On croyait cette prouesse impossible. Travis Kelce, le solide tight end des Chiefs de Kansas City, l'a fait: rafler un «oui» et passer un gros caillou au doigt de la grande, de la mythique, de la vertigineuse Taylor Swift. La reine des cœurs brisés qui, ces dernières années, à l'exception d'une relation «anormalement» longue de six ans, a enchaîné les amourettes de quelques mois comme autant de perles sur un collier. Là voilà sur le point de jurer de devenir Madame Kelce. Pour toujours.
Si l'annonce n'a pas manqué de susciter l'apoplexie de millions de Swifties à travers la planète, elle a peut-être aussi soulevé quelques inquiétudes. Car, en embrassant le statut de femme mariée et heureuse en ménage pour l'éternité (du moins sur le papier), Taylor Swift menace de faire une croix sur l'un des piliers de son succès: les Revenge Songs.
Depuis le lancement de la carrière de baby Taylor, 16 ans, en 2006, on dénombre des dizaines et des dizaines de chansons consacrées à ses ex. En 2008 déjà, c'est à son petit copain du lycée, un certain Jordan Alford, qu'elle consacre Picture to Burn. Selon la presse people, le malotru l'aurait plaquée pour sortir avec une de ses copines - qu'il a ensuite épousée, si ça peut l'excuser.
Bien d'autres titres revanchards suivront cet hymne cinglant encore très apprécié des fans. En 2010, elle adresse à Joe Jonas, des Jonas Brothers, la bien-nommée Better than Revenge. Un titre aussi iconique que leur rupture: le goujat l'aurait plaquée en 27 secondes chrono par téléphone.
A chaque relation sa chanson, et la liste s'est copieusement fournie au fil des ans: Dear John pour le musicien John Mayer en 2010, Back to December pour Taylor Lauter (le gentil loup-garou de la saga Twilight) en 2010, We Are Never Ever Getting Back Together, The Last Time ou encore All Two Well seront adressés à l'acteur Jake Gyllenhaal, en 2012.
Cette même année, elle fréquente également Conor Kennedy, rejeton de l'actuel ministre de la Santé américain, le sulfureux Robert Francis Kennedy Jr, le temps d'un été. Ce qui lui vaudra Begin Again, en 2012, après le clash.
Nous en venons ensuite à Harry Styles, le tombeur des One Direction avec lequel elle vivra une idylle de quelques semaines. Taylor Swift lui dédiera, entre autres titres, la on-ne-peut-plus-ciblée Styles, ou encore I Knew You Were Trouble, en 2013.
S'en suivra une romance de quelques mois avec le DJ Calvin Harris, entre 2015 et 2016, qui lui vaut au moins deux chansons: Dancing With Our Hands Tied, I Did Something Bad et peut-être même I Forgot You Existed, que d'autres ont interprétée comme une pique adressée à Kanye West.
En 2017, Taylor Swift met fin à la tradition des relations d'une année ou moins en se posant avec l'acteur britannique Joe Alwyn. Six ans de relation valaient bien un album de 31 titres, The Tortured Poets Department, après leur séparation en 2023.
Mais toute cette misère lyrique, c'était avant de rencontrer son footballeur de fiancé, Travis Kelce, avec lequel elle file le parfait amour depuis deux ans.
En presque vingt ans de carrière, cette habitude taylorswitesque et infamante de pointer ses anciens compagnons de la voix est donc devenue une source de spéculations délicieuses et intarissables pour les critiques, les tabloïds et les fans de la chanteuse, très investis dans la vie amoureuse de leur héroïne.
Une habitude que Taylor elle-même a encouragée. «J’ai compris très tôt que cela m’arriverait de toute façon», a-t-elle fait savoir au magazine Rolling Stone, en 2019, au sujet des spéculations sur sa vie amoureuse. «Alors, quand on comprend les règles du jeu et leurs conséquences, il faut regarder l’échiquier et élaborer sa stratégie.»
Outre un excellent défouloir et un moyen de se réapproprier le récit, parler ouvertement de ses problèmes de coeur et de ses vulnérabilités, permet surtout à la chanteuse de créer ce lien si particulier avec son public.
Résultat: selon Billboard, l'écrasante majorité de son top 10 du Hot 100 tourne autour du thème des relations amoureuses - souvent perdues. «Les paroles autoréférentielles sont très courantes dans les tubes, tous genres confondus», constatent deux journalistes du média spécialisé. «Un artiste doit pouvoir s'identifier personnellement aux paroles pour être plus capable de les interpréter de manière convaincante et crédible.»
Ceci pris en compte, forcément, même si l'on souhaite à Taylor et Travis de baigner dans le bonheur conjugal, entre le manoir des Hamptons et la baraque avec piscine de Floride, le résultat de leur félicité pourrait se faire sentir sur leurs carrières respectives. C'est bien connu, les artistes les plus inspirés sont souvent ceux qui souffrent.
Pas sûr que des chansons enjouées sur le façonnage de pain au levain façon Meghan Markle ou la joie de Taylor de voir son mari soulever le trophée de la NFL satisfassent les fans bien longtemps. Nous aurons toutefois un premier aperçu le 3 octobre, avec la sortie deThe Life of a Showgirl. Son tout premier album conçu au milieu d'une relation douce et sans nuages.
Et, au pire, la future Madame Swift-Kelce pourra se rabattre sur ses ruptures amicales. Elle a déjà commencé.