Better Man est une grande fresque cinématographique. Ce film, réalisé par Michael Gracey (The Greatest Showman), retrace les 30 premières années de la vie de Robbie Williams, originaire de Stoke-on-Trent, en Angleterre.
Mais il s'agit d'un biopic hors du commun: l’acteur principal est un chimpanzé généré par ordinateur, interprété par le comédien britannique Jonno Davies.
On suit ce singe audacieux alors qu’il devient célèbre avec le groupe pop Take That, avant d’être expulsé du groupe à cause de ses problèmes de discipline et de son addiction croissante à l’alcool et aux drogues. Il tente ensuite une carrière solo, qu’il finit par réussir, mais à un prix élevé.
Heureusement, l’histoire se termine bien: Robbie Williams est toujours une superstar aujourd’hui, mais il est aussi – et surtout – un homme heureux. Marié à l’actrice Ayda Field, il est père de quatre enfants âgés de 4 à 12 ans. Le chanteur de 50 ans revient sur son «lui» d'avant et d'aujourd'hui.
watson: Robbie, Better Man raconte votre vie et votre carrière de manière crue, souvent douloureuse. Comment avez-vous vécu le visionnage de ce film?
Robbie Williams: Je l’ai vu une douzaine de fois maintenant, et je ne m'en suis toujours pas lassé. Ce film est une boîte à surprises sur ma vie. Il y a tellement de choses à découvrir, que je redécouvre moi-même. J’éprouve une immense joie à le regarder, et je m’efforce d’en absorber chaque goutte.
Etait-ce difficile de revenir sur les moments les plus sombres de votre vie?
Heureusement, c’est l’acteur Jonno Davies qui s’en est chargé, et il a fait un travail fantastique. Mon rôle s’est limité à enregistrer la bande-son et à discuter intensément et longuement avec Michael Gracey de ma vie. Nous avons parlé pendant près de douze heures, sans filtre.
Si, lors d’un dîner, mes remarques n’évoquent pas quelques réactions choquées ou dégoûtées, ce n'est pas une soirée réussie pour moi (rires).
Tout au long du film, on vous voit lutter contre une profonde haine de vous-même. Vous semblez avoir réussi à transformer ce sentiment destructeur en acceptation, voire en amour-propre. Better Man représente-t-il en quelque sorte l'épopée de Robbie Williams?
C’est un aspect, certes, mais ce n’est pas comme si j’avais éradiqué cette haine de moi-même. Je ne la laisse plus m’atteindre aussi souvent. ni de manière aussi proche.
Elle ne joue plus un rôle central. J’ai réussi à faire taire cette voix intérieure qui me répétait sans cesse que j’étais une personne horrible (rires).
Vous étiez peut-être parfois difficile avec votre entourage, mais sûrement pas quelqu'un d'horrible.
Non, mais on ne peut pas lutter contre ses démons intérieurs.
Le film montre votre ascension vers la célébrité sous un jour peu glamour. Etiez-vous surpris, à l’époque, de constater à quel point la célébrité n’était pas aussi extraordinaire qu’on le pense?
Oh mon Dieu, oui (rires). C’était un choc, comme acheter un énorme gâteau à la crème, avec une garniture extra-épaisse, en s’en réjouissant à l’avance. Puis, à la première bouchée, se rendre compte que ce n’est qu’une masse collante, insipide et ultra-sucrée. J’étais presque en colère que la célébrité ne soit pas aussi amusante que je l’avais imaginée.
Les drogues sont devenues un problème croissant pour vous. Rarement une addiction à la cocaïne a-t-elle été montrée de manière aussi crue qu’elle l’est dans Better Man.
Je n’ai pas touché une goutte d’alcool depuis 24 ans! Mais oui, les drogues sont diaboliques. Je le dis sans ironie. Ce qu’on trouve dans la rue est vraiment, vraiment horrible. Je suis content que le film montre de manière réaliste les dégâts que les drogues peuvent causer.
Dans le film, vous êtes incarné par un singe. Cela peut sembler étrange, mais cela devient rapidement naturel.
Je suis incroyablement fier de ce que Michael Gracey a créé. Il a dû surmonter de nombreuses résistances, surtout du côté des investisseurs. Mais sans le singe, ce film n’aurait pas existé.
Comment vous est venue l’idée de mettre en scène un singe?
Michael et moi sommes des excentriques. L’idée du singe est folle, mais je l’ai trouvée géniale dès le départ. Nous voulions quelque chose d’original.
Vos yeux ont été scannés en haute résolution. Le singe nous regarde tout au long du film avec vos yeux.
C'est triste, mais vrai: nous, les humains, avons plus d'empathie pour les animaux que pour les autres. Lorsque nous voyons un animal souffrir, nous ressentons de la compassion et avons du mal à supporter les images. Il y a toute une série de scènes dans Better Man qui sont difficiles à regarder. Et le singe, Jonno, il n'est pas seulement magique, il a aussi un plus beau cul que je n'en ai jamais eu (rires).
Que représente concrètement ce film pour vous?
Better Man est un projet gigantesque. Pour moi et pour l'avenir de ma carrière, ce film est très important. Je suis un professionnel qui cherche à attirer l'attention et une personne qui, même à cinquante ans, reste très ambitieuse.
Michael dit que c’est un miracle que vous soyez encore en vie. Comment percevez-vous votre vie aujourd’hui?
Emerveillé, c'est le mot. Reconnaissant. Je ne suis plus le même Robbie qu'avant. Les gens peuvent changer, et j'ai changé. Aujourd'hui, je vis dans la sécurité, la sûreté et la bonheur. C'est de là que je tire force et joie.
Un autre thème central est celui de votre dépression et de votre anxiété.
La plupart des gens ont compris à quel point c'était important. Quand j'avais 20 ou 25 ans, on me disait: «Mais pourquoi donc es-tu triste?». Nous vivons une pandémie globale en ce qui concerne les maladies psychiques.
Aujourd'hui, nous comprenons qu'une personne n'est pas inférieure si elle a des problèmes d'alcool ou de drogue, si elle souffre de TDAH ou si elle ne sait pas lire ou écrire correctement. C'est là que je dois vraiment faire l'éloge d'Internet. La Toile nous aide énormément à trouver des mots pour les problèmes qui nous affligent, nous les humains.
Better Man se termine en 2005. Pourquoi avez-vous laissé de côté la période plus heureuse de votre vie, qui a commencé après?
Parce que les conflits et les traumatismes rapportent plus de spectateurs. Personne ne veut voir un film dans lequel il ne se passe pas grand-chose, si ce n'est un être équilibré faisant des choses équilibrées.
Mais aujourd'hui, je suis heureux. J'éprouve de la joie, j'aime et je suis aimé.
Craignez-vous que vos problèmes mentaux reviennent?
Oui, je crains qu'une tristesse aussi profonde que celle que j'ai connue à l'époque ne me frappe à nouveau. Mais je suis aussi confiant, car aujourd'hui, elle tomberait sur quelqu'un qui a fait un travail sur lui-même, qui se connaît mieux et qui est entouré de personnes en qui il a confiance.
Nicole Appleton, votre ex-fiancée, et Gary Barlow, votre coéquipier de Take That, ont-ils déjà vu le film?
Quand Gary a lu le scénario, il m'a appelé et m'a dit «Rob, mon personnage est plus nul que Dark Vador dans "Star Wars” pendant toute la première moitié du film» (rires). J'étais un peu effrayé: je ne voulais pas contrarier Gary, mais je devais raconter mon histoire.
Nicole, de son côté, est un ange, à l'époque comme aujourd'hui. Elle m'a donné la permission de raconter cette histoire. Nous avons une bonne relation. Nous avons vu le film ensemble, elle me tenait la main et je tenais la sienne.
Vous avez maintenant cinquante ans. Aimez-vous vieillir?
Oui, absolument. Pour moi, vieillir signifie être plus heureux. Aujourd'hui, j'aime vraiment ma vie, d'une manière que je n'aurais jamais crue possible.
Et quand vous aurez 80 ans, qu'est-ce que vous chanterez?
«Old Before I Die». Mais je pourrais déjà chanter cette chanson aujourd'hui (rires). (aargauerzeitung.ch)
(Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder)