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Frein aux coûts de la santé: neuf questions sur l'initiative

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Primes maladie: le frein aux coûts est-il vraiment une bonne idée?

Le 9 juin, la population votera sur l'«initiative pour un frein aux coûts» du Centre. Pour ses instigateurs, c'est l'unique moyen de contrôler l'évolution des primes. Les opposants dénoncent quant à eux le risque d'une médecine à deux vitesses. Voici les principales questions et réponses.
16.04.2024, 09:26
Anna Wanner / ch media
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Pourquoi le Centre exige un frein aux coûts de la santé?

Les coûts de la santé ne cessent d'augmenter et, avec eux, les primes d'assurance maladie. Selon le Conseil fédéral, les coûts de l'assurance maladie obligatoire ont augmenté d'environ 31% au cours des dix dernières années, et les salaires d'environ 6%. Les primes pèsent de plus en plus sur les assurés.

Mais la politique ne semble pas trouver de recette durable pour y remédier. Du point de vue du Centre, le problème est pourtant reconnu. La plupart des acteurs du système de santé n'ont aucun intérêt à réduire les coûts, car ils en tirent aujourd'hui de bons bénéfices. Le Centre est convaincu que seul un frein aux coûts peut créer la pression nécessaire pour supprimer les traitements inefficaces ou superflus. Or, près de 6 milliards de francs pourraient être économisés sans que la qualité en pâtisse.

Comment le frein aux coûts fonctionne-t-il?

Le Centre veut, par le biais de cette initiative, lier les coûts de la santé à l'évolution économique globale et aux salaires moyens. Le parti laisse toutefois la mise en œuvre exacte au Parlement.

Une indication de la méthode figure dans l'initiative: si les primes d'assurance maladie par personne assurée augmentent de 20% de plus que les salaires nominaux, la Confédération et les cantons doivent prendre des mesures d'économie pour l'année suivante.

Quelles sont les mesures d'économie prévues?

L'initiative laisse cette question ouverte. Le Centre a listé trois propositions concrètes sur son site Internet:

  • La baisse du prix des médicaments devrait permettre d'économiser environ 400 millions de francs.
  • Favoriser les interventions ambulatoires plutôt qu'hospitalières pourrait permettre d'économiser un milliard de francs.
  • Le dossier électronique du patient devrait faire économiser 300 millions de francs.

Le parti renvoie en outre aux propositions d'économies d'un groupe d'experts.

Que faut-il penser de cette initiative?

Elles suscitent des critiques, notamment, car deux des trois propositions sont déjà en cours de réalisation. Le fait de ne pas proposer des mesures d'économie concrètes (et réalistes) est considéré comme une faiblesse.

Selon les opposants, ces propositions conduiront directement à un rationnement des prestations médicales et à une médecine à deux vitesses. Presque tous les partis en font sont de cet avis, à l'exception du Centre et du Parti évangélique suisse.

Faut-il en arriver là?

Non. La mise en œuvre est encore floue, mais il est irréaliste de penser qu'il sera possible de procéder à des coupes budgétaires sans que la qualité des soins n'en pâtisse. C'est pour cette raison que la Confédération met, elle aussi, en garde contre l'acceptation de l'initiative:

«Il n'est pas exclu que des traitements médicalement nécessaires ne puissent alors plus être effectués, ou plus immédiatement»

La pression n'est-elle pas nécessaire pour avancer?

Le Conseil fédéral et le Parlement estiment qu'un meilleur contrôle des coûts n'est pas une mauvaise chose en soi. Mais ils rejettent le mécanisme proposé. Il est trop rigide selon eux, et néglige de nombreux facteurs tels que:

  • Le vieillissement de la population.
  • Les progrès techniques de la médecine.
  • Une éventuelle crise économique ou une pandémie.

De plus, dès que les dépenses de santé augmenteront de manière disproportionnée, des coupes s'imposeront. Le Parlement n'est pas resté totalement inactif à ce sujet. Il a décidé d'améliorer le monitoring des coûts, ce qui conduit à une plus grande transparence. Il sera ainsi plus facile de définir des mesures d'économie afin d'atteindre certains objectifs de coûts.

A quel point ces objectifs de coûts sont-ils contraignants?

Les objectifs de coûts constituent un contre-projet indirect. Ils entreront en vigueur si l'initiative échoue dans les urnes. Le caractère contraignant n'est toutefois pas le même pour le contre-projet: les autorités doivent fixer tous les quatre ans de nouveaux objectifs de coûts en collaboration avec les acteurs du système de santé. Une commission surveille les coûts et recommande des mesures en cas d'évolution défavorable.

Quel est le potentiel d'économies dans le secteur de la santé?

Il n'y a pas de réponse claire à cette question. La vraie problématique est de savoir s'il faudra renoncer à des prestations et à la qualité.

Un groupe d'experts mandaté par la Confédération a constaté en 2017 qu'environ 20% des prestations sont inefficaces ou n'apportent pas de plus-value médicale. Elles pourraient donc être supprimées sans perte de qualité.

Pourquoi personne ne fait rien contre cela?

Il y a de temps en temps des tentatives pour s'attaquer aux mauvaises incitations ou à la surabondance de soins, par exemple avec de nouveaux tarifs.

Anne Lévy, directrice de l'Office fédéral de la santé publique, vient de lancer une initiative sur le thème de l'excès de soins. Mais les inefficacités ne sont pas faciles à démontrer, explique-t-elle. Et lorsque c'est le cas, de nombreux acteurs importants s'opposent généralement à un changement.

Il est donc difficile d'améliorer le système. Et c'est précisément là qu'intervient l'initiative du centre: un frein aux coûts augmenterait la pression en faveur des réformes.

(Traduit de l'allemand par Barnabé Fournier)

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