«Ça va faire mal»: le PLR mise sur Swisscom pour financer l'armée
Accorder plus d’argent à l’armée en contournant le frein à l’endettement? C’est désormais une option envisagée même par le conseiller aux Etats UDC Werner Salzmann, qui propose un financement spécial.
Le PLR, lui, refuse catégoriquement. Son coprésident Benjamin Mühlemann prévient:
Le casse-tête du budget de l'armée
Et l’option d’une hausse de la TVA de 0,5 point pour l’armée, comme l’envisage le Conseil fédéral? Le PLR veut également l’éviter à tout prix. Benjamin Mühlemann critique:
Pour lui, la population n’accepterait pas une telle hausse aujourd’hui:
Que l’armée ait besoin de moyens supplémentaires, le PLR ne le conteste pas. Josef Dittli, conseiller aux Etats PLR et spécialiste de sécurité, estime:
Une solution créative à trois piliers
Mais comment procéder sans relever les impôts ni assouplir le frein à l’endettement? Jusqu’ici, même les élus bourgeois spécialistes des questions de sécurité se sont heurtés à cette impasse. Josef Dittli reconnaît:
Il a donc cherché un chemin créatif, plus acceptable du point de vue libéral-radical. Dans sa motion «Garantie des investissements stratégiques pour l’armée d’ici 2035», Dittli propose un principe en trois piliers destiné à constituer une réserve de financement pour les investissements stratégiques dans l’armement, les infrastructures et la formation, à hauteur de 10 milliards de francs.
La motion a été déposée jeudi. La direction du PLR soutient l’initiative du conseiller aux Etats, qui précise présenter «une idée de base». «Au Conseil fédéral de l’étudier et de proposer ses propres adaptations», indique Josef Dittli.
Son modèle repose sur trois piliers: d’abord, la vente d’une partie des actions détenues par la Confédération dans Swisscom. Ensuite, l’affectation à l’armée d’une part des bénéfices annuels versés par la Banque nationale à la Confédération. Enfin, la création d’un fonds spécifiquement dédié à ces investissements.
La vente d’actions Swisscom
Josef Dittli explique:
Aujourd’hui, la Confédération détient 51% du capital. Les autres parts sont réparties entre investisseurs privés, tels qu’UBS, BlackRock, Norges Bank Investment Management ou la ZKB (31%), ainsi que d’autres investisseurs institutionnels (18%).
Avec une capitalisation boursière totale de 29,4 milliards de francs, la participation de 51% de la Confédération vaut environ 15 milliards. Vendre 17% des actions, soit un tiers de la participation fédérale, rapporterait environ 5 milliards.
Il insiste cependant pour que la Confédération conserve une minorité de blocage, soit 33,333% plus une action. Swisscom reste stratégique pour les communications nationales et assure un service de base essentiel. L'élu souligne:
Les bénéfices de la Banque nationale
En moyenne, la Confédération reçoit chaque année entre 500 millions et 1 milliard de francs de distribution de bénéfices de la Banque nationale suisse. Josef Dittli propose d’affecter 500 millions par an à un fonds destiné à l’armée. Sur dix ans, cela représenterait 5 milliards.
Créer un fonds dédié
Pour gérer les revenus issus des actions Swisscom et des bénéfices de la BNS, l'élu PLR souhaite créer un fonds ou un compte spécial, similaire au fonds pour les infrastructures ferroviaires (Fif) ou au fonds des routes nationales et des agglomérations (Forta).
Ce fonds servirait à financer les grands projets d’armement et les programmes d’infrastructure militaire. Josef Dittli argumente:
Une idée électrochoc, mais pas la seule
La proposition de Dittli s’ajoute à une série d’autres idées déjà sur la table. La centriste Marianne Binder souhaite créer un fonds militaire temporaire financé par l’emprunt. Le sénateur UDC Werner Salzmann défend un modèle à trois piliers basé sur le budget ordinaire de l’armée, un paquet d’économies et un financement spécial. L’Alliance Sécurité Suisse planche, elle aussi, sur une solution.
La stratégie proposée par le PLR est explosive sur le plan politique. Le parti, qui compte au Conseil fédéral la ministre des Finances Karin Keller-Sutter et le chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) Ignazio Cassis, se met en porte-à-faux avec le gouvernement, qui veut augmenter la TVA pour financer l’armée.
Pour le PLR, c’est non négociable. On ignore si les conseillers fédéraux PLR avaient connaissance de la proposition de Dittli. Selon nos informations, au moins l’entourage de Karin Keller-Sutter en avait été informé.
Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich
