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Depardieu censuré par la RTS: la direction assume

Gérard Depardieu.
Gérard Depardieu.image: montage saïnath bovay

Depardieu censuré par la RTS: ce n'est pas la direction qui a pris la décision

La direction de la RTS n'a pas pris elle-même la décision de suspendre provisoirement la diffusion de films avec Gérard Depardieu en vedette. Invoquant la «majorité du public qui n'est pas celle des réseaux sociaux», l'entreprise défend son choix. D'autres s'en inquiètent, à l'image de la scénariste de la série à succès «Quartier des banques». Et vous, qu'en pensez-vous? Vous pouvez répondre.
03.01.2024, 18:5104.01.2024, 09:48
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La direction de la RTS – une dizaine de personnes avec à leur tête Pascal Crittin – a manifestement appris la nouvelle comme tout le monde, dans Le Matin Dimanche du 31 décembre. Ce n’est pas elle qui aurait décidé de suspendre la diffusion des films dans lesquels Gérard Depardieu, visé par deux plaintes, l'une pour viol, l’autre pour agression sexuelle, pour l'heure présumé innocent, tient la vedette.

«Mais la direction assume», assure-t-on auprès de watson. La décision a été prise au niveau de la «programmation», à un étage inférieur, comme l’a indiqué à Keystone-ATS le porte-parole de la RTS, Marco Ferrara, confirmant l’information de l’hebdomadaire dominical.

Le «Complément d’enquête» intitulé «Gérard Depardieu: la chute de l’ogre», diffusé le 7 décembre sur France 2, a peut-être signé la fin de la carrière de ce «monstre sacré» du cinéma français. On l’y entend prononcer des propos obscènes sur les femmes, y compris sur une fillette. Cela se passe lors d’un tournage, en 2018, en Corée du Nord, de ce qui devait être un documentaire – une «oeuvre de fiction», affirme aujourd’hui l’écrivain Yann Moix, le réalisateur de cet opus jamais sorti.

Un film sur un religieux à Gaza déprogrammé

La suspension, jusqu’à nouvel avis, par la RTS, de la diffusion des films avec Gérard Depardieu en tête d’affiche, n’aurait-elle pas dû recevoir l’aval de la direction? L’affaire, après tout, est des plus polémiques, avec son lot de pétitions et de tribunes, mobilisant jusqu'à la parole du président Emmanuel Macron.

«C’est un choix qui rentre dans les attributions de la programmation. Celle-ci avait agi de manière similaire lors de l'incident impliquant l'humoriste français Pierre Palmade. Dernièrement, étant donné la guerre en cours au Proche-Orient, un documentaire sur un religieux œuvrant dans la bande de Gaza a été déprogrammé. Le sujet avait été tourné avant les événements tragiques et n'avait pas sa place dans le contexte actuel. Des changements dans la programmation n’ont rien d’exceptionnel, toutes les télévisions font ça.»
Le porte-parole de la RTS, Marco Ferrara, à watson

A la RTS, les mots de Gérard Depardieu, dans le «Complément d'enquête», sexualisant une petite fille faisant du cheval sont semble-t-il à l’origine de la sanction frappant les films avec l’acteur français dans un rôle principal. «C’était insupportable», réagit-on.

«Pauvre RTS qui crie avec les loups!»

La décision de l’audiovisuel public romand passe toutefois mal auprès d’un nombre indéfini de téléspectateurs, qui crient à la «censure» ou encore au «wokisme». Un sondage non représentatif réalisé par 24 Heures indique que 78% des internautes ayant répondu n’approuvent pas la décision de la RTS. Sur Facebook, l’ancien parlementaire cantonal PLR genevois Jean Romain écrit: «Pauvre RTS qui crie avec les loups!»

La RTS est-elle sûre de son coup?

«La majorité du public ne réagit pas à chaud sur les réseaux sociaux et se limite à zapper si un contenu n’est pas de son appétence lorsqu'elle regarde la télévision. Or nous devons veiller à anticiper au mieux l'appétence du public majoritaire. Ce choix est temporaire et nous le réévaluerons en fonction de l’évolution de la situation concernant Gérard Depardieu.»
Un collaborateur de la RTS

D’autres pensent au contraire que la RTS s’est encore plus coupée de son public, alors que plane sur elle une initiative cornaquée par l'UDC, qui entend ramener la redevance de 335 à 200 francs par ménage et par an.

La RTS a-t-elle raison de suspendre temporairement la diffusion des films dans lesquels Gérard Depardieu tient la vedette?

Faut-il voir dans la décision de la RTS autre chose qu’une morale de bon aloi? S’inscrit-elle dans un combat plus idéologique, antisexiste et féministe, entamé lorsque des accusations de harcèlement sexuel et moral furent lancées contre des collaborateurs de l’institution, fin 2020? La RTS craint-elle un retentissant bad buzz, émanant d’une partie de ses troupes, avec relais auprès de groupes militants, au cas où elle diffuserait un film avec Gérard Depardieu tenant la vedette?

La scénariste de «Quartier des banques» s'exprime

Jugeant à son tour les propos de l’acteur français «obscènes et dégradants pour les femmes», Stéphane Mitchell, la scénariste de «Quartier des banques», série à succès de la RTS, ne s’en dit pas moins «mal à l’aise face à la censure».

«Elle frappe aujourd’hui les films avec Gérard Depardieu, mais qui sait si elle ne s’étendra pas à d’autres acteurs ou metteurs en scène en raison de leurs comportements réels ou supposés, Johnny Depp, par exemple, et pourquoi pas Godard ou Truffaut?»
Depp V. Heard
Video: watson
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