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Ron DeSantis reboote sa campagne présidentielle

N'enterrez pas Ron DeSantis avant de l'avoir tué: sa nouvelle équipe nous promet un come-back tonitruant du républicain dans la course pour la Maison-Blanche.
N'enterrez pas Ron DeSantis avant de l'avoir tué: sa nouvelle équipe nous promet un come-back tonitruant du républicain dans la course pour la Maison-Blanche. montage: watson

«Trump lui botte le cul» et Ron DeSantis change de stratégie

Face à des sondages et des finances de campagne qui flirtent chaque jour davantage avec le désastre, le rival républicain de Donald Trump à la Maison-Blanche se lance dans un vaste «reboot» de sa campagne et un remaniement complet de son équipe. Le troisième en un mois, c'est dire. En quoi celui-ci pourrait-il s'avérer décisif?
09.08.2023, 18:5710.08.2023, 06:09
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On s'y attendait, il l'a fait. Mardi, Ron DeSantis annonçait le limogeage en bonne et due forme de sa directrice de campagne, Generra Peck. La malheureuse se trouvait sur la sellette depuis quelques semaines déjà, après avoir accumulé les boulettes. Faut dire que promouvoir des vidéos au ton ouvertement homophobe ou truffées de références au nazisme, on a connu plus efficace pour raviver l'intérêt des électeurs.

Un Trump en moins fun

L'annonce intervient au milieu d'un vaste remaniement de l'équipe de campagne de l'homme qui reste encore, pour l'instant, le principal espoir du parti républicain pour vaincre Trump pour 2024. Pour l'instant. Peut-être plus pour longtemps. Chaque semaine, l'ancien président des Etats-Unis conforte son avance dans les sondages. Pas plus tard que la semaine dernière, le New York Times dévoilait une enquête d’opinion pour le moins dévastatrice.

Parmi les républicains qui se décrivent comme «très conservateurs», 65% soutiennent Trump, contre 15% pour DeSantis
Un sondage du New York Times/Siena, réalisé du 23 au 27 juillet 2023.

Pis: 54% affirment que le 45e président, sous le coup de trois inculpations pénales, est «fun». 16% en déclarent autant pour Ron DeSantis. Ce n'est pas demain que le candidat républicain, moqué pour son «manque de magnétisme personnel» et de capital-sympathie, sera choisi par les électeurs républicains pour se marrer autour d'une bonne bière – ou d'un pudding au chocolat.

Certes, tel n'est pas vraiment l'objectif du gouverneur de Floride. Ron DeSantis a basé sa candidature sur la promesse qu'il est un républicain pur souche, plus éligible et plus sérieux que son concurrent. Plus dur, aussi. En appliquant des politiques de plus en plus extrémistes dans son Etat, le défenseur autoproclamé d'un «monde débarrassé du wokisme» entendait dépasser son rival par la droite.

«Je l'ai vu commettre une faute directe après l'autre. Cela me suggère qu'il n'a pas l'instinct politique pour jouer à ce niveau»
Whit Ayres, consultant politique républicain et ex-collaborateur de DeSantis.

Manque de bol, ça n'a pas marché.

La guerre contre le progressisme est loin d'être la propriété absolue des Américains. «A la fin de la journée, il faut des résultats. Donald Trump est mon homme. Il l'a prouvé au niveau national», clame David Green, 69 ans, du New Hampshire, au New York Times.

«Ce n'est pas étonnant que Trump lui botte le cul»
Nathan Click, porte-parole du gouverneur de Californie, le week-end dernier.

Entre les projets de loi drastiques, la lutte contre Disney, les polémiques sur l'esclavage «qui a de bons côtés» ou sur sa promesse de «commencer à trancher des gorges» (les employés fédéraux, précisons), pas étonnant non plus que d'autres donateurs de droite, plus modérés, commencent à flipper. C'est le cas de Robert Bigelow, principal donateur individuel de Ron DeSantis, qui vient de ranger son chéquier.

«Il a besoin de changer pour atteindre les modérés. S'il ne le fait pas, il va perdre. L'extrémisme ne vous fera pas élire»
Robert Bigelow, dans une dans une interview à Reuters.

Bref, Ron DeSantis est coincé. Quelque part entre l'envie de rallier la plus grande faction du parti républicain, qui soutient encore Trump de manière indéfectible, et un plus petit groupe de dissidents, à la quête d’un nouveau leader.

«J'ai l'impression que les républicains veulent une alternative à Trump et que DeSantis pouvait, en quelque sorte, être cette alternative. Puis ils ont jugé sommairement que, non, ce n'était pas lui»
Rick Tyler, stratège républicain, au New York Times.

Heureusement, Ron DeSantis a pigé que sa stratégie de campagne n'avait pas tout à fait fonctionné jusqu'à présent. Il est prêt à changer. Pas tant sur son positionnement idéologique. Les esclaves, les droits des femmes ou les fonctionnaires, non. C'est plutôt du côté de son personnel que Ron DeSantis est allé chercher la source de ses problèmes.

Un tournus permanent

Justement, les finances du candidat sont presque aussi désolantes que les sondages d'opinion. Avant d'être graciée par son patron, l'ancienne directrice Generra Peck a reconnu, lors d'une réunion de crise le mois dernier, que la campagne avait dépensé trop d'argent pour intensifier ses opérations. Elle doit désormais se tourner vers une forme plus légère.

Près de 30% du personnel de campagne a ainsi giclé dès la mi-juillet. Rien de nouveau sous le soleil de Floride: depuis qu'il a été élu au Congrès en 2012, l'inconstance est une constante dans les équipes de Ron DeSantis.

Un cure d'amaigrissement financière qui n'a pas empêché le républicain, le matin-même de l'annonce, de sauter dans un jet privé pour aller collecter des fonds dans le Tennessee. Ron et sa femme Casey n'ont pas posé le pied sur un vol commercial depuis des années et ne comptent pas commencer de sitôt. Même si cette habitude pèse lourdement dans le budget de campagne.

Ron DeSantis et sa femme sont prêts à accomplir beaucoup pour rebooster la campagne. Sauf se passer de jet.
Casey et Ron DeSantis sont prêts à accomplir beaucoup pour rebooster la campagne. Sauf se passer de jet.Image: Corbis News

Le sauveur potentiel

Pour remplacer sa directrice, le gouverneur n'est pas allé chercher bien loin. Habitué à s'entourer de collaborateurs loyaux, il vient d'élire James Uthmeier, 35 ans, son actuel chef de cabinet et l'un de ses principaux conseillers politiques au gouvernement de Floride, pour occuper la place vacante.

A 35 ans, James Uthmeier n'a jamais dirigé de campagne, mais il bénéficie de la confiance absolue de Ron DeSantis.
A 35 ans, James Uthmeier n'a jamais dirigé de campagne, mais il bénéficie de la confiance absolue de Ron DeSantis.

S'il n'a jamais géré de campagne électorale de sa vie, ce conseiller parmi les plus fidèles, fiables et farouchement conservateurs de Ron DeSantis bénéficie, en outre, de l'aval de Madame DeSantis. Un sérieux atout. Casey conserve jalousement son rôle d'yeux et d'oreilles du gouverneur.

Inexpérimenté, peut-être, mais James Uthmeier a la niaque. Au fil de ses années de serveur, l'assistant s'est taillé une réputation de conservateur enragé dans les cercles politiques de Floride. Il a joué un rôle-clé dans presque toutes les politiques conservatrices et controversées qui ont construit la marque DeSantis - de la gestion de la pandémie de Covid aux politiques anti-LGBT et antiavortement. Un choix de direction surprenant, donc, alors que plusieurs donateurs enjoignent le candidat à modérer ses positions.

«Les gens ont écrit la nécrologie du gouverneur DeSantis à plusieurs reprises. Il a prouvé qu'il savait comment gagner. Il bat des records de collecte de fonds. Get ready!»
La promesse de James Uthmeier, le 8 août, à The Messenger.

Le trentenaire évite soigneusement de qualifier sa promotion dans la campagne de «reboot» (redémarrage, en anglais). Un mot méprisé dans une campagne politique, où les conseillers préfèrent parler de «reloading» (rechargement).

La nouvelle stratégie

Qui dit nouveau staff, dit aussi nouvelle stratégie. Plus question de jeter des millions de dollars par la fenêtre. Ron DeSantis prévoit des événements de campagne plus modestes et moins coûteux dans les premiers Etats de la primaire républicaine: Iowa, New Hampshire et Caroline du Sud.

Autre revirement surprenant de la part du candidat en déroute: son retour dans les médias grand public. Il y a deux jours, Ron DeSantis accordait sa première interview à NBC News, quelques mois seulement après qu'un porte-parole ait affirmé qu'il boycottait le réseau. Un entretien qui a fait grand bruit. Après trois ans à tourner autour du pot, c'est la première fois que l'ex-protégé de Trump reconnait sa défaite lors de l'élection de 2020.

«Bien sûr, il a perdu. Joe Biden est le président. Je pense que les gens dans les médias et ailleurs veulent agir comme si c'était une élection parfaite»
Ron DeSantis sur NBC News, le 7 août.

Pas sûr que cela suffise à renverser la tendance, même s'il affirme qu'il préfère «de loin être sous-estimé». Jamais un candidat accusant 30 points de retard dans les sondages n'a réussi à remporter une primaire. Face à Donald Trump, Ron DeSantis a encore tout à prouver.

Des chèvres envahissent une rue aux Etats-Unis
Video: watson
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