Pourquoi «Wicked 2» nous écoeure malgré son casting de rêve
L'adaptation au cinéma de la comédie musicale Wicked, un préquel du classique hollywoodien Le Magicien d'Oz (1939), est un «parfait» mélange des travers hollywoodiens. Au nom de la rentabilité, les sujets y sont souvent surexploités, ceci sans grande finesse.
La comédie musicale Wicked connaissait un tel succès depuis 2003, qu'il semblait logique de la porter sur grand écran. Et comme deux films rapportent potentiellement le double d'un, le réalisateur américain Jon Murray Chu a divisé la comédie musicale de deux heures et demie en deux fois 150 minutes.
Déjà extrêmement mielleux, Wicked, est sorti il y a un an, avec le buzz que l'on connaît. Il a coûté 150 millions de dollars environ au studio Universal, et rapporté plus de 750 millions au box-office mondial.
Le deuxième volet, Wicked: For Good, est dans les salles depuis peu. Il a coûté tout autant que le premier, et son budget marketing frôle l'absurde. On en veut pour preuve des éditions spéciales de casseroles Le Creuset ou de pastilles pour lave-vaisselle.
Chaudron - casserole, on est presque dans le thème finalement
Ces deux produits n'ont rien à voir avec l'univers du film. Mais la qualité d'une publicité ne correspond en rien à la qualité de ce qu'elle promeut.
Pour les sorcières qui veulent devenir des fées du logis (soupir)
Deux sorcières que tout oppose
Si vous n'avez pas vu la comédie musicale ou que vous ne vous en rappelez plus, l'intrigue de Wicked prend place avant celle du Magicien d'Oz. On ne s'intéresse pas à Dorothy, cette jeune fille qui quitte le Kansas pour se retrouver dans le pays magique d'Oz, mais aux deux sorcières que Dorothy rencontre à Oz.
Ça sent le conflit dans la suite de Wicked 👇🏼
La bonne sorcière blanche Glinda, vêtue d'une robe de bal rose, et la méchante (dans l'original: «wicked witch») avec son chapeau pointu noir et sa peau verte.
Dans Le Magicien d'Oz, la sorcière verte n'a pas de nom et peu de caractère. Dans Wicked, elle a les deux. Elle s'appelle Elphaba (en référence aux initiales de L. Frank Baum, le créateur du Magicien d'Oz).
Au départ, elle est loin d'être méchante, mais le devient malgré elle. En partie à cause de sa peau verte, qui lui fait subir la discrimination. Elle se rebelle par ailleurs contre le magicien qui règne sur le pays d'Oz, mais qui s'avère être un imposteur et un fasciste en puissance sans aucun pouvoir magique.
La comédie musicale véhicule ainsi un message simple mais juste: il vaut mieux cultiver la tolérance et se méfier des apparences. L'intrigue n'est certes pas parfaite et devient même particulièrement brouillonne vers la fin, car elle cherche à tout résoudre de manière trop simpliste. Mais les chansons (composées par Stephen Schwartz) sont extrêmement entraînantes et compensent la plupart des lacunes du scénario.
Toujours aussi kitsch
Le premier volet se concentrait sur le premier acte de la comédie musicale. Il racontait l'enfance difficile d'Elphaba (Cynthia Erivo) et sa rencontre à l'école avec celle qui deviendra plus tard la bonne sorcière, Glinda (Ariana Grande).
Ensemble, elles se rendent chez le magicien d'Oz (Jeff Goldblum), le reconnaissent comme un charlatan, après quoi Elphaba lui déclare la guerre.
Le nouveau Wicked: For Good raconte le deuxième et dernier acte. Le magicien qui règne d'une main de fer, a donné à Glinda le rôle de marionnette de propagande, et monte la population contre Elphaba. S'ensuit une confrontation qui désenvoûte le magicien et explique d'où viennent les compagnons de Dorothy (l'épouvantail sans cervelle, l'homme de fer sans cœur, le lion sans courage).
Le scénario tient sur un fil (de réglisse)
Absolument pas contraint par le budget, le réalisateur Jon Murray Chu nous livre des images magnifiques et chatoyantes. Les paysages sont spectaculaires, les effets spéciaux et les costumes de conte de fées lui vaudront clairement une nomination aux Oscars.
Comme dans le premier volet, les actrices principales, Cynthia Erivo et Ariana Grande, toutes deux des chanteuses d'exception, brillent de mille feux.
Le deuxième long-métrage ressemble donc lui aussi à un paquet de bonbons: très coloré, très sucré, un peu excitant, mais peu rassasiant. Car Wicked: Partie II fait encore mieux ressortir ce qu'on déplorait déjà dans le premier volet. Malgré un budget astronomique et cinq heures d'images au total, les réalisateurs ont échoué à conférer de la substance à tout ça.
Il y a certes beaucoup de nouvelles chansons et de flashbacks. Pour le reste, les films collent tellement à la comédie musicale que les problèmes d'intrigue ne font que persister, voire s'aggraver en raison de la longueur.
Comme si on ne s'était pas risqué à proposer au public quelque chose d'autre que ce qu'il connaissait déjà de Broadway. D'un point de vue commercial, cela se tient. D'un point de vue artistique, beaucoup moins.
Wicked: Pour de bon, actuellement au cinéma.
(Traduit et adapté par Valentine Zenker)
