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La gauche radicale n'a pas à dicter sa loi à Lausanne

Le municipal lausannois Pierre-Antoine Hildbrand enfariné par un collectif queer. Lausanne, 23 septembre 2025.
Le municipal lausannois Pierre-Antoine Hildbrand enfariné par un collectif queer. Lausanne, 23 septembre 2025.Image: KEYSTONE montage: watson
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La gauche radicale n'a pas à dicter sa loi à Lausanne

Municipal enfariné, contre-manifestation intimidante, affiches d'une conseillère d'Etat les yeux bandés: usant de violence politique, la gauche radicale veut s'accaparer l'espace public à Lausanne. La Municipalité est prise à son propre jeu.
24.09.2025, 18:5726.09.2025, 04:27

Dans les régimes islamistes, cela porte le nom de ministère pour la promotion de la vertu et la répression du vice. C’est totalement arbitraire dans son principe et son application. La gauche radicale, qui entretient depuis plus d’un siècle des relations avec l’islamisme perçu comme une force révolutionnaire dirigée contre l’Occident capitaliste et colonisateur, prétend, elle aussi, faire le bien et combattre le mal. Cela, au nom d’un magistère moral qui, telle la bonne parole, devrait s'imposer à tous.

Une humiliation publique

L’enfarinage dont le municipal lausannois à la sécurité Pierre-Antoine Hildbrand a été la cible mardi à Lausanne, alors qu’il inaugurait des bancs publics peints aux couleurs arc-en-ciel LGBTQIA+, participe de cette volonté de punir qui s'écarte du droit chemin, vers lequel chacun doit converger sous peine d’être «affiché». L’enfarinage qu’a subi Pierre-Antoine Hildbrand, par ailleurs en charge des politiques LGBTQIA+ à la Municipalité, est un rappel à l'ordre en même temps qu'une séance d'humiliation publique.

Alors, bien sûr, pour donner un vernis de justice à ce procédé sadique, il faut charger le désigné coupable de tous les maux. Le «collectif queer» qui a porté atteinte à l’intégrité physique et morale du municipal, l’accuse, lui et les autorités de Lausanne, de «pinkwashing» pour masquer les «violences policières». Le communiqué des enfarineurs sonne comme la farce d’un procès de Moscou, où celui qui comparaît n'a aucune chance de sortir libre du tribunal:

«Vous pouvez repeindre des bancs toute la journée pour apaiser votre conscience. La seule symbolique que porte votre action est que sous la peinture arc-en-ciel, il y a la couleur de votre culpabilité»
Le communiqué du collectif queer

Il y a eu, avant cela, la contre-manifestation du 18 septembre à une «marche silencieuse pour Israël et contre l’antisémitisme». L’expression «pour Israël» était quant à elle malvenue, au moment où le gouvernement à la tête d'Israël est accusé de commettre un génocide à Gaza par une commission de l’ONU. Mais on pouvait aussi comprendre ce «Pour Israël» comme un «Pour le droit à l’existence d’Israël», alors que les juifs israéliens tués le 7 Octobre et les otages restants aux mains du Hamas ne sont jamais cités par la gauche radicale.

On peut tout à fait admettre, en démocratie, la tenue, le même jour, dans une même ville, de deux rassemblements aux idées opposées. Mais on ne peut tolérer que l’un cherche à marcher sur l’autre. D’autant moins que la marche aux couleurs du drapeau israélien n’était pas composée de nervis de l’ultra-droite sioniste, type Ligue de défense juive, mais en majorité semble-t-il de quadras et quinquas de la classe moyenne qui avaient bravé leur peur.

Faire peur afin de faire taire

Or, il y a bien eu la volonté d'une partie au moins des contre-manifestants, bien plus nombreux, d'aller au contact des «marcheurs». Cela porte un nom: intimidation. L’intimidation n’a qu’un but: faire peur afin de faire taire. On pensait cette méthode réservée aux fachos.

Mais le collectif à l’origine de la contre-manifestation avait «blindé» sa communication sur le mode de «c’est pas nous, c’est eux»: dans son appel paru les jours précédents sur Instagram, il s’agissait de «faire bloc contre la présence des génocidaires, des sionistes et des fascistes». Honteux pour l'éternité, les pro-Israël; à jamais vertueux, les contre-manifestants...

Dans cette croisade pour la vertu et contre le vice, on peut aussi citer la campagne d’affichage des Jeunes POP vaudois exigeant la démission d’une Valérie Dittli représentée les yeux bandés, la conseillère d’Etat étant accusée d’avoir cherché à ménager les hauts revenus du canton.

Après Dittli les yeux bandés, Borloz en «sioniste»

Dans une vidéo postée le 20 septembre sur le compte Instagram des Jeunes Pop Suisse, une militante remet le couvert contre l’édile vaudoise. Elle casse au passage le chef du Département de l’enseignement et de la formation, Frédéric Borloz, qui avait dû gérer l’occupation de l’Université en 2024 par des propalestiniens. Dans la vidéo, la voix de la militante faisant place à un silence gros de sous-entendus, le ministre cantonal apparaît vêtu en flic américain, la tête auréolée du drapeau israélien, comme pour signifier qu’il prend ses ordres chez les «américano-sionistes» – l'idéologue antisémite Alain Soral a laissé des traces.

L’expression des idées, y compris les plus radicales, sauf appel au meurtre et dans les limites de la loi réprimant le racisme et l’homophobie, sont au fondement de la démocratie. Le problème posé par cet enfarinage, cette contre-manifestation intimidante, ces affiches d’une conseillère d’Etat les yeux bandés, ce sont la violence politique et le sentiment d’impunité qui s’en dégagent. C’est la propension de la gauche radicale à s’accaparer la rue et d’en exclure ceux dont elle juge qu’ils n’ont pas droit de cité.

Une municipalité dépassée

La municipalité lausannoise de gauche est prise à son propre jeu de l’ouverture aux courants sociétaux radicaux qu’elle a pensé pouvoir contrôler. Or il semble qu’elle ne contrôle plus grand-chose de ce côté-là. Ses audaces ne sont jamais qu’une pâle copie aux yeux des révolutionnaires détenteurs de l’original.

Jimmy Kimmel is back!
Video: watson
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