L’attaque terroriste du Hamas contre Israël le 7 octobre et la guerre qui a suivi dans la bande de Gaza ont eu un impact en Suisse. Le nombre d'actes antisémites a considérablement augmenté.
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Le Service fédéral de renseignement (NDB) estime actuellement que la menace terroriste en Suisse est «accrue». Depuis plusieurs années, les institutions juives sont de plus en plus menacées. La recrudescence de violence au Moyen-Orient pourrait encore menacer leur sécurité.
Les communautés juives de Suisse ont déjà dû réagir. Les mesures de sécurité dans les synagogues et les écoles juives ont été adaptées depuis le 7 octobre. Selon Jonathan Kreutner, secrétaire général de l’organisation faîtière des juives et juifs de Suisse (FSCI), les mesures de sécurité «restent élevées actuellement et pour une durée indéterminée».
Les coûts de sécurité non couverts de la communauté juive étaient déjà estimés à quatre ou cinq millions de francs par an. Une charge importante, alors que cette communauté ne compte qu'environ 18 000 personnes, comme le souligne l'association faîtière.
Pour pouvoir faire face à tous les éventuels dangers, elle doit économiser de l'argent sur la formation, l'éducation ou sur les événements. La FSCI déplore:
Depuis quatre ans, il existe un règlement fédéral qui permet au gouvernement de contribuer aux coûts de sécurité des juifs, des musulmans et d'autres «minorités ayant un besoin accru de protection». Selon le document en question, la Confédération couvrirait au maximum 50% des coûts. L'autre moitié doit être supportée par l'organisation candidate elle-même ou par le biais d'un financement de tiers, par exemple, des cantons ou des communes.
Au départ, la Confédération n'avait alloué que 500 000 francs par an aux mesures de sécurité structurelles et techniques. Cette somme est loin d'être suffisante pour soutenir toutes les demandes reçues pour des mesures de sécurité répondant aux exigences légales.
C'est pourquoi début 2023, le Conseil fédéral a augmenté le montant maximum annuel disponible à 2,5 millions de francs. Jusqu'à 1,5 million de francs peuvent désormais également être utilisés pour soutenir des «concepts de sécurité holistiques», par exemple pour la formation et les frais de personnel.
Mais même multiplié par cinq, ce fonds ne suffit pas. La date limite de dépôt des candidatures pour 2024 a expiré fin juin, soit avant l’attaque terroriste du Hamas et la menace accrue contre les institutions juives.
Selon l'Office fédéral de la police (Fedpol), 42 candidatures ont été reçues, dont 40 émanant d'organisations juives. Fedpol a expliqué dans la Schweiz am Wochenende:
L'Office fédéral de la police (Fedpol) examine des «possibilités d'augmenter les ressources disponibles», selon le département fédéral de Justice et Police (DFJP) qui le supervise. C'est également une demande de la conseillère nationale Sarah Wyss (PS/BS). Dans le cadre des discussions budgétaires en cours au sein de la Commission des finances, elle a proposé d'augmenter les fonds de 2,5 à 5 millions de francs suisses l'année prochaine.
Les cantons ont également une responsabilité. Avant même l’entrée en vigueur du règlement en novembre 2019, le Conseil fédéral avait clairement indiqué qu’il attendait des cantons qu’ils «offrent des prestations de niveau équivalent».
Depuis, les cantons ont répondu de manière très différente à cette attente. Les cantons de Suisse alémanique comme Bâle-Ville, Berne et Zurich ont rapidement créé une base juridique au niveau cantonal et s'impliquent dans les mesures de protection des communautés juive et musulmane.
La situation est différente en Suisse romande. Ni Genève, où vit la deuxième plus grande communauté juive de Suisse après Zurich, ni le canton de Vaud, avec l'importante communauté de Lausanne, n'ont opté pour une réglementation cantonale du même acabit.
On est tout de même plus de quatre ans après l'entrée en vigueur de la réglementation fédérale. Ce qui suscite de vives réactions à l'échelon supérieur: la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter (PLR), alors ministre de la Justice, avait critiqué ce «Röstigraben de la sécurité» lors de la réunion des délégués du FSCI, en mai 2022.
Le gouvernement genevois a, jusqu’à présent, rejeté les demandes de soutien des communautés juives et des écoles en raison d’un manque de base légale.
Cette semaine, la commission compétente du Grand Conseil a publié son rapport à soumettre. Elle a voté à l'unanimité en faveur de la nouvelle loi, avec une abstention. Lors d'une audition devant la commission, le 19 octobre, des représentants des communautés juives de Genève ont décrit comment les coûts de sécurité avaient «explosé» dans les jours qui ont suivi l'attaque terroriste du Hamas, comment les membres de la communauté étaient effrayés et comment les enfants restaient loin de l'école.
Le président de la Commission Cyril Mizrahi (PS) espère que les effets du conflit au Moyen-Orient, qui se font sentir jusqu'à Genève, auront un effet accéléré et que la loi sera bientôt votée. L’affaire sera à l’ordre du jour du Grand Conseil la semaine prochaine.
Un porte-parole de la Sûreté genevoise a démenti auprès de Schweiz am Wochenende que le gouvernement cantonal soit resté inactif pendant deux ans et demi. Après avoir reçu une demande de soutien cantonal à l’été 2021, le Conseil d’Etat a commencé à rédiger une proposition législative.
La police cantonale évalue en permanence la situation de menace en concertation avec les autorités fédérales et les minorités concernées et adapte ses mesures de sécurité en conséquence.
C'est ce qui ressort du canton de Vaud, où il n'existe pas encore de projet de loi. Depuis l'attaque terroriste du Hamas et la montée de l'antisémitisme, le sentiment de peur s'intensifie au sein de la communauté juive, comme le rapporte Doris Cohen-Dumani.
Selon l'ancienne conseillère municipale PLR et ancienne cheffe de la sécurité de la ville de Lausanne, la communauté juive a tenté à plusieurs reprises de convaincre les responsables du gouvernement de la nécessité d'une base juridique cantonale:
Elle espère que la récente et significative augmentation des incidents antisémites incitera le Conseil d’Etat à repenser sa politique.
Interrogé, le Service vaudois de la sécurité a écrit que le canton n'avait pas encore jugé nécessaire d'élaborer une loi. La raison? Il a déjà contribué à la sécurité de minorités particulièrement vulnérables par un soutien financier et opérationnel. Le règlement fédéral n'oblige pas les cantons à mettre à disposition leurs propres ressources financières ni à édicter des lois cantonales. Seule une minorité de cantons l'ont fait, se défend le département.
Le canton de Vaud s’inquiète néanmoins de la montée de l’antisémitisme. Un échange avec des représentants de la communauté juive est prévu dans les prochains jours pour clarifier les éventuelles nécessités d'action. Compte tenu des évolutions récentes, le canton envisage d'adopter sa propre loi cantonale. (aargauerzeitung.ch)