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Attaque au couteau à Zurich: «Cela pourrait se reproduire»

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Attaque au couteau à Zurich: «Cela pourrait se reproduire»

The Zurich Synagogue is illuminated to commemorate the 80th anniversary of the Kristallnacht in Zurich, Switzerland, 08 November 2018. On 09 November 1938, a vast series of attacks against Jewish peop ...
La synagogue de Zurich (archives).Image: KEYSTONE
Un adolescent de 15 ans a attaqué un juif à Zurich. Johannes Saal, de l'université de Lucerne, analyse les motivations derrière de tels actes.
07.03.2024, 12:1207.03.2024, 13:24
Christoph Bernet / ch media
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Un jeune de quinze ans a tenté de tuer un juif à Zurich. Johannes Saal, chercheur à l'université de Lucerne sur la radicalisation des djihadistes, explique comment une telle attaque a pu avoir lieu et quels sont les facteurs qui favorisent ce genre d'actes.

Un adolescent de quinze ans a tenté de tuer un juif orthodoxe à coups de couteau, samedi, à Zurich. Comment une telle chose peut-elle se produire?
Johannes Saal: J'espère que les enquêtes permettront d'éclaircir les circonstances de cette affaire. De manière générale, on peut dire que cet acte a eu lieu dans le contexte de deux développements:

  • D'une part, il s'agit d'un nouvel acte de violence inspiré par l'Etat islamique (EI) sur le sol suisse, après l'attaque mortelle au couteau à Morges (VD) en septembre 2020 et l'attaque au couteau contre deux femmes dans le grand magasin Manor à Lugano en novembre 2020.
  • D'autre part, il s'agit de l'attaque terroriste du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 et des actes de guerre que cela a déclenchés dans la bande de Gaza. Le conflit entre Israéliens et Palestiniens devient, dans la narration des groupes djihadistes, un conflit entre juifs et musulmans. Comme lors de précédents conflits au Proche-Orient, cela a le potentiel d'inspirer des actes de violence terroriste en Europe également.

Quel rôle joue l'antisémitisme dans ce contexte?
Comme partout en Europe, les incidents antisémites ont fortement augmenté en Suisse depuis l'attaque du Hamas. Ils se sont toutefois manifestés pour la plupart sous la forme de violence verbale, de commentaires en ligne ou en marge de manifestations. La violence physique contre les juifs a été extrêmement rare en Suisse jusqu'à présent.

«Le fait que l'on tente de tuer un homme juif simplement parce qu'il est juif marque une nouvelle étape dans l'escalade»
Johannes Saal est sociologue des religions et politologue à l'Université de Lucerne. Ses recherches portent principalement sur les processus de radicalisation et les réseaux de djihadistes dans l ...
Image: dr
A propos
Johannes Saal est sociologue des religions et politologue à l'Université de Lucerne.Ses recherches portent principalement sur les processus de radicalisation et les réseaux de djihadistes dans l'espace germanophone. de l'Université de Lucerne.

S'agit-il d'un cas isolé?
Je trouve que le terme de «cas isolé» est difficile à employer dans un tel contexte. Comme mentionné, il y a d'une part une continuité avec les attaques de Morges et de Lugano, également inspirées par l'EI. D'autre part, il est fort probable que l'auteur de l'attaque de Zurich n'ait pas agi de manière coordonnée et en tant que membre d'un groupe de terroristes agissant de concert, comme les auteurs de l'attentat du Bataclan à Paris en novembre 2015. Mais il a suivi le modus operandi que l'EI propage depuis de nombreuses années:

«Des attentats qui nécessitent peu de préparation et des moyens facilement disponibles comme des couteaux»

Faut-il donc s'attendre à d'autres attentats similaires en Suisse?
C'est déjà le troisième acte de ce type dans notre pays. Je n'excluais déjà pas avant l'attaque de Zurich que cela se reproduise, et je ne l'exclus toujours pas aujourd'hui. Il peut y avoir des imitateurs, il peut y avoir de nouveaux cas indépendants.

«Ce qui est clair, c'est qu'il existe en Suisse un potentiel de personnes qui se radicalisent et qui pourraient être capables de commettre ce genre d'action»

De quel genre de personnes s'agit-il?
La recherche et l'étude des documents d'enquête ne permettent pas de dégager un profil unique. Mais il existe un certain nombre de facteurs qui pourraient favoriser la radicalisation.

Lesquels?
Premièrement, l'âge: ce sont souvent des jeunes d'entre 13 et 20 ans qui se radicalisent. Il s'agit généralement de personnes qui ont du mal à s'intégrer socialement, à trouver leur place à l'école ou dans des associations. A cela s'ajoute souvent une difficile recherche d'identité. Selon les premières déclarations de l'entourage scolaire et familial, ces facteurs prévalaient chez l'agresseur de Zurich: c'est un jeune musulman issu de l'immigration qui s'est fait remarquer par son caractère solitaire.

Comment fonctionne concrètement un processus de radicalisation?
La recherche nous apprend que les personnes concernées commencent souvent par chercher des personnes qui partagent leur vision du monde et leurs intérêts.

«Ce sont donc des sujets agissant de manière tout à fait autonome, et non de simples victimes de lavage de cerveau»

Nous ne savons pas encore si l'agresseur de Zurich a eu des contacts physiques ou sur internet avec les milieux islamistes locaux. De manière générale, la décision de devenir soi-même un auteur d'attentat est très individuelle. Souvent, même les enquêteurs ne parviennent pas à faire toute la lumière sur cette question.

Dans sa vidéo de revendication, l'auteur de l'attentat faisait référence au «chef de l'Etat islamique». Comment ce contact s'est-il établi?
Il est impossible de le dire à l'heure actuelle. Le fait est que sa vidéo de revendication a été diffusée très rapidement et très largement par des canaux proches de l'Etat islamique. C'est à mon avis un indice fort qu'il a été en contact direct avec des représentants du groupe.

Traduit et adapté par Tanja Maeder

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