L'armée ukrainienne serait à nouveau parvenue à prendre de vitesse les troupes ennemies à Koursk. Ce week-end, elle a lancé une offensive dans cette région de l'ouest de la Russie. De violents combats auraient eu lieu jusque tard dans la soirée dimanche. Dans son rapport du soir, l'état-major à Kiev a fait état d'un total de 42 affrontements armés.
Mais l'armée russe tente probablement elle aussi une avancée dans la région. C'est du moins ce qu'annonce sur la plateforme X un soldat ukrainien qui serait stationné à Koursk. Sous le pseudonyme «expert de guerre», il évoque la «plus grande offensive russe» depuis l'invasion ukrainienne de la zone début août. Une bonne quarantaine de véhicules blindés seraient impliqués. Des informations qu'il reste cependant impossible de vérifier de manière indépendante.
Une épreuve de force se prépare manifestement ces jours-ci à Koursk. Car la temporalité de ces avancées réciproques ne doit rien au hasard: dans deux semaines, le 20 janvier, le prochain président américain, Donald Trump, prêtera serment. A des milliers de kilomètres de Washington, la Russie tout autant que l'Ukraine tentent apparemment de se préparer à cette passation de pouvoir. Les deux belligérants veulent des réalisations tangibles sur le champ de bataille.
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Dans l'opinion publique, le mot «paix» circule lorsque l'on évoque le conflit qui sévit depuis bientôt trois ans. Cela est avant tout lié à la promesse mirobolante du futur dirigeant des Etats-Unis de vouloir résoudre la situation dans les 24 heures après son entrée en fonction. Quand bien même aucun plan détaillé n'a été présenté pour l'heure, Moscou et Kiev cherchent néanmoins à renforcer leur position respective en vue d'éventuelles négociations.
Fort de ces récents succès, l'état-major ukrainien triomphait déjà en sourdine: «Les Russes dans la région de Koursk sont très inquiets, car ils ont été attaqués de plusieurs directions et pris par surprise», indiquait un point de situation. Les médias russes se sont en revanche contentés d'indiquer dans la soirée des attaques de drones repoussées près de Koursk. Les deux parties n'ont donné aucune information sur les pertes, les succès ou les changements de position sur le front.
Selon des blogueurs militaires russes, les unités ukrainiennes auraient en revanche progressé à l'est et au nord-est de la ville de Soudja, sur une route principale en direction de la capitale régionale, Koursk. Les Ukrainiens s'étaient déjà emparés de Soudja lors de l'offensive du mois d'août. Les coulisses de cette nouvelle offensive ukrainienne font cependant débat au sein de la communauté d'observateurs: certains soupçonnent une manœuvre de diversion pour préparer des avancées peut-être décisives. Les rumeurs d'une offensive ukrainienne circulent depuis plusieurs jours déjà parmi les journalistes militaires russes.
Il demeure possible cependant que les Ukrainiens aient tout simplement voulu devancer leurs adversaires. On entend régulièrement dire que Vladimir Poutine a donné l'ordre de reconquérir Koursk avant le 20 janvier. Jusqu'à présent, les efforts russes pour y parvenir ont toutefois été lents, malgré le soutien de la Corée du Nord. Selon Volodymyr Zelensky, un bataillon de Nord-Coréens, soit environ 500 soldats, serait déjà tombé. Le chef de l'armée ukrainienne Olexander Syrsky parle, lui, d'environ 34 000 Russes morts à Koursk depuis le mois d'août.
Selon le think tank américain Institute for the Study of War (ISW), l'offensive russe pour la reconquête de la zone s'est poursuivie ce week-end. Les unités auraient notamment progressé au sud-est de Soudja. Mais dans son dernier rapport, l'ISW indique que des drones ukrainiens continuent de frapper des formations mécanisées de l'armée russe.
La guerre électronique que livre actuellement Kiev associée à l'opération terrestre en cours pose des problèmes considérables aux Russes à Koursk. Les Ukrainiens brouillent les signaux des drones ennemis afin de les empêcher d'attaquer leurs propres unités en progression. Selon des blogueurs militaires russes, seuls les drones russes équipés de câbles à fibres optiques pourraient ainsi voler dans le secteur.
L'analyste Emil Kastehelmi reste sceptique face aux avancées ukrainiennes. «Il est peu probable que ces mesures conduisent à des résultats significatifs», écrit le Finlandais sur X.
Ukrainians have continued their attacks in Kursk. Today, an armored column advanced towards Bolshoye Soldatskoye, and reportedly fighting is ongoing in other villages too.
— Emil Kastehelmi (@emilkastehelmi) January 5, 2025
I find it unlikely that these actions could produce very significant results. 1/ pic.twitter.com/UPo6R6Jjwt
Selon lui, les Ukrainiens se battent contre plus fort qu'eux. Des succès tactiques ou la conquête de certains villages restent certes possibles grâce à un effet de surprise, «mais dans l'ensemble, la situation générale ne devrait pas évoluer».
Même si les Ukrainiens avançaient de dix kilomètres, écrit Kastehelmi, les combats resteraient à peu près dans la même zone que celle où ils ont lieu depuis des mois déjà.
Le spécialiste voit à la fois des avantages et des inconvénients à la stratégie des Ukrainiens à Koursk.
La situation près de Pokrovsk à Donetsk est particulièrement périlleuse. Selon les informations du ministère de la Défense russe, les soldats du Kremlin auraient conquis Kourakhove lundi. Une information démentie par Kiev. Les combats autour de cette ville ont duré environ deux mois. L'armée ukrainienne a ainsi tenu la localité plus longtemps que les experts ne le pensaient.
Selon Kastehelmi, ceux-ci ont toutefois réussi à s'implanter à Koursk au cours des dernières semaines. La poursuite des combats sur le territoire russe deviendrait ainsi de plus en plus problématique pour la politique de Poutine. La Russie aurait en outre déployé des troupes bien formées et bien équipées dans la région, mais celles-ci n'auraient engrangé que peu de résultats lors de la reconquête.
Le secrétaire d'Etat américain sortant Antony Blinken perçoit lui aussi la dimension politique de l'offensive de Koursk - sans doute dans l'optique là encore de l'arrivée de Trump à la Maison-Blanche. Il juge la situation des forces armées ukrainiennes dans la région d'une importance cruciale pour les négociations à venir.
L'administration encore dirigée quelques semaines par Joe Biden veut s'assurer que Kiev aura «les meilleures cartes possibles» en cas de pourparlers, a ajouté le haut fonctionnaire.
Il a souligné que, dans tous les cas, l'Ukraine avait besoin de «garanties de sécurité adéquates» contre le président russe Vladimir Poutine. Les «ambitions impériales» de ce dernier demeureront, a assuré le secrétaire d'Etat. Poutine essaiera forcément de «se reposer, de se réarmer et il finira par attaquer à nouveau». Il faut donc une «dissuasion adéquate pour qu'il ne le fasse pas», a exigé Anthony Blinken.
Zelensky abonde en ce sens: Trump doit convaincre Poutine de conclure un cessez-le-feu, a déclaré le président ukrainien dans un podcast animé par l'Américain Lex Fridman. Mais – à nouveau – pas sans de solides garanties de sécurité.
(Adaptation française: Valentine Zenker)