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Voici ce qui attend l'Iran si Israël fait tomber le régime

Selon des spécialiste, cette «grande erreur» d'Israël pourrait semer le chaos
Sur fond de crainte du programme nucléaire iranien, Israël semble déterminé à mettre fin au règne clérical et dictatorial d'Ali Khamenei en Iran.Image: Imago / Keystone

Quel avenir en Iran si le régime chute? «Il y a un scénario inquiétant»

L'objectif d'Israël se rapprochant de plus en plus d'une volonté d'annihilation du pouvoir clérical et dictatorial en Iran, politiciens et spécialistes se penchent sur les conséquences possiblement désastreuses qu'aurait la chute du régime d'Ali Khamenei au Proche-Orient.
20.06.2025, 16:5820.06.2025, 16:58
Stuart Williams / Paris / AFP
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Israël semble déterminé à éliminer le guide suprême iranien Ali Khamenei et saper le système religieux au pouvoir en Iran depuis 1979, mais le pari apparaît risqué, sans aucune certitude sur la suite.

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Les prémices d'un démantèlement total?

Ali Khamenei «ne peut être autorisé à continuer d'exister», a lancé jeudi le ministre de la Défense israélien Israël Katz, laissant peu de doutes sur les intentions d'Israël.

En frappant d'autres cibles que des sites nucléaires ou de missiles, comme lundi la télévision d'Etat iranienne, Israël semble déterminé à en finir avec le système au pouvoir, même si ce n'est pas officiellement le but de la guerre.

Nicole Grajewski, de Carnegie Endowment, estime cependant que:

«Les frappes d'Israël semblent plus avoir pour objectif le changement de régime que la non-prolifération»

Il poursuit:

«Bien sûr, Israël cible des missiles balistiques et des sites militaires, mais ils frappent aussi des dirigeants et des symboles du régime.»
Nicole Grajewski

Les souvenirs de l'Irak et de la Libye planent

Coutumier des exécutions ciblées, Israël n'hésite plus depuis le massacre du 7 octobre 2023 perpétré par le Hamas à éliminer des dirigeants réputés intouchables, comme le chef du Hezbollah libanais pro-iranien Hassan Nasrallah à Beyrouth en octobre.

Mais l'élimination du guide suprême iranien, au pouvoir depuis trois décennies, serait un saut dans l'inconnu et pourrait ouvrir une ère encore plus dangereuse et chaotique.

Les dirigeants occidentaux sont hantés par les précédents irakien et libyen: l'invasion américaine en Irak en 2003 et l'intervention militaire de pays de l'Otan en Libye en 2011 ont certes renversé les dictateurs Saddam Hussein et Mouammar Kadhafi, mais ont aussi entraîné des guerres civiles sanglantes et des années de chaos.

Des craintes légitimes

Le président français Emmanuel Macron a formulé à ce sujet une mise en garde mardi, en marge du sommet du G7 au Canada:

«La plus grande des erreurs aujourd'hui, c'est de chercher par la voie militaire à faire un changement de régime en Iran, parce que ce sera là le chaos. Est-ce que quelqu'un pense que ce qui a été fait en 2003 en Irak et ce qui a été fait en Libye la décennie précédente était une bonne idée? Non!»

Le renversement du pouvoir clérical iranien pourrait créer un vide, rempli par les factions les plus radicales des Gardiens de la révolution ou l'armée iranienne, selon Grajewski:

«Si le régime était renversé, l'espoir serait qu'il soit remplacé par un gouvernement libéral et démocratique. Mais il y a une forte probabilité que ce soit plutôt des entités puissantes qui émergent, comme les Gardiens de la révolution.»

Les figures d'opposition ne font pas l'unanimité

L'opposition iranienne en exil est très divisée. Parmi les figures les plus connues, Reza Pahlavi, le fils du shah d'Iran renversé par la révolution islamique de 1979, a déjà estimé que la République islamique était «sur le point de tomber», accusant le guide iranien de se «terrer comme un rat effrayé».

Le Prince d'Iran Reza Pahlavi, fils du défunt Shah iranien Mohamad-Reza Pahlavi, prononce son discours lors du 17e Sommet de Genève pour les droits de l'homme et la démocratie, au Centre Int ...
Le Prince d'Iran Reza Pahlavi, fils du défunt Shah iranien Mohamad-Reza Pahlavi, prononce son discours lors du 17e Sommet de Genève pour les droits de l'homme et la démocratie, à Genève, le mardi 18 février 2025.Image: Keystone

Pahlavi, qui vit aux Etats-Unis, est partisan de longue date de renouer des liens et de reconnaître Israël, et a refusé de condamner les frappes de l'Etat hébreu. Mais il est loin de faire l'unanimité en Iran comme dans la diaspora.

Autre grand groupe de l'opposition en exil, les Moudjahidines du peuple (MEK). Leur dirigeante, Maryam Rajavi, a déclaré mercredi devant le parlement européen que «le peuple d'Iran veut la chute du régime».

Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), s'est adressée au Parlement européen à Strasbourg. Dans son discours, elle a souligné que la seule voie viab ...
Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), s'est adressée au Parlement européen à Strasbourg. Dans son discours, elle a souligné que la seule voie viable vers la paix et la stabilité en Iran et dans la région est le changement de régime par le peuple iranien et sa résistance organisée.Image: Imago

Mais les Moudjahidines sont méprisés par les autres factions de l'opposition et critiqués par certains Iraniens pour leur soutien à Saddam Hussein pendant la sanglante guerre Iran-Irak (1980-1988).

Thomas Juneau, professeur à l'Université d'Ottawa souligne que:

«Il n'y a pas d'alternative démocratique organisée au pouvoir actuel en Iran»

Selon lui, Reza Pahlavi, de loin le dirigeant d'opposition le plus connu, «tend à exagérer le soutien dont il bénéficie à l'intérieur du pays». Juneau ajoute ensuite:

«La seule alternative, et cela fait partie des scénarios inquiétants, est un coup d'Etat par les Gardiens de la Révolution ou le passage d'une théocratie à une dictature militaire.»

Une issue imprévisible

Autre facteur d'instabilité, soulignent les analystes, le complexe tissu ethnique de l'Iran, qui comprend d'importantes minorités kurde, arabe, baloutche et turque aux côtés de la majorité perse. Selon Grajewski:

«Des pays hostiles vont vouloir exploiter les divisions ethniques»

Le groupe de réflexion américain Soufan Center souligne pour sa part que:

«Le scénario du jour d'après demeure imprévisible et pourrait déclencher une déstabilisation régionale à une plus grande échelle encore que celle qu'avait provoquée la chute du régime de l'Irak.»
La guerre entre Israël et l'Iran en images
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La guerre entre Israël et l'Iran en images

Une explosion à Tel Aviv

source: sda / atef safadi
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Au Liban, des missiles traversent le ciel pendant que les gens vivent leur vie.
Video: watson
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«Israël et l’Iran représentent un danger» pour la Syrie
Pas de réaction et encore moins d'intervention: le nouveau pouvoir syrien fait tout pour rester à l'écart de la guerre actuelle au Proche-Orient, alors qu'il est lui-même visé par des frappes israéliennes depuis des mois. Explications.

Depuis près d'une semaine, les Syriens observent des missiles iraniens survolant leur territoire, parfois interceptés par Israël, spectateurs cette fois-ci d'une guerre que leur gouvernement s'est gardé de condamner et dont ils veulent rester à l'écart. «Depuis mon balcon, je vois la nuit les missiles filer vers Israël, les tirs de riposte, les explosions dans le ciel», déclare Mohammad Khair al-Jiroudi.

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