a commis une grave erreur: il a soumis un dossier contenant un faux certificat de travail intermédiaire.
Ce faux document mentionnait des tâches qu’il n’avait pas réellement exercées, ainsi que des formulations bien plus flatteuses – parsemées de superlatifs, par exemple – que celles figurant sur le document authentique qu’il avait reçu. Mais cela ne s'est pas arrêté là: l’employé a ensuite tenté de dissimuler son acte en falsifiant un deuxième document.
L’affaire a été portée à la connaissance du public lorsqu’elle a été examinée par le Tribunal administratif fédéral. Les CFF avaient licencié l’individu avec effet immédiat après avoir découvert que le certificat intermédiaire était un faux. L'ex-employé a contesté cette décision, réclamant des arriérés de salaire ainsi qu’une indemnité équivalente à neuf mois de salaire brut.
Le Tribunal administratif fédéral a rejeté cette demande, estimant que les preuves recueillies par le service d’enquête des CFF étaient suffisantes pour prouver que l’individu avait manipulé le document. Le faux certificat, daté du 1ᵉʳ novembre 2020, contenait exactement les modifications que l'employé avait demandées après l’établissement du véritable certificat intermédiaire en octobre, modifications que l'employeur avait pourtant refusées. Les supérieurs interrogés par les enquêteurs ont également confirmé ce refus, corroboré par des notes internes du service des ressources humaines des CFF.
Mais cette falsification ne lui a visiblement pas suffi. Deux jours après que les CFF l’ont confronté aux incohérences, il a remis un second document falsifié. Les raisons de cette nouvelle tentative restent floues – il est probable que ce deuxième certificat visait à masquer le premier faux. Cependant, là encore, les signatures ne correspondaient pas à celles de la version originale. Les signatures semblaient avoir été décalquées au stylo.
L’homme a affirmé ne pas se souvenir des documents qu’il avait soumis lors de sa candidature interne, ni de la manière dont les signatures avaient été apposées sur les certificats. Il a également évoqué des problèmes techniques, soutenant que «le système d’information interne de l’entreprise est notoirement sujet aux erreurs».
Cette défense n’a pas convaincu les juges. Il n’y avait «aucune explication concluante» quant à l’existence d’un certificat intermédiaire daté du 1er novembre, comme celui présenté par l’individu, a écrit le tribunal.
Cette conclusion est cruciale, car elle a servi de fondement à la justification du licenciement sans préavis par les CFF. La falsification de documents n'est pas seulement un délit, selon les CFF, mais elle a également détruit «fondamentalement et définitivement» la relation de confiance essentielle à la poursuite des rapports de travail. De plus, les CFF indiquent qu'il y avait déjà eu des «irrégularités» avec cet employé.
Les CFF ont précisé qu'il avait seulement partiellement réussi son évaluation du personnel en 2020. La même année, un autre incident a été signalé: selon les CFF, l’employé avait tenu des propos «insultants et discréditants» et n’avait pas respecté les règles concernant l’utilisation des véhicules de service. De son côté, l’intéressé affirme avoir toujours été apprécié et reconnu pour ses compétences professionnelles.
Ce conflit n’a pas été examiné par le Tribunal administratif fédéral. Dans l'affaire principale, le tribunal a conclu que l’employé avait gravement violé son devoir de loyauté en falsifiant son certificat de travail. À cela s’ajoute le fait que, dans sa fonction, il avait une responsabilité considérable «pour l’intégrité physique d’un grand nombre de voyageurs ferroviaires», impliquant «un degré de confiance particulier dans l’intégrité du personnel concerné». Pour ces raisons, le Tribunal administratif a jugé le licenciement immédiat sans préavis justifié. Cette décision peut faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
Interrogés, les CFF affirment ne pas disposer de statistiques sur les certificats de travail falsifiés. «Mais il s'agit clairement de cas isolés et rares», précise le porte-parole. Pour vérifier l’authenticité des certificats, les CFF demandent systématiquement des références.
La falsification d’un certificat de travail est un délit de faux dans les titres. Quiconque s'en rend coupable risque une amende ou une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans. Toutefois, le Tribunal administratif fédéral n’a pas examiné les aspects pénaux de cette affaire. Jeudi, les CFF n'ont pas pu fournir d'informations sur l'état d'une éventuelle plainte pénale contre l'ex-employé.
Arrêt A-2134/2022 du 9 septembre 2024
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci