On ignore à quoi vaquent les pensées de William, le soir venu, une fois les enfants couchés, sa femme embrassée, la lumière éteinte et sa tête posée sur l'oreiller. Un gros melting-pot, sans doute, entre préoccupations privées, professionnelles et publiques. Qu'on l'adule ou qu'il nous insupporte, qu'il nous fascine ou nous laisse indifférents, il faut reconnaître à l'héritier du trône qu'il traverse l'une des périodes les plus intenses et les plus complexes de sa vie. Une période jalonnée de dilemmes et d'inconnues qu'on ne souhaite à personne.
Sa priorité absolue, il l'a dit et répété, est de protéger sa famille. Son intimité. Ce désir d'intimité, né lors du décès de sa mère en 1997, est l'une des clés de sa personnalité. Il en fait la démonstration une fois de plus en janvier dernier, au moment de l'opération de Kate, en coupant court à son travail pour se consacrer à la gestion des tâches ménagères, son épouse et ses trois enfants, à l'école et aux devoirs. «Il a fait de son mieux», assure une source au média Page Six.
Kate embarquée dans un traitement long et éprouvant contre le cancer, son mari devra continuer à naviguer entre soutien émotionnel, physique et craintes légitimes de l'entourage. Une situation personnelle déjà délicate à gérer, auquel s'ajoute un autre gros morceau aussi institutionnel que privé: le cancer de son roi de père.
Avec l'intervention sur la prostate de Charles III, puis le diagnostic de cancer, le fardeau du leadership repose désormais en grande partie sur son successeur. Plus que jamais, William se trouve à un battement de cœur du trône. Un poste suprême de chef d'Etat auquel il aspirait secrètement accéder plus tard.
Il est presque certain désormais que le chemin qui le sépare de la couronne relève plus du sprint que du marathon. Si le prince rêvait d'avoir encore 15, voire 20 ans devant lui, certains observateurs royaux murmurent qu'il ne resterait à Charles que deux ou trois ans. Une rumeur difficile à étayer, étant donné le silence du palais et la véritable «omerta» qui règne autour de la santé du monarque, comme le glissait récemment à watson le journaliste Marc Roche, qui possède ses sources.
William n'a plus le choix. Aussi délicate soit sa situation familiale, le prince de Galles va devoir s'impliquer à fond dans son travail. Le moment est venu pour cet homme «compétent et expérimenté», mais qu'on dit aussi «indécis» voire «colérique» en privé, d'intensifier ses efforts et d'asseoir son leadership. Après tout, à 41 ans, William est déjà plus expérimenté que ne l'était sa grand-mère, Elizabeth II, lorsque son propre père est décédé d'un cancer, en 1952.
Ces derniers mois, nous l'avons vu prendre en confiance, mettre en pratique des idées de longue date, s’exprimer sur la question la plus controversée du moment, le conflit israélo-palestinien, s'impliquer dans des mécénats soigneusement choisis - beaucoup moins que nombreux que ceux de son père. Nous l'avons vu trouver son propre style, faire les choses à sa manière, tout en respectant l'héritage d'Elizabeth - sa plus grande influence et «le meilleur modèle qu'il puisse avoir», affirmait William en 2016, à l'occasion des 90 ans de sa grand-mère.
Mais nous l'avons vu aussi se prendre les pieds dans le tapis, multiplier les couacs, les secrétaires privés et les changements au palais de Kensington. Une instabilité à l'origine d'erreurs de communication grossières pour le couple royal, persuadé qu'il peut tout gérer seul et nourri à la culture de la startup horizontale. Après des semaines d'errance médiatique, le prince doit absolument consolider et stabiliser son équipe. Espérons que son tout dernier secrétaire privé en date, l'ancien diplomate britannique et consultant en affaires Ian Patrick, qu'on décrit comme un ponte dans son domaine, fera plus long feu que les précédents.
Quelque part entre désir de nouveauté, de marquer son style et de maintenir sa précieuse vie privée, William devra trouver un équilibre. Sans parler des défis auxquels est confrontée l'institution, placée devant des pressions répétées et de véritables problèmes logistiques depuis la mort de la reine.
La monarchie «allégé» de son père, Charles, révèle plus que jamais ses failles. Il n'y a désormais plus qu'une infime poignée de membres de la famille royale sur qui compter. Un vide d'autant plus criant que Kate, personnalité emblématique, essentielle, indispensable, manquera à l'appel pour encore plusieurs mois.
Chaque chose en son temps. D'abord, reprendre sa respiration, après des semaines de tourmente. «Pour le moment, tout ce que veut William, c’est protéger sa femme et ses enfants. La famille veut juste partir pour Pâques, passer du temps ensemble, tous les cinq, se couper du monde et passer à autre chose», glisse un initié au Sunday Times, au terme d'un week-end marqué par des centaines de milliers de messages de soutien à l'égard de la princesse Kate.
Un peu de repos bienvenu, avant l'immense défi qui attend le prince de Galles à son retour de vacances de Pâques, le 17 avril. Le test ultime pour prouver qu'il a de quoi devenir roi d'Angleterre.