Vous l'avez peut-être remarquée, vous aussi, lors de la finale du 1500 mètres masculin ce mardi soir. Cette curieuse bande pâle en travers du pif du Néerlandais Stefan Nillessen, de son compatriote Niels Laros ou encore du Norvégien Narve Gilje Nordas. Un tiers du peloton, autant dire un joli taux d'adhérents à la tendance.
Alors non, il ne s'agit pas d'un pansement ou d'une malheureuse marque de bronzage. Ce ruban de plastique est une «bande nasale»: une fois fixée sur l'arête du nez, elle permet permet de soulever les narines et de les garder bien écartées, dégageant le passage nasal. Selon ses partisans, la respiration nasale conférerait notamment d’énormes avantages en matière de forme physique et de performance - notamment en augmentant l'afflux sanguin vers le cerveau et en alimentant plus efficacement les tissus actifs en oxygène.
Longtemps réservée aux gros ronfleurs, aux asthmatiques et aux personnes souffrant de congestion, la bande nasale s'est donc progressivement imposée dans le sport de haut niveau - de la course à pied au cyclisme, en passant par le football ou le tennis. On compte parmi ses adeptes la championne britannique du marathon Paula Radcliffe, la recordwoman du 3000m en salle Jessica O'Connell ou encore l'attaquant de Manchester City, Erling Haaland.
Si l'accessoire n'est pas nouveau, popularisé notamment lors des Jeux olympiques d'Atlanta en 1996, il connait un véritable retour en force au sein de la génération de sportifs accros à Strava, aux trackers d'activité, montres Garmin et autres chaussures à plaque carbone.
Cinq minutes sur TikTok suffisent à s'en convaincre. On ne compte plus les vidéos d'influenceurs et de coachs s'extasiant sur la manière dont la bande nasale a changé leur vie. La gourou lifestyle Gwyneth Paltrow, la seule et l'unique, ne tarit pas d'éloges pour ce qu'elle décrit comme «le meilleur outil de bien-être» qu'elle ait jamais découvert.
La tendance de la respiration nasale va si loin qu'en 2023, la numéro 1 mondiale Iga Swiatek, avait défrayé la chronique en s'entraînant avec une bande de ruban adhésif collée sur la bouche. Le but de la manoeuvre, a-t-elle expliqué ensuite aux journalistes lors d'une conférence de presse, était «d'améliorer son endurance», étant donné qu'il est plus difficile de respirer uniquement par le nez lors d'un effort intense.
En ce qui concerne l'efficacité réelle de la bande nasale, la communauté scientifique est partagée. Plusieurs recherches ont été menées ces dernières années et si certaines se contredisent, la plupart semblent pointer dans le sens d’un effet sur les performances neutre.
Ce qui ne signifie pas que la bande nasale est totalement dépourvue d'intérêt. A l'instar des chaussettes de compression, de la cryogénie, du collagène et des autres tendances fitness pour récupérer plus vite et booster ses performances, il ne faut pas négliger l'effet que peut revêtir cet accessoire sur le mental. Le fameux effet placebo: si un athlète est convaincu qu'une bande collée sur le nez peut l'aider à s'améliorer, même de manière marginale, autant y aller tête baissée.
Dans le cas de Stefan Nillessen ce mardi, en tout cas, pas sûr que la bande se soit révélée décisise. La finale épique du 1500m s'est conclue sur la victoire inattendue de l'Américain Cole Hocker, ravissant la victoire au favori, l'Ecossais Josh Kerr et à son éternel rival, le Norvégien Jakob Ingebrigtsen, quatrième au classement. Aucun des trois vainqueurs ne portait de scotch sur le nez.