D'abord l'accusation de génocide israélien à Gaza, ensuite la comparaison entre Benjamin Netanyahou et Adolf Hitler, et maintenant la menace de livrer des armes au Hamas: le président turc Recep Tayyip Erdogan s'en prend de plus en plus violemment à Israël. La Turquie ne fait toutefois pas grand-chose contre L'Etat hébreu, car cela provoquerait des tensions avec l'Occident. Erdogan agit pour des motifs de politique intérieure. Les experts considèrent sa menace comme un acte de désespoir.
La récente attaque d'Erdogan contre Israël a été prononcée à Rize, sur la mer Noire, la ville natale de son père. Le président a dénoncé l'offensive israélienne à Gaza et l'occupation de la bande de Gaza, menaçant de conséquences. «Comme nous sommes intervenus au Karabakh et en Libye, nous pourrions faire quelque chose de similaire là-bas», a-t-il affirmé à propos de Gaza.
En 2020, la Turquie avait accordé un avantage décisif à son partenaire azerbaïdjanais dans le conflit autour de l'enclave du Haut-Karabakh en fournissant des drones de combat. La même année, des drones turcs avaient sauvé le gouvernement de Tripoli en Libye d'une attaque du maréchal Khalifa Haftar.
Le discours d'Erdogan à Rize suggère que la Turquie pourrait également fournir des drones au Hamas pour soutenir ses efforts dans le conflit contre Israël. Erdogan a justifié cette possibilité par des plans d'expansion présumés d'Israël:
Le président avait déjà, dans des déclarations antérieures sur Israël, souligné la puissance militaire de la Turquie. En décembre, il avait affirmé que si Israël devait faire face à une «véritable armée», les conséquences seraient dévastatrices pour l'Etat hébreu.
Le ministre israélien des Affaires étrangères, Israel Katz, a comparé les déclarations d'Erdogan à des menaces de Saddam Hussein contre Israël. Katz a ajouté qu'Erdogan ferait bien de se souvenir de ce qu'il est advenu de Saddam, en faisant référence à la mort de l'ancien dictateur irakien.
Jusqu'à présent, la Turquie s'est contentée de menaces et d'avertissements. Si ce pays membre de l'Otan devait désormais apporter un soutien militaire au Hamas, cela mettrait un coup d'arrêt immédiat aux efforts d'Erdogan pour redresser l'économie turque en se rapprochant de l'Europe et des Etats-Unis.
Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre, Erdogan a changé plusieurs fois de position. Sous l'influence de l'opinion publique anti-israélienne, il critique désormais de plus en plus vivement l'Etat hébreu et a suspendu les échanges commerciaux avec Israël.
Erdogan est poussé dans cette direction par les sondages et par le Nouveau parti de la prospérité (YRP), qui accuse le gouvernement d'Ankara de ne pas affronter Israël avec suffisamment de fermeté. Cette stratégie a porté ses fruits pour le YRP aux urnes. Lors des élections législatives de l'année dernière, avant le début de la guerre à Gaza, le parti avait obtenu 2,9% des voix. Lors des élections municipales de ce printemps, après six mois de conflit à Gaza, il a augmenté sa part de voix à 6,2%.
Le parti d'Erdogan se situe dans les derniers sondages à 31%, soit quatre points de pourcentage en dessous de son résultat lors des élections municipales de mars et cinq points en dessous du résultat des élections législatives de l'année dernière. Le président a donc un besoin urgent de sujets qui lui permettraient de marquer des points. Selon les experts, la récente critique d'Israël montre qu'Erdogan n'a pas encore trouvé le sujet. Les menaces semblent donc plutôt être un signe de désespoir de la part de l'AKP.
Traduit et adapté par Noëline Flippe