Le mot ukrainien palianytsia désigne un pain blanc traditionnel composé de farine, d'eau, de levure et de sel. Après l'invasion russe de l'Ukraine en 2022, le mot a toutefois pris une nouvelle signification: Il est devenu un mot de passe linguistique, car les Russes le prononcent différemment des Ukrainiens de souche. Depuis peu, Palianytsia a acquis une troisième signification, en plus de celle d'aliment et de marque distinctive. C'est le nom d'une nouvelle arme, potentiellement puissante, de fabrication ukrainienne.
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Selon lui, cet hybride est capable d'attaquer les aérodromes d'où les chasseurs et bombardiers russes s'élèvent pour attaquer les villes et localités ukrainiennes.
L'Ukraine a désormais un atout dans sa manche pour stopper le potentiel offensif de l'armée de l'air russe.
Le développement de ce mélange de missile et de drone a pris un an et demi, a précisé Zelensky. L'Etat a mis en place des programmes de soutien et adopté des déréglementations pour stimuler l'industrie privée, souligne la plateforme de dons United24. La production du drone-fusée doit maintenant être rapidement étendue, assure Zelensky. Le président ukrainien n'a toutefois pas donné d'indication sur la portée du Palianytsia. Selon les informations de United24, plus de 20 champs d'aviation russes se trouvent dans le rayon d'action de l'arme. Le portail n'a pas précisé de quoi il s'agissait exactement.
En termes de portée, la nouvelle création de l'Ukraine se place toutefois loin derrière les missiles ATACMS, qui font également partie de son arsenal. Les missiles balistiques à courte portée de fabrication américaine peuvent atteindre des cibles jusqu'à 300 kilomètres de distance. En raison des conditions imposées par Washington, l'Ukraine ne peut toutefois pas les utiliser pour des attaques sur le territoire russe. De nombreuses cibles potentielles se trouvent pourtant dans le rayon des armes à longue portée, écrit le think tank américain Institute for the Study of War (ISW) dans une analyse actuelle de la guerre en Ukraine.
Parmi ces cibles se trouveraient de grandes bases militaires, des stations de communication, des centres logistiques, des installations de réparation, des dépôts de carburant, des dépôts de munitions et des quartiers généraux. Ces objectifs ne pourraient être que très difficilement déplacés et soutiendraient actuellement les troupes russes dans les domaines du commandement et du contrôle, du renseignement, de la logistique et de la remise en état, selon l'ISW.
Des hauts fonctionnaires de l'administration de Biden auraient argumenté que des attaques avec des missiles ATACMS sur le territoire russe n'auraient pas de sens parce que le Kremlin a déplacé ses forces aériennes plus loin dans l'arrière-pays. Selon le groupe de réflexion américain, c'est un peu court. Il serait faux de ne pas prendre en compte «les centaines d'autres installations qui soutiennent la guerre de la Russie contre l'Ukraine».
Dans son analyse, le think tank américain plaide pour une levée des restrictions occidentales. Les missiles occidentaux constitueraient une menace sérieuse dans la guerre aérienne et obligeraient peut-être «le Kremlin à réorganiser considérablement ses forces armées dans toute la partie arrière du pays», selon l'ISW.
L'Ukraine avait déjà obtenu un effet similaire en 2022, lorsque l'armée avait utilisé pour la première fois des lanceurs de missiles Himars. Surprise, la Russie avait mis du temps à s'adapter à la nouvelle menace et à mettre ses installations militaires hors de portée. Cela a largement contribué à «l'arrêt de l'avancée russe fin 2022».
L'ISW analyse que les forces armées russes ne disposeraient pas d'une défense aérienne suffisante dans les zones arrière pour empêcher les attaques ATACMS. La campagne de drones ukrainienne l'a notamment démontré. Dernièrement, l'Ukraine avait attaqué des dépôts de munitions et de carburant avec des aéronefs détournés, provoquant des explosions et des incendies qui ont duré plusieurs jours.
Fort du succès de l'armée ukrainienne à Koursk, Volodymyr Zelensky a de nouveau plaidé pour la levée des dernières restrictions sur l'utilisation des missiles ATACMS. Pour ce faire, il a envoyé des fonctionnaires ukrainiens qui ont rencontré des membres du Congrès et des officiels américains et ont fait des déclarations publiques. L'objectif de cette campagne est d'augmenter la pression sur la Maison Blanche à l'approche des élections américaines. Le résultat de ces dernières pourrait avoir un impact fondamental sur l'aide américaine à l'Ukraine.
La partie ukrainienne fait valoir que les Etats-Unis ne devraient plus s'inquiéter d'une intensification de la Russie. «Tout le concept naïf et illusoire des soi-disant lignes rouges» s'est «effondré» suite aux succès obtenus à Koursk, a défendu le président Zelensky. Les alliés, et en particulier les Etats-Unis, devraient laisser Kiev mener la guerre selon ses propres conditions.
Après une attaque aérienne russe massive lundi, Zelensky a de nouveau insisté pour avoir les mains libres dans l'utilisation des armes contre la Russie:
A ses yeux, des décisions énergiques sont nécessaires pour mettre fin à la guerre. Il s'agirait notamment de lever les restrictions sur l'utilisation d'armes occidentales livrées contre la Russie:
Mais jusqu'à présent, le président Joe Biden n'a pas cédé, rapporte le journal américain Politico. Son équipe envisagerait d'envoyer d'autres missiles, mais pas de modifier les règles associées. L'Ukraine dispose des pouvoirs nécessaires pour gagner la guerre, ont affirmé de hauts responsables américains.
Malgré cela, des responsables ukrainiens se sont montrés optimistes quant à la possibilité d'obtenir l'autorisation de déployer des missiles américains:
Au cours de la guerre, l'Ukraine est parvenue souvent à surmonter les réserves de ses partenaires occidentaux. Ainsi, les Etats-Unis et les alliés européens fournissent désormais à Kiev des missiles à longue portée, des chars et des avions de combat F-16, alors qu'ils ne voulaient pas le faire auparavant. Mais les restrictions sur les missiles de précision à longue portée persistent. Même si le gouvernement ukrainien demande depuis des mois à pouvoir également attaquer des cibles sur le territoire russe.
Le président Zelensky a souligné que l'utilisation d'armes à longue portée comme les missiles ATACMS rapprocherait vraiment les alliés de la «victoire commune». Mais tant que l'administration américaine ne le permettra pas, l'Ukraine devra recourir à des armes qu'elle a elle-même développées, comme le Palianytsia. Selon des experts militaires, ce drone-missile a été utilisé pour la première fois pour tirer sur un dépôt de munitions dans la région de Voronej. D'autres suivront probablement.
Traduit et adapté par Noëline Flippe