La SSR craint de perdre 800 millions, l'UDC conteste
Dans quatre mois, les citoyens suisses se prononceront sur le montant que touchera la SSR à l’avenir. Une controverse apparaît désormais quant aux conséquences qu’aurait le fait d’accepter l’initiative des 200 francs. La SSR souligne qu’une réduction de la redevance de 335 à 200 francs diviserait par deux le budget du service public audiovisuel.
La société de radio et de télévision justifie ce calcul en expliquant qu’en 2024, le produit d’exploitation de la SSR s’élevait à 1,56 milliard de francs. Un oui à l’initiative diminuerait de 500 millions les recettes provenant de la redevance payée par les ménages privés. S’y ajouterait un manque à gagner de 150 millions, puisque toutes les entreprises seraient exonérées de la redevance. Les revenus publicitaires et les autres recettes commerciales reculeraient de 150 millions supplémentaires.
Au total, les pertes s’élèveraient à 800 millions de francs. Comme l’écrit la SSR, «en cas d’acceptation de l’initiative, le produit d’exploitation de la SSR se situerait ainsi autour de 750 millions de francs». Cela correspondrait à environ la moitié des moyens dont dispose actuellement le service public audiovisuel.
Une baisse des audiences est attendue
L’ampleur de la perte annoncée pour les revenus publicitaires a de quoi étonner. L’an dernier, ceux-ci s’élevaient à 208 millions de francs. Pourquoi, après un oui à l’initiative, baisseraient-ils d’environ 150 millions, donc de 72%?
La SSR explique qu’une réduction de l’offre télévisuelle entraînerait des «audiences plus faibles», autrement dit une baisse du nombre de téléspectateurs. Les chaînes de la SSR devraient alors abaisser les tarifs de leurs espaces publicitaires.
Conseiller national UDC, Thomas Matter accorde peu de crédit à ces chiffres. L’élu zurichois est convaincu que la SSR surestime d’au moins 100 millions les pertes liées aux revenus publicitaires. «Après un oui à l’initiative, la SSR conserverait plutôt plus de 850 millions par an», allègue Thomas Matter.
Celui qui est à l’origine de l’initiative «200 francs ça suffit» souligne que la société de radiodiffusion mène actuellement une vaste campagne d’image en diffusant beaucoup de publicité pour elle-même. «Ces espaces pourraient être utilisés à des fins commerciales, ce qui augmenterait les recettes de la SSR», cette année.
Le comité d’initiative souligne que la redevance de 335 francs par ménage est la plus élevée au monde. Thomas Matter réaffirme en outre que «avec 850 millions de francs, la SRG peut remplir sans difficulté son mandat central en matière d’information et de couverture sportive».
Des coupes dans le journalisme local
La SSR rétorque que la redevance est plus élevée qu’ailleurs parce qu’en Suisse, les programmes sont produits en quatre langues et non dans une seule. Elle ajoute que si l’initiative était acceptée par le peuple, les conséquences seraient majeures:
La directrice générale Susanne Wille a récemment rappelé que le téléjournal en italien était autrefois diffusé depuis un studio de télévision à Zurich.
La SSR met en outre en garde contre «des interventions sensibles dans la grille des programmes, avec moins de productions propres, moins de sport, moins de culture et une forte réduction des effectifs».
Thomas Matter, banquier zurichois et conseiller national UDC, ne se dit pas inquiet:
Le conseiller national considère en outre que, grâce à l’augmentation des recettes de la redevance, la SSR a étendu ses activités bien au-delà du service public prévu par sa concession:
La SSR souligne pour sa part que la question décisive est de savoir si, à une époque où des médias indépendants et fiables sont essentiels, il faut retirer autant d’argent au paysage médiatique suisse.
Combien resterait-il à la SSR après un oui le 8 mars prochain? Serait-ce 750 millions par an ou au moins 850 millions de francs, comme le soutient l’UDC? La campagne et la guerre des chiffres sont en tous cas lancés.
Traduit de l’allemand par Joel Espi
