Lena Häcki-Gross était discrète depuis le début de l'hiver. Force est de constater que la leader de l'équipe de Suisse de biathlon avait tout misé sur les Championnats du monde, organisés à Lenzerheide jusqu'au 23 février.
Quatrième du sprint vendredi, l'Obwaldienne est venue mourir à seulement 1"4 du podium, avant de faire la course en tête dimanche lors de la poursuite. Or son rêve de médaille s'est envolé quand elle s'est présentée pour la quatrième et dernière fois devant les cibles. Trois fautes et Häcki-Gross a dû se contenter d'une cinquième place au goût amer.
Pas le temps toutefois de gamberger pour la biathlète d'Engelberg, qui a dès mardi, 15h05, une nouvelle opportunité d'écrire l'histoire, et d'offrir à la Suisse une première breloque mondiale. D'autant que la course à venir est un individuel, un format qui lui a réussi par le passé, et qui convient de manière générale aux Helvètes.
Lena Häcki-Gross a en effet décroché son premier succès en Coupe du monde sur un individuel court. C'était l'hiver dernier à Antholz-Anterselva en Italie. Sa compatriote Amy Baserga a signé de son côté son meilleur résultat en carrière, à savoir une troisième place, lors de l'individuel de Ruhpolding en janvier dernier. Une course lors de laquelle la Grisonne Elisa Gasparin, 13e, a réalisé sa meilleure performance en 2024/2025.
Les hommes ne sont pas en reste. Le biathlète suisse Niklas Hartweg a par exemple obtenu lors du même individuel la quatrième place. Il n'a jamais fait mieux cette saison. Et l'hiver dernier, c'est son coéquipier Sebastian Stalder, 5e à Östersund, qui avait validé sur un format identique son meilleur résultat en Coupe du monde. Ils peuvent eux aussi rêver d'une médaille lors de l'individuel messieurs mercredi à 15h05.
Mais pourquoi les Suisses ont-ils tendance à réussir lors de l'épreuve originelle du biathlon – la moins populaire et aussi la moins télégénique? Avec une minute de pénalité attribuée dès qu'une cible n'est pas blanchie, au lieu d'un tour nécessitant 20 à 25 secondes, «l’individuel est d'abord un format qui récompense ceux qui tirent bien et vite», explique à watson le Suisse Arnaud Du Pasquier, actif en Coupe d'Europe et en délicatesse sur cette épreuve, la faute justement au tir, qu'il cherche à améliorer après être passé du ski marathon au biathlon.
«Les Suisses sont d’excellents tireurs», ajoute-t-il, et il n'y a qu'à jeter un coup d'oeil aux statistiques pour s'en convaincre. Sebastian Stalder tourne à 90% de réussite cette saison et affiche en ce sens le sixième meilleur bilan parmi les athlètes réguliers de la Coupe du monde. Il en va de même pour Amy Baserga. Ses 89% la classe parmi les 10 meilleures du circuit carabine en mains.
Mais l'individuel est aussi le format des «sensations». Puisque le tir prédomine, malgré des distances plus longues à parcourir (15 kilomètres pour les femmes, 20 pour les hommes), un athlète dans un bon jour peut réussir le difficile 20/20, et surprendre son monde, notamment les stars de la discipline qui ont lâché quelques balles en route.
Si les Suisses venaient à passer à travers mardi et mercredi lors des deux individuels, ils pourront compter jeudi sur une autre épreuve pouvant potentiellement faire d'eux des athlètes médaillés: le relais mixte simple. Amy Baserga et Niklas Hartweg l'ont conduit par deux fois sur le podium en Coupe du monde lors de la saison 2022/2023, et la paire était encore quatrième à Oberhof il y a un mois. Ce format est celui des «petites nations», qui parviennent à aligner des équipes intéressantes sportivement, puisqu'il ne demande qu'un biathlète par sexe.
Il sera ensuite plus difficile de briller lors des relais traditionnels samedi. Souvent placée cette saison, l'équipe de Suisse féminine a néanmoins un coup à faire. Mais elle devra compter sur une course totalement manquée de deux nations parmi la Norvège, l'Allemagne, la France et la Suède, pour s'immiscer sur le podium. Compliqué. Lena Häcki-Gross pourrait enfin se distinguer lors des mass-starts dimanche. Or elle sera sans doute la seule capable de se hisser aux avant-postes, pour peu que sa «craquante» dimanche n'ait pas affecté sa confiance.
Dans ce contexte, les compétitions programmées en milieu de semaine revêtent plus que jamais une importance capitale dans la course à la toute première médaille.