Officiellement, l’équipe de Suisse lancera sa campagne le samedi 25 mars en Biélorussie. Dans les faits, elle se rendra probablement à Novi Sad, une ville serbe à l'architecture baroque et aux façades colorées. Les Biélorusses y reçoivent leurs adversaires depuis le début du conflit ukrainien.
Leur présence dans la compétition n'en reste pas moins étonnante, voire gênante. «Comment peuvent-ils prétendre disputer l'Euro 2024 en tant que soutien majeur des dirigeants russes», a protesté la ministre allemande de l'Intérieur Nancy Faeser, au nom du pays organisateur.
Dans une lettre adressée à Alexander Čeferin, Nancy Faeser, ministre allemande de l’Intérieur, a réclamé l’exclusion de la Biélorussie des qualifications à l’Euro 2024, organisé outre-Rhin.https://t.co/CCLt2plyU4
— 𝙻𝚎𝚘 𝙰𝚜𝚌𝚑𝚒 (@_LeoAschi_) September 17, 2022
Dans de nombreux sports, la Biélorussie est sanctionnée pour ses accointances avec le Kremlin. Elle est exclue de toute compétition internationale en hockey sur glace, en rugby, en volleyball, en cyclisme (notamment), à titre individuel ou collectif.
L'UEFA n'est pas allée aussi loin. Jusqu'à nouvel avis, l'instance faîtière du football européen limite ses sanctions à la Russie. La seule mesure imposée aux équipes biélorusses (pour des raisons non précisées) est l'obligation d'accueillir le monde sur terrains neutres et à huis clos, non plus à Minsk. La sélection nationale a pris ses habitudes à Novi Sad.
Dans son communiqué de février, l’UEFA précise qu’elle «convoquera d'autres réunions extraordinaires», de façon régulière, afin de «réévaluer la situation juridique et factuelle». Mais sa position n'a pas changé. Ou pas encore.
Dans une lettre adressée au président Aleksander Ceferin, Nancy Faeser instille une forme de pression: «Non seulement la Russie, qui mène une guerre en violation du droit international, mais aussi le Bélarus, en tant que soutien majeur des dirigeants russes, devraient être exclus de tous les matches et tournois de football internationaux.»
Concrètement et malgré un groupe relativement faible, il reste peu probable que la Biélorussie, 97e à l'indice FIFA, n'atteigne les deux premières places qualificatives à l'Euro 2024. En clair: elle ne mettra sans doute jamais les pieds en Allemagne. La Suisse n'en garde elle aussi que des bons souvenirs (trois victoires en autant de confrontations).
Reste la question fondamentale de l'adhésion et de la posture. Même si les positions s'assouplissent doucement, notamment dans les arcanes du CIO, l'UEFA est quasi seule à tolérer la présence d'une équipe nationale biélorusse dans ses compétitions. De surcroît sans lui imposer une bannière neutre.
Au niveau politico-économique, le Conseil européen a prononcé l'exclusion de cinq banques biélorusses du système SWIFT et l'interdiction de fournir des billets de banque libellés en euros à la Biélorussie, entre autres mesures répressives. Le président Alexandre Loukachenko est régulièrement désigné comme un allié de Poutine et «le dernier dictateur d'Europe». Voilà pourquoi la présence des Biélorusses au tirage au sort de l'Euro 2024 a suscité une vive surprise, en Suisse et ailleurs, pour ceux qui avaient oublié «l'exception UEFA».
Historiquement, le football biélorusse ne manque pas de résilience: il est le seul dans toute l'Europe à n'avoir pas interrompu son championnat domestique pendant le Covid. «Mieux vaut mourir dignement que vivre à genoux», avait décrété le président Loukachenko.