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Après Corcelles (NE), le plan pour les femmes en danger de mort

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Femmes tuées en Suisse: ce que ce canton romand fait concrètement

Après le triple meurtre de Corcelles, fatal à une mère et ses deux enfants, watson a répertorié les dispositifs de prévention et de répression des violences domestiques dans le canton de Neuchâtel. La victime et ses deux enfants, ainsi que le tueur présumé, bénéficiaient de l'aide sociale au moment des faits, avons-nous appris. Enquête.
23.08.2025, 07:0625.08.2025, 15:00
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Des mesures de prévention contre les violences domestiques existent dans le canton de Neuchâtel. Elles permettent théoriquement d’empêcher un drame comme celui du triple meurtre de Corcelles qui a coûté la vie à une mère et ses deux filles, tuées à coups de couteau par l'ex-mari et père, un ressortissant algérien titulaire d'un permis C. Divers organismes forment un filet social et sécuritaire auquel des femmes en danger peuvent s'adresser ou vers lequel être orientées.

La victime et ses enfants étaient à l'aide sociale

Il n'est pas rare que le danger encouru recoupe des situations matérielles précaires, comme on le verra dans les cas de divorces ou de ruptures conjugales – la femme tuée à Corcelles était légalement séparée de son ex-mari, le suspect, depuis le mois de juin.

watson a appelé cinq services du canton du Neuchâtel pouvant porter assistance aux femmes en danger et/ou dans le besoin. Sollicité vendredi 22 août à ce propos, le procureur en charge du triple meurtre de Corcelles, Jean-Paul Ros, nous a répondu que «la femme victime bénéficiait de l’aide sociale pour elle et ses deux enfants au moment des faits, ainsi que son ex-conjoint, le suspect».👇

Les guichets sociaux régionaux (GSR)

Le canton de Neuchâtel compte 7 GSR. Les GSR sont des services d’écoute, d’information et de conseil. Ce sont eux qui délivrent les prestations sociales sous conditions de revenu. Ils collaborent si besoin avec des organismes privés comme Caritas et le Centre social protestant. Les signaux forts ou signaux faibles témoignant de situations préoccupantes ou alarmantes, entre autres dans le domaine conjugal, peuvent être détectés à l’échelon des GSR, qui alerteront alors les services compétents de prise en charge.

Les prestations sociales versées par les GSR à un foyer de trois personnes, une femme et ses deux enfants séparés de l’ex-conjoint et père, par exemple, sont de 1570 francs au maximum pour un loyer en ville de Neuchâtel, à quoi s'ajoutent 1917 francs pour l’ensemble des trois personnes au titre des moyens de subsistance, explique Raffaele Fasano, chef de l’Office cantonal de l’aide sociale. Ces sommes peuvent être complétées par des prestations dites circonstancielles, relatives, entre autres, à des frais de santé, soit 100 francs par mois pour trois personnes.

En tout, 5000 dossiers d'aide sociale, recouvrant tout type de situation, sont ouverts dans le canton de Neuchâtel, indique Raffaele Fasano.

Le Service d’aide aux victimes (SAVI)

Le SAVI prend en charge des cas relevant de diverses infractions: violences domestiques, accidents de la route, erreurs médicales, etc.

Le SAVI dispose de deux leviers d’intervention, explique Steve Rufenacht, directeur de la Fondation neuchâteloise pour la coordination de l’action sociale (FAS), elle-même rattachée au Département de la cohésion sociale dirigé par la conseillère d’Etat Florence Nater.

  • Le premier de ces leviers est l’aide aux victimes dans le cadre de consultations dites ambulatoires. Le SAVI peut faire appel ici à Caritas ou au Centre social protestant.
  • Le second levier est «la mise sous protection des personnes qui en font la demande, des femmes s'il s'agit de femmes, ainsi que leur(s) enfant(s) dans certains cas», rapporte Steve Rufenacht. Le canton de Neuchâtel dispose d’un centre d’hébergement temporaire d'urgence prévu cet effet, dont l’adresse est tenue secrète.
«La loi ne nous permet pas d’obliger les femmes courant un danger à loger dans ce centre d’hébergement»
Steve Rufenacht, directeur de la FAS

La durée maximale de séjour dans ce centre d'hébergement d'urgence est de trois mois. Il est ouvert aux personnes étrangères, y compris celles en situation irrégulière en Suisse.

La Brigade de gestion des menaces et de prévention de la violence (Brigade MPV)

Comme indiqué jeudi 21 août au 19h30 de la RTS, la Brigade MPV, rattachée au Département de la sécurité dirigée par la conseillère d’Etat Céline Vara, gère actuellement «une centaine de cas de violence domestique». Elle intervient «une fois par jour».

Interrogée par la radio locale neuchâteloise RTN, Céline Vara «relève qu’avec davantage de ressources, cette brigade pourrait suivre un nombre plus élevé de situations».

«En 2024, 178 personnes ont fait l’objet d’un suivi régulier dans le canton de Neuchâtel sur un total de 587 individus signalés à la brigade. Sur ces 178 personnes suivies, 40% le sont pour des violences domestiques et sur ces 40%, les trois quarts ont agi envers leur partenaire intime.»
Céline Vara, cheffe du Département de la sécurité, sur RTN

Et la police?

Renseignement pris par watson auprès du Ministère public neuchâtelois, un officier de police judiciaire peut prononcer de son propre chef une mesure d'éloignement de dix jours contre un conjoint menaçant. S'il veut aller au-delà des dix jours, il devra en référer au Tribunal des mesures de contrainte et d'application des peines, qui pourra ordonner un éloignement de 30 jours.

Ces périodes d'éloignement ont souvent pour but de permettre à la personne menacée ou se sentant menacée de se mettre à l'abri autant que possible.

L’Office de recouvrement et d’avance des contributions d’entretien (ORACE)

L’Orace est l’office qui procède au versement des pensions alimentaires lorsque les personnes censées les verser font défaut. Son chef, Luigi Auteri, l’affirme: «Notre office rencontre assez régulièrement des situations de violences conjugales.»

«Le non-versement des pensions alimentaires est bien souvent la pointe de l’iceberg d’une situation familiale chaotique»
Luigi Auteri, chef de l'Orace

L’Orace procède en deux temps.

  • Dans un premier temps, l’office tente de récupérer les pensions impayées auprès de la personne tenue de les payer, généralement l’ex-mari. En cas de non-versement, des poursuites sont entamées conformément à la loi fédérale.
  • La loi cantonale neuchâteloise entre en force dans un second temps. Elle prévoit le versement d’une aide financière à la personne ou à la famille pour compenser le non-paiement de la pension alimentaire. Cette prestation n’est pas soumise à des conditions de revenu de la part de la personne requérante.
«L’aide est calquée sur le montant de la pension prévue par le tribunal»
Luigi Auteri, chef de l'Orace

Pour une femme sans ressources avec deux enfants, cette prestation s’élève à 500 francs pour elle et à 500 francs par enfant, soit 1500 francs au total. Cela, pour une durée maximale de 36 mois. «En aucun cas, la personne aidée n’aura à rembourser les prestations fournies par l’Orace. L’office les réclamera en revanche au mauvais payeur», ajoute le directeur de l’Orace.

L’aide financière fournie par l'Orace n’est pas exclusive d’autres prestations sociales. Cela veut dire qu’une personne dans le besoin, ici une femme et ses enfants, peut par ailleurs toucher l’aide sociale au logement et des contributions au paiement de l’assurance maladie.

L’Office de la politique familiale et de l'égalité (OPFE)

Parmi les attributions de l’OPFE figure la coordination de la lutte contre les violences domestiques. Cet office chapeaute ainsi le SAVI, le Service d’aide aux victimes. Co-chef de l’OPFE, Thomas Perret passe en revue les prestations fournies dans ce domaine par les pouvoirs publics neuchâtelois.

  • «La police mène un travail d’action directe sur le terrain. Le SAVI aide les victimes (voir plus haut). Les hôpitaux prennent en charge les personnes victimes de violence physique. Le Service pour les auteur-e-s de violence conjugale (SAVC) assure un suivi psychiatrique.»
  • «La détection des signes de violences psychiques et physique sont notamment du domaine des hôpitaux, des pharmacies, des services sociaux, ainsi que du personnel enseignant. Il s’agit aussi de détecter des comportements violents ou susceptibles de déboucher sur des violences de tout type. Il y a tout un travail de prévention fait à l’école, au moyen de jeux de rôles et de visionnage de vidéos reproduisant des stéréotypes.»

La lutte contre les féminicides et infanticides a tout d'une course contre la montre.

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