5 mots pour métamorphoser vos séances
Voici bientôt trois ans que l’équipe QoQa s’est lancée dans un mode de gouvernance atypique, dont le nom sonne comme une nouvelle technique de guérison des chakras par la pensée positive: l’holacratie.
Souvent, on me parle de ce concept comme d’un carnaval anarchique dans lequel il faut sans cesse voter pour pouvoir décider… eh bien détrompez-vous.
Franc-Parler
Chaque dimanche matin, watson invite des personnalités romandes à commenter l'actu ou, au contraire, à mettre en lumière un thème qui n'y est pas assez représenté. Au casting: Nicolas Feuz (écrivain), Anne Challandes (Union Suisse des Paysans), Roger Nordmann (conseiller stratégique, ex-PS), Damien Cottier (PLR), Céline Weber (Vert'Libéraux), Karin Perraudin (Groupe Mutuel, ex-PDC), Samuel Bendahan (PS), Claude Ansermoz (ex-rédacteur en chef de 24 Heures), Ivan Slatkine (président de la FER) et la loutre de QoQa.
Pas de hiérarchie verticale classique, mais pas non plus d’horizontalité absolue: c’est une gouvernance distribuée, où les décisions sont prises au bon niveau, par les bonnes personnes. L’entreprise devient ainsi un organisme vivant, fluide, mais organisé, où chacun est responsable de ses rôles. Non pas vis-à-vis d’un supérieur hiérarchique, mais devant le collectif, pour le bon fonctionnement de l’ensemble.
L’holacratie est un système de gouvernance très – et je pèse mes mots – structuré, où les rôles et responsabilités de chacun sont clairs, partagés, et peuvent encore évoluer selon les besoins réels de l’organisation.
On ne se cache plus: on agit, on propose, on ajuste. Le dernier bénéfice est que, par conséquent, chaque collaborateur se retrouve aussi à modeler son environnement pour lui permettre de travailler dans les meilleures conditions. Les conflits existent toujours, les désaccords aussi. Mais ce système a le mérite de fournir des outils concrets pour les traiter autrement.
La solution avant le problème
Le principe de résolution des problèmes est simple: tout d’abord, le changement doit partir de la personne qui ressent une «tension» (terme consacré en holacratie pour désigner tout type de friction). Pourquoi? Parce que c’est elle qui est la mieux placée pour résoudre ce qui l’empêche, ou ce qui doit être amélioré selon elle, pour accomplir ses tâches dans les meilleures conditions.
La manière dont tout cela s’articule au quotidien est d’une simplicité enfantine, et pourrait probablement être utilisé demain dans votre entreprise ou institution: lorsqu’une personne soulève un point en séance, le facilitateur ou la facilitatrice (rôle clé garant de la bonne tenue des échanges) pose systématiquement cette question: «De quoi as-tu besoin?»
Ces cinq petits mots obligent à dépasser la simple plainte. Ils incitent à formuler une demande concrète, à chercher une solution, et souvent même à s’y impliquer. La personne passe alors du statut de spectateur critique à celui d’acteur engagé. On passe de la plainte à la proposition.
Exemple concret: en réunion, quelqu’un lâche:
Plutôt que de lancer un débat sans fin sur la surcharge d’emails, le facilitateur pose la question magique: «De quoi as-tu besoin?» La réponse tombe:
Résultat: en deux minutes, on est passés du soupir collectif à une solution concrète et testable.
Le résultat le plus visible? Des séances plus efficaces. Le facilitateur veille à traiter un sujet à la fois, sans digression. Finies les réunions prises en otage par un collègue qui relance un débat annexe ou ressort une question insoluble dans l’heure du meeting, du type: «Avant de parler de cette charte, faudrait d’abord revoir toute notre politique salariale, non?»
C’est aussi une nouvelle posture pour les leaders. Le rôle de cadrage reste essentiel (surtout dans les périodes de tension ou d’incertitude) pour prioriser, trancher, et répartir les ressources au sein de l’équipe. Mais c’est aussi leur rôle d’incarner et diffuser cette capacité de transformer, jour après jour, l’entreprise.
Evidemment, ce n’est pas une formule miracle. L’holacratie seule ne va rien changer si les mentalités n’évoluent pas. Mais elle a le mérite d’offrir des pratiques simples à adopter, sans bouleverser le monde du travail.
Comme un marteau, finalement… avec cet outil, vous pouvez vous faire très mal au doigt ou construire des maisons; ce qui compte, c’est votre utilisation.
Alors, lors de votre prochaine séance ou problème avec un collègue, tentez le «De quoi as-tu besoin?» et écoutez ensuite ce qui se passe… qui sait, vous pourriez bien débloquer un problème qui traîne depuis des semaines.
