Après une année 2023 riche en péripéties (le bouquin incendiaire du prince en exil, le premier couronnement en 70 ans, l'absence encore douloureuse d'Elizabeth II, la dernière saison polémique de The Crown...), les Windsor espéraient sans doute que 2024 débuterait sur une note un poil moins dramatique. Sauf que ce ne serait pas la famille royale d'Angleterre sans quelques rebondissements. Des imprévus, comme l'extraordinaire drame médical royal qui s'est joué ce mercredi.
La première onde de ce tremblement de terre a été ressentie en Suisse à 15 heures tapantes, mercredi, sous la forme d'un communiqué du palais de Kensington. Du pur jus royal. Ton flegmatique et faussement détaché. Après avoir été hospitalisée «la veille», Son Altesse la princesse de Galles vient tout juste de sortir d'une «chirurgie abdominale». Une opération «planifiée» et «réussie». Circulez, il n'y a rien à voir.
Si le terme «planifié» était censé couper court à toute polémique, c'est raté. Le manque d’information et le choix des mots délibérément ambigu (une «chirurgie abdominale», avance le rédacteur en chef de la rubrique santé du London Time, peut concerner aussi bien «l’estomac, l’appendice, les reins, l’intestin que l’appareil reproducteur») a aussitôt été comblé par un tsunami de spéculations. Tant et si bien que le palais a dû s'empresser de préciser qu'il ne s'agissait pas d'un problème «cancéreux». Sans fournir plus d'indications sur la gravité de la procédure médicale.
Et comme si ce premier choc ne suffisait pas, une deuxième alerte s'est déclenchée, à peine 90 minutes plus tard. Cette fois, en provenance du palais de Buckingham. Suite à un contrôle médical, le roi Charles III est également sur le point de passer sur le billard, pour une intervention de «l'hypertrophie bénigne de la prostate», la semaine prochaine.
Un timing malheureux et brutal, vous admettrez, mais cette succession d'annonces ne serait qu'une simple «coïncidence», selon des sources du palais. Même pas de bête couac de communication. Après tout, ce ne serait pas la première fois que les équipes distinctes du roi et de la princesse, dont la communication laisse à désirer, se marchent sur les pieds. A croire des initiés auprès du Telegraph, l'annonce de Charles ne pouvait tout simplement pas être différée pour des raisons d'agenda.
Le résultat est là. En l'espace de quelques minutes, la famille royale senior se trouvait privée de deux de ses principaux membres. Deux soldats hors de combat, alors qu'une bonne partie des membres adultes de la famille royale, dans la ligne de succession (le prince Harry, le prince Andrew et la princesse Beatrice), n'ont pas de rôle public. Même si les frères et soeurs du roi, la princesse Anne et le prince Edward, pourraient être sollicités, William se retrouve plus ou moins seul sur le champ de bataille.
Seul, le prince de Galles ne devrait pas le rester pas bien longtemps. Sauf complication inattendue, la période de convalescence de son père devrait être «courte». Le plan d'urgence prévu en cas d'incapacité de Sa Majesté, qui prévoit cinq conseillers d'Etat (dont la reine Camilla et William) pour le remplacer, ne devrait même pas être déployé. Pour l'instant, seuls une poignée d'engagements du souverain ont été reportés.
C'est un problème d'une toute autre envergure du côté de la princesse de Galles. Au terme de son opération, Kate devrait rester hospitalisée pour les 10 à 14 prochains jours et ne pas être en mesure de reprendre ses engagements publics avant Pâques «au moins», selon Kensington Palace. Trois mois sans Kate. Autant dire une éternité. La princesse joue un rôle central. Pas seulement celui d'épouse et de mère des futurs rois. Ni de membre la plus populaire de la clique. Comme la princesse Diana en son temps, l'atout des Windsor garantit de maintenir l'institution à la Une des journaux - drames en moins.
C'est donc à William qu'il revient d'endosser la cape du «super royal», jeune, sexy et désirable, capable de mobiliser les foules et d'exciter les rédacteurs les plus blasés du Daily Mail. Ce ne serait pas la première fois. Lors de son voyage en solo à New York, en septembre dernier, le prince de Galles a déjà prouvé qu'il était tout aussi bien capable de provoquer les hourras aigus d'une masse excitée.
Ces prochaines semaines s'annoncent comme un véritable exercice d'équilibriste pour le futur roi, entre vie publique et privée. Devoir de représentation et de famille. William a toujours répété que, pour les années qu'il lui reste en tant qu'héritier du trône, sa priorité absolue était d'assurer son job de père et de mari. La preuve: sitôt l'annonce de l'opération de Kate tombée, le prince se retirait de ses fonctions publiques pour toute la durée de son hospitalisation. Son retrait devrait se prolonger dans les jours suivant le retour de la princesse à la maison, auprès de leurs trois jeunes enfants.
Si des sources ont affirmé qu’il était peu probable que le couple entreprenne un voyage international dans les mois à venir, l'absence de William de la scène publique ne pourra pas s'éterniser. Pour une institution dont la survie se base en grande partie sur la représentation, trois mois sans ses figures les plus désirables (et désirées) sont inenvisageables. Le prince de Galles, qui a grandi à l'école d'Elizabeth II, en est pertinemment conscient.
Un sacré challenge, mais aussi une opportunité pour l'héritier du trône, qu'on sait impatient d'embrasser sa fonction de roi malgré sa bonne conscience paternelle. Sa présence sur la scène publique, sans une Kate pour capter tout la lumière (nous n'irons pas jusqu'à dire l'éclipser), sera une manière remarquable de faire l'objet de toutes les attentions. Une opportunité. Et un risque. L'équilibriste n'a pas intérêt à s'encoubler.