Après plus de vingt ans d'existence, le tarif médical Tarmed sera remplacé. Le Conseil fédéral a donné son feu vert mercredi au Tardoc et aux forfaits ambulatoires. Ils entrent en vigueur le 1er janvier 2026.
Le Tarmed, introduit en 2004, n'a jamais été entièrement révisé. Il est jugé dépassé et doit être remplacé, a rappelé la ministre de la santé Elisabeth Baume-Schneider. La nouvelle structure tarifaire et la réforme du financement uniforme des soins (EFAS) vont «moderniser le système de santé et le rendre plus transparent», a-t-elle ajouté.
Toutes les positions ont été révisées et le travail accompli par les partenaires est immense, a salué la ministre:
Les deux structures ne sont pas parfaites, mais c'est important de les lancer maintenant, a estimé le vice-directeur de l'Office fédéral de la santé publique Thomas Christen lors d'une discussion technique.
Leur validité est limitée à fin décembre 2028 afin de permettre aux partenaires d'apporter les ajustements nécessaires, précise le gouvernement. Et de demander des améliorations de deux structures au niveau de l'homogénéité de certains forfaits ambulatoires ou des minutages.
Le Tardoc, élaboré par la faîtière des assureurs curafutura et l'organisation des médecins FMH, est un tarif à la prestation qui repose sur la même construction que le Tarmed. Il permet une facturation plus précise des durées de consultation et tient mieux compte des spécificités et des besoins de la médecine de famille. Il compte 1373 positions (contre 4600 dans le Tarmed).
Les forfaits dans l'ambulatoire, portés par santésuisse et les Hôpitaux H+, sont inspirés du système DRG utilisé dans le stationnaire. Ils permettent de simplifier les factures et de limiter les incitations à accroître les quantités de prestations facturées.
Longtemps en concurrence, elles sont regroupées dans l'Organisation tarifs médicaux ambulatoires (Otma). Le Conseil fédéral a partiellement approuvé les deux structures en juin dernier, mais demandait des ajustements. Sous l'égide de l'Otma, les partenaires travaillent depuis à l'élaboration d'un système tarifaire global. Ils ont précisé le périmètre d'application de chacune des deux structures.
Chaque facturation s'effectuera soit via Tardoc, surtout appliqué pour les prestations en cabinets, soit via les forfaits ambulatoires, notamment pour les prestations fournies par les hôpitaux. Ces forfaits contiennent toutes les prestations du traitement.
Une facturation mixte n'est pas possible. Le choix du système s'effectue automatiquement après la saisie du diagnostic.
Les partenaires sont parvenus à supprimer 140 positions du catalogue des forfaits. Il n'en reste que 315. Ceux-ci représentent 13% du volume total des coûts ambulatoires. Pour les cabinets, ces forfaits ne représenteront que 9% des factures, contre 20% dans la version présentée précédemment. 91% des prestations seront facturées via le Tardoc.
Les forfaits représentent 19% des coûts dans les hôpitaux. L'exigence du Conseil fédéral de réduire de moitié le volume des coûts dans le secteur des cabinets est remplie.
Le Conseil fédéral avait également exigé la neutralité des coûts. Le changement de système ne doit pas entraîner une hausse des coûts des prestations médicales ambulatoires. Les partenaires sont parvenus à harmoniser la méthode visant à garantir ce point.
L'augmentation annuelle des coûts totaux ne dépasse pas 2,5%. Le Conseil fédéral a fixé à 4% la limite maximale de l'augmentation annuelle. Soit 3% par assuré et 1% pour l'évolution démographique. Des mesures de correction devront être prises en cas de dépassement. Par ailleurs, afin de répondre à une demande du Parlement, le nombre de points facturables par jour sera limité.
Le nouveau système tarifaire global devra être révisé et mis à jour chaque année. Il s'agit de ne pas répéter les erreurs commises avec le Tarmed. La première révision, qui devra être présentée fin février 2026, se focalisera sur les forfaits ambulatoires.
Le conseiller d'Etat bernois et président de l'OTMA, Pierre-Alain Schnegg, a assuré que celle-ci n'allait pas se reposer sur ses lauriers. Et de rappeler que «ça va secouer en 2026». Mais ce pas est important pour récolter les données nécessaires.
La nouvelle association faîtière des assureurs maladie prio.swiss, pour sa part, s'est réjoui de l'approbation par le Conseil fédéral de ce nouveau système. Cette structure tarifaire doit notamment améliorer la situation des pédiatres et des médecins de famille, mais aussi pérenniser l'ensemble du domaine ambulatoire, salue mercredi prio.swiss dans un communiqué.
Prio.swiss invite les partenaires tarifaires à redoubler d'efforts pour permettre l'introduction en bonne et due forme du nouveau tarif au 1er janvier 2026 et à collaborer de manière constructive aux révisions prévues. «Il est crucial pour les assureurs maladie que le principe de la neutralité des coûts, qui était à la base du mandat initial confié aux partenaires tarifaires, soit préservé et que les adaptations ne se fassent pas au détriment des payeurs de primes», souligne Saskia Schenker.
Son de cloche différent, en revanche, du côté d'Interpharma, qui s'inquiète des risques considérables pour les patients ainsi que pour le site pharmaceutique suisse. L'intégration des coûts des médicaments dans les forfaits crée en effet une dangereuse incitation à traiter les patients avec les médicaments les moins chers et non les plus appropriés, estime l'association des entreprises pharmaceutiques suisses.
De plus, il devient ainsi beaucoup plus difficile que les nouveaux médicaments innovants soient payés par les caisses maladie et soient donc disponibles pour les patients. L'approvisionnement en médicaments innovants en Suisse, déjà fragilisé, se détériore ainsi davantage.
L'Association des entreprises suisses de santé (Ospita) avait pour sa part demandé - en vain - de reporter d'un an l'entrée en vigueur de la nouvelle structure tarifaire. La décision du Conseil fédéral représente un risque considérable pour tous les fournisseurs de prestations ambulatoires, en particulier pour ceux qui sont gérés par des organismes privés, estime-t-elle.
En raison des incertitudes prévisibles concernant la facturation des prestations ambulatoires lors du passage à la nouvelle structure, les risques de liquidité reposent en effet uniquement sur les prestataires, alors que les assureurs ont la garantie d'encaisser les primes de l'assurance obligatoire. Cette problématique est beaucoup plus marquée pour les fournisseurs de prestations privés que pour les hôpitaux publics, qui peuvent compter sur le soutien des cantons. Ospita demande donc des garanties de la part des assureurs et, si nécessaire, des conditions équitables de la part des cantons, si des aides de liquidité sont accordées lors de la transition. (jah/mbr/ats)