Suisse
Fribourg

La double vie de Marianne B. aurait tué 120 chiens

120 chiens abattus: le mensonge de toute une vie de Marianne B.
Derrière une façade de vie équilibrée, Marianne B. faisait vivre l'enfer à de nombreux animaux.Image: Ornella Cacace / Imago, montage watson

La double vie de cette Suissesse aurait conduit 120 chiens à la mort

Une propriétaire de chiens problématique, pourtant connue des autorités vétérinaires dans le canton de Fribourg, a causé l'euthanasie de 120 canidés. Portrait de Marianne B.
17.11.2025, 18:5317.11.2025, 18:53
Andreas Maurer / CH media

Lors d’une intervention début novembre, les autorités ont découvert à Ramiswil (SO) une ferme où animaux malades, affamés et négligés s’entassaient. Vétérinaires et police ont saisi 43 chevaux et deux chèvres. Les 120 chiens présents ont été euthanasiés. La propriétaire, Marianne B. - signalée en Suisse romande -, fait désormais l’objet d’une procédure pour violation de la loi sur la protection des animaux, mais qui est-elle?

Marianne B. a étudié à l’ETH Zurich et obtenu un diplôme en sciences alimentaires. L’institution confirme son titre. A 57 ans, ce diplôme compte énormément pour elle: elle se présente systématiquement comme «dipl. ETH».

Pendant ses études, elle tombe enceinte sans l’avoir prévu. Elle ambitionne une carrière plutôt qu’une vie de mère, mais décide de garder l’enfant et revoit ses plans. La famille s’agrandira plus tard: elle met au monde huit enfants.

De mère de famille à coach ultime

De son côté, son mari fait carrière dans l’armée. Le couple finit par se séparer et Marianne B. se retrouve dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle. La mère de famille décide toutefois de transformer cette contrainte en opportunité, et devient coach de vie indépendante.

Elle écrit des guides pour les éditions du Beobachter et travaille en tant que journaliste freelance. La nutrition des enfants devient sa spécialité. Elle donne aussi des conseils éducatifs et intervient comme coach en activité physique.

Elle va jusqu’à écrire un guide sur le cancer, dans lequel elle explique qu’une alimentation adaptée permettrait de prévenir ou de guérir la maladie. Elle glisse bien quelques avertissements signalant que ces conseils manquent de fondement scientifique, mais cela ne l’empêche pas de les donner. Elle collabore avec un oncologue reconnu et apparaît dans des émissions santé.

Monde idyllique: Marianne B. avec ses chevaux en 2021.
Marianne B. avec ses chevaux en 2021.Image: Ornella Cacace

Dans les médias, elle fait bonne figure. En se présentant comme «diplômée en sciences alimentaires ETH», elle se forge une image sérieuse. Elle s’appuie sur sa vie familiale hors norme pour revendiquer une expérience pratique. Son credo attire: «il suffit de savourer, tout est une question de mesure», répète-t-elle.

Marianne B. devient une conseillère pour toutes les questions du quotidien. Elle facture ses consultations nutritionnelles 100 francs de l’heure. Une séance de «personal training» est quant à elle proposée à 120 francs.

L'horreur enfin dévoilée

Il existe des coaches qui ont connu des crises personnelles avant de conseiller d’autres personnes dans ce domaine. Cette démarche est crédible lorsque le coach expose ses propres problèmes avec transparence.

Marianne B. opte pour un autre chemin. Elle fait croire qu’elle a trouvé sa propre recette pour une vie équilibrée – alors qu’elle sombre dans l’excès. Elle a tout en trop grande quantité: hommes, enfants, animaux.

Un mal psychologique

L'animal hoarding disorder (en français «syndrome de l’accumulation d’animaux»), est un trouble psychique dans lequel des personnes gardent un nombre incontrôlé d’animaux et sont incapables de gérer leurs soins, leur nourriture et leur hygiène. Les personnes concernées se voient comme des sauveurs, et ne reconnaissent pas la souffrance qu’elles peuvent provoquer chez les bêtes. Elles vivent souvent dans des logements insalubres, où les animaux sont malades ou sous-alimentés.
Ce trouble apparaît fréquemment en lien avec la dépression, des troubles obsessionnels ou un isolement social. Contrairement à un simple amour des animaux, la perte de contrôle est au centre de l'animal hoarding. Les personnes ne peuvent plus s'empêcher d’accueillir de nouveaux animaux chez elles, alors qu’elles sont déjà dépassées. Les autorités interviennent généralement seulement lorsque des voisins ou des organisations de protection des animaux signalent la situation. (chm)

Début novembre, l’édifice de mensonges s’effondre. L’Office vétérinaire soleurois évacue son domaine à Ramiswil (SO), saisit 43 chevaux et deux chèvres – et euthanasie 120 chiens. Ils étaient négligés et n’auraient plus pu être sauvés.

Depuis, deux questions agitent le mouvement suisse de protection animale:

  • Etait-ce vraiment nécessaire?
  • Et n’aurait-on pas pu détecter les problèmes plus tôt?

Des appartements souillés d'excréments

L’autorité vétérinaire du canton de Fribourg connaissait déjà Marianne B. depuis le printemps dernier. A Charmey, en Gruyère, la quinquagénaire possède deux appartements achetés environ un million de francs chacun.Dans un 4,5 pièces, elle garde plus de vingt chiens dans des cages. Deux chèvres vivent parmi eux. Les matelas sont imbibés d’urine.

A l'époque, un voisin documente la situation, car l’appartement insalubre endommage aussi son propre logement. Il résume:

«Avant, mon appartement sentait le bois. Aujourd’hui, il pue le chien»

L’homme finit par alerter la police, qui fait intervenir le service vétérinaire. Lorsqu’un spécialiste animalier entre dans l’appartement, il manque, selon une source, de vomir.

Les copropriétaires engagent une procédure judiciaire pour contraindre à la désinfection des lieux. Mais Marianne B. ne réagit pas.

Dans le second appartement, la situation est similaire : de grands chiens et des chèvres y vivent. L’urine dégouline du balcon jusqu’aux voisins. Ceux-ci rapportent des aboiements jour et nuit, des griffures sur les portes, des excréments partout. Les animaux effraient enfants et adultes. La propriétaire répond aux remarques par un sourire.

La méfiance d'une exploitante de pension

En mars dernier, après l’intervention des autorités, Marianne B. quitte Charmey avec ses chiens et contacte l’exploitante d’une pension canine dans le canton de Saint-Gall. La coach affirme vouloir partir en vacances avec son mari et cherche une place pour cinq chiens.

La responsable de la pension accepte la garde, et Marianne B. arrive au volant d’un grand SUV. Les chiens ne sont pas logés séparément dans des boxes comme cela est recommandé, mais entassés ensemble dans le véhicule. Et ils ne sont pas cinq, mais dix, tous en état de négligence avancée. La gérante explique:

«Les chiens étaient sales et sentaient mauvais, mais j’ai pu les requinquer»

Au même moment, une information circule sur les forums de protection des animaux, qui dit qu'une douzaine de chiots bergers de Maremme auraient été saisis dans le canton de Soleure. Marianne B. a déposé des chiens de cette race dans la pension.

La responsable commence à se méfier, et finit par contacter le service vétérinaire soleurois. On lui répond qu’elle doit simplement rendre les chiens à leur propriétaire.

Une intervention tardive des autorités

L’Office vétérinaire inspecte plusieurs fois le domaine de Ramiswil – la dernière visite date de l’été 2025. Aucun manquement n’est alors constaté. Les autorités ont-elles vraiment pris au sérieux les signaux venant de Saint-Gall et de Fribourg? Le flux d’information fonctionne-t-il?

Juste après l’euthanasie massive, l’Office soleurois répond aux médias. Peu après, le gouvernement mandate une enquête externe – puis cesse toute communication. Au nom de l’enquête en cours et de la protection des données, le canton bloque désormais les demandes des journalistes.

Le service vétérinaire fribourgeois confirme son intervention à Charmey, mais rejette toute responsabilité dans le cadre d’une éventuelle interdiction pour Marianne B. de détenir des animaux. Celle-ci devrait en effet relever du canton de domicile, soit Soleure.

Marianne B. bénéficie de la présomption d’innocence. Elle ne répond pas aux sollicitations. Sa messagerie vocale est saturée.

Traduit de l'allemand par Joel Espi

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