Il ne faut pas s'attendre à ce que Breel Embolo, qui vient de se remettre de sa blessure musculaire, soit prêt pour le premier match de la Suisse à l'Euro contre la Hongrie. Le sélectionneur Murat Yakin doit donc trouver une solution au centre de l'attaque. Son nom probable? Zeki Amdouni.
Dans la vie, tout peut aller très vite. Vers le haut, comme vers le bas. Amdouni en sait quelque chose, son parcours en zigzag en témoigne. Ne serait-ce qu'en équipe nationale. Ce fils d'une Tunisienne et d'un Turc a fait ses débuts avec la Nati en septembre 2022 dans le cadre de la Ligue des Nations. Avant cela, les deux pays dont sont originaires ses parents lui avaient fait des avances. Mais elles n'avaient guère de sens pour l'attaquant, bien qu'il ait regardé de près la sélection turque des moins de 21 ans. Amdouni n'a pas de passeport tunisien, mais un passeport turc. Mais il se sent Suisse avant tout.
Lors de la Coupe du monde au Qatar, Yakin a misé sur d'autres forces. Amdouni l'a accepté en silence, conformément à son caractère. Comme déjà par le passé. Au début des qualifications pour cet Euro, il était la star montante, marquait quand il le voulait. Ensuite, il a fait des apparitions partielles lors de matchs lamentables de la Nati. Mais le 4 juin, lors du test contre l'Estonie, il a su convaincre après son entrée en jeu.
Et ce, après une saison à oublier, pas forcément à titre individuel, mais pour son employeur Burnley. Le club du nord de l'Angleterre a été relégué de Premier League en Championship. L'attaquant genevois se dit frustré, mais satisfait de sa première année dans le meilleur championnat du monde.
Ses temps de jeu étaient corrects, son rendement – cinq buts en Premier League – aussi. Et il n'a pas été blessé.
Grâce à des entraînements intensifs sous la houlette de Vincent Kompany, parti au Bayern Munich, le joueur de 23 ans a appris à maintenir l'intensité sur plusieurs matchs.
Zeki Amdouni est né et a grandi dans la Genève multiculturelle. Les origines de ses parents, aujourd'hui séparés, l'ont marqué. Son père, un fervent fan de Besitkas, a immigré d'Istanbul en 1993. Opposant anticapitaliste, il avait été emprisonné en Turquie. A Genève, il a tenu un kebab et gère aujourd'hui un petit kiosque entre l'hôpital cantonal et la Plaine de Plainpalais. Il a toujours rêvé que son Zeki – qui signifie «intelligent», en turc – devienne footballeur pro. Il a donc beaucoup exigé de son fils, en le faisait notamment beaucoup travailler son pied gauche, plus faible, sur les terrains de la ville.
Jusqu'à aujourd'hui, Zeki Amdouni a conservé son étiquette de «footballeur de rue», notamment parce qu'il n'a pas été formé dans des académies. Il a certes commencé comme junior au Servette, mais quand il a eu 12 ans et qu'il n'a pas pu jouer pendant six mois après une opération au pied, les Grenat l'ont mis de côté. En lui disant qu'il ne deviendrait jamais assez bon.
Plus tard, Servette a voulu le récupérer, mais la blessure de la répudiation est restée trop douloureuse. En passant par Meyrin, où il faisait presque deux heures de bus chaque jour pendant deux ans pour s'entraîner, et par Étoile Carouge, où il a fait ses débuts à 16 ans, ses performances l'ont amené en trois ans seulement du statut d'amateur à celui de professionnel. Le Genevois a continué sa progression au Stade Lausanne Ouchy, au Lausanne-Sport et au FC Bâle.
Amdouni joue avec plaisir, avec insouciance, c'est un remueur imperturbable qui sent le football. Même lors d'un récent match d'entraînement de la Nati contre une sélection de jeunes de Saint-Gall, il a marqué cinq fois. Murat Yakin y a vu un signal et, après le but du Genevois contre l'Estonie, a déclaré:
L'ex-attaquant du Lausanne-Sport peut certainement s'améliorer sur le plan technique et il a parfois du mal à s'imposer. Il a également une marge de progression au niveau de sa communication: il ne fait pas forcément l'effort de permettre aux germanophones de suivre son français. Mais pourquoi parler en long et en large alors que c'est sur le terrain qu'il s'exprime et veut être compris? Et quid de la critique? Il s'en moque aussi.
Comme l'odyssée du FC Bâle en Conference League 2022/2023 (jusqu'en demi-finale), l'Euro avec la Nati représente une belle vitrine pour Zeki Amdouni, histoire d'appâter de potentiels employeurs. Apparemment, Chelsea et des clubs de Bundesliga sont intéressés par le Genevois. Ce dernier ne cache pas qu'il est ouvert aux offres, malgré un contrat avec Burnley valable jusqu'en 2028.
Son envie de poursuivre l'aventure avec les Clarets est donc toute relative. Et, pour eux, l'attaquant suisse risque d'être trop cher: ils ont dû débourser 18 millions d'euros pour l'engager, il y a un an. A ce moment, on se demandait si ce transfert vers la Premier League n'était pas prématuré. On s'inquiétait du développement d'Amdouni, sachant que son équipe devrait lutter contre la relégation.
Jusqu'à présent, le Genevois compte quinze capes avec la Nati, pour sept buts. Avec près d'un but tous les deux matchs (ou 0,5 but par match, si vous préférez), il possède le meilleur taux de l'équipe. Il n'a pas marqué contre l'Autriche lors du dernier match. La logique voudrait donc qu'il trouve le chemin des filets contre la Hongrie...
Adaptation en français: Yoann Graber