Lors des élections fédérales de 2023, le Centre et les libéraux ont livré un duel pour les pourcentages de pouvoir. La lutte pour l'hégémonie dans le camp de droite n'était pas seulement chargée historiquement, avec des références remontant à la guerre du Sonderbund, mais était également liée de manière très concrète à la question de l'hégémonie au sein du Conseil fédéral. Celui qui prend l'avantage a également droit à deux sièges au Conseil fédéral. C'est ce que dicte la «formule magique».
Certes, le PLR a fini par devancer le parti du Centre en termes de parts de suffrages (et selon un nouveau décompte de l'Office fédéral de la statistique). Cependant, le Centre est mieux représenté que le PLR au Palais fédéral avec 31 sièges contre 27 au Conseil national et 15 contre 11 au Conseil des Etats. Tant que cette situation ne se reflète pas dans la composition du gouvernement national, la tension demeure élevée. Avec une restriction décisive: les sièges ne sont redistribués qu’en cas de démission.
Dans cette logique, après l'annonce de la démission de la ministre de la Défense Viola Amherd, c'est maintenant Ignazio Cassis qui est au centre de l'attention. Déjà lors des élections de décembre dernier, le conseiller aux Etats du Centre Stefan Engler avait résumé l'état d'esprit du parti au Tages-Anzeiger:
Cependant, Amherd a déjà annoncé sa démission pour mars. Il est probable que le Centre soit actuellement plus vulnérable face au Parlement qu'à tout autre moment de la législature en cours. Dans un délai aussi court, il serait difficile pour lui de préparer une offensive importante contre le PLR.
Le parti de Viola Amherd ne devrait pas seulement sortir deux candidats de son chapeau, mais aussi préparer le terrain pour une petite révolution de palais avec la gauche du Centre. Et l'Assemblée fédérale, très sensible aux minorités lors des élections au Conseil fédéral, devrait accorder le même jour sa confiance à deux nouveaux représentants centristes
Une attaque contre les PLR serait rendue encore plus difficile par un détail de la loi sur le Parlement. Lors d'une élection de remplacement, c'est le membre qui a siégé le plus longtemps au Conseil fédéral qui est remplacé en premier — contrairement à l'idée reçue selon laquelle l'ordre des démissions serait décisif. Comme Cassis a plus d'années de mandat à son actif qu'Amherd, l'attaque pour le siège du PLR devrait donc avoir lieu en premier — avec la possibilité d'un retour de bâton immédiat lors du remplacement de Viola Amherd.
Le PLR pourrait ainsi être tenté de profiter de l'élan et d'assurer ses prérogatives dans le sillage de l'élection de la succession Amherd. Après tout, Cassis siège lui aussi depuis 2017 dans l'organe suprême de la Suisse. En 2022, il était président de la Confédération, il devra attendre encore longtemps pour le prochain tournus.
Si les libéraux-radicaux s'assurent le soutien de l'UDC et de quelques politiciens du centre qui se comptent plutôt parmi l'aile conservatrice, une attaque de Pfister sur le siège du PLR serait rapidement réduite à néant. Ce n'est pas la première fois que les conseillers aux Etats du centre refusent de servir leur président de parti.
Et pourtant, sur le fond, peu d'éléments plaident en faveur d'un départ précipité de Cassis. Son dossier le plus important, un accord avec l'UE, n'a été relancé que peu avant Noël. On s'attend à ce que Cassis donne des détails sur les accords bilatéraux au printemps, et ce n'est qu'ensuite qu'interviendra la lutte de politique intérieure pour leur conclusion.
En outre, la Suisse assumera la présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 2026. On dit de Cassis qu'il aimerait occuper ce poste prestigieux.
Indépendamment de tous les jeux qui accompagnent toujours une élection au Conseil fédéral, le parti concerné se montre sûr de lui:
Il renvoie dans ce contexte à une déclaration du président du PLR Thierry Burkart: ce qui sera décisif au final, c'est le rapport de force au sein des Chambres fédérales réunies.
Traduit et adapté par Noëline Flippe