Gregor Deschwanden est dans une forme éblouissante. A Garmisch le jour de l'an, le sauteur suisse a décroché le premier podium de sa carrière sur la Tournée des quatre tremplins. C'est déjà son quatrième de l'hiver.
Sa performance est d'autant plus remarquable à la vue de la domination de nos voisins depuis le début de la Tournée. La «Wunderteam» rafle tout sur son passage. Cinq Autrichiens ont terminé aux cinq premières places de la première qualification à Oberstdorf.
Ils ont ensuite réalisé le triplé lors du concours officiel le lendemain, puis lors de la qualification suivante à Garmisch-Partenkirchen. Les sauteurs autrichiens trustent également les trois premières places du classement général. C'est Daniel Tschofenig, vainqueur du concours du Nouvel An, qui pointe en tête à mi-parcours, devant Jan Hoerl et Stefan Kraft.
Gregor Deschwanden arrive ensuite en quatrième position. En embuscade, le Suisse est surtout le seul athlète à être parvenu à se glisser sur un podium, qu'il s'agisse d'une qualification, d'un concours ou du général, sans voler en possession d'un passeport autrichien.
Comment expliquer cette domination sans partage de la «Wunderteam», domination installée depuis les concours d'Engelberg en Suisse, peu avant les fêtes? «Nos garçons sautent techniquement mieux que tout le monde en ce moment. Ils ont aussi une incroyable confiance en eux», a éclairé l'entraîneur en chef du saut autrichien, Andreas Widhölzl, dans les colonnes du Kleine Zeitung.
Le technicien répondait ici aux accusations portées à l'encontre de ses protégés. Car oui, les résultats de nos voisins interrogent, en Norvège et dans une moindre mesure en Allemagne et en Pologne. «Il est étrange et inhabituel de voir une nation dominer comme l'Autriche le fait actuellement», a déclaré auprès de la NRK le sauteur scandinave Halvor Egner Granerud, à l'issue du concours d'Oberstdorf.
Pius Paschke n'a rien à craindre. Celui que toute l'Allemagne pressentait comme le successeur de Sven Hannawald, vainqueur de la Tournée en 2002, est passé à travers à Garmish-Partenkirchen. Il joue désormais les accessits. Deschwanden est en revanche placé. Il n'a que cinq points de retard sur le troisième, Stefan Kraft.
Serait-il désavantagé? Il n'y a «rien d'illégal», a tenu à indiquer la consultante norvégienne Maren Lundby, championne olympique de saut à ski en 2018, au sujet des performances autrichiennes. Ce qu'elle a voulu dire par-là, c'est que la «Wunderteam» aurait simplement trouvé la recette que les autres n'ont pas, comme cela arrive parfois en saut à ski. Elle a cependant ajouté que ces résultats étaient «terriblement suspects». Cinquième à Oberstdorf, le Norvégien Johann Andre Forfang abonde. «Il est évident qu'ils ont quelque chose, sinon, ils ne seraient pas tous aussi forts», a-t-il clamé auprès du Dagbladet.
Au cœur des conversations: les combinaisons. Le quotidien allemand Bild spécule par exemple sur un «tissu miracle». Or de nombreux observateurs se concentrent davantage sur la taille de l'entrejambe, la façon de coudre et les chaussures, pendant que l'Autrichien Christian Kathol, en charge de l'inspection du matériel à la Fédération internationale de ski (FIS), est accusé de fermer les yeux devant les équipements de ses compatriotes, note la Kronen Zeitung.
En fait, le consultant de l'ORF, l'ancien sauteur autrichien Andreas Goldberger, résume plutôt bien la situation: «Il est normal que les nations deviennent nerveuses quand il y en a une qui domine autant». Nos voisins seraient-ils tout simplement les plus forts ces dernières semaines, au point de faire des envieux? Auraient-ils au contraire ce petit quelque chose que les autres n'ont pas, légal ou non? Difficile d'y répondre de manière définitive. Or une chose est sûre: le Suisse Gregor Deschwanden est à l'heure actuelle l'un des rares sauteurs véritablement en mesure de tenir tête aux Autrichiens.