C'est l'un des grands projets de Jared Kushner, le gendre du président américain et ancien conseiller à la Maison-Blanche, reconverti depuis lors dans la finance et le capital-investissements. Un gigantesque complexe résidentiel et commercial à Belgrade, comprenant, qui plus est, le tout premier hôtel Trump d'Europe.
Le hic? Il faudrait d'abord démolir le bâtiment qui occupait l'espace en lieu et place: l'ancien siège du ministère yougoslave de la Défense, situé au cœur de la ville. Un site gravement endommagé lors d'une campagne de bombardements de l'Otan, en 1999. Les deux immeubles, en partie éventrés et restés en l'état, ont été classés en 2005 «bien culturel» protégé.
L'annonce du projet de Jared Kushner, le mari de la fille aînée de Donald Trump, Ivanka, avait suscité une levée de boucliers ainsi que de nombreuses manifestations. Le bombardement reste un traumatisme vif en Serbie et le ressentiment contre l'Otan encore fort.
Faisant fi de ces protestations, le gouvernement serbe avait donné son approbation, avant même de révoquer officiellement le statut historique protégé de l'ancien complexe.
Manque de bol pour Jared Kushner et ses partenaires commerciaux, les autorités judiciaires serbes ont annoncé cette semaine qu'un document clé dans la conclusion de cet accord avait en fait... été falsifié. La responsabilité incomberait à Goran Vasic, patron de l'agence chargée de la protection des monuments culturels par intérim. Le fonctionnaire, en poste depuis un an, a confessé avoir fabriqué un avis d'expert bidon pour justifier la décision du gouvernement de retirer au site son statut de patrimoine culturel.
Une enquête préliminaire a été menée par le Bureau du procureur pour le crime organisé, a annoncé le bureau du procureur dans un communiqué. Goran Vasic est soupçonné d'«abus de position officielle» et d'avoir produit un «faux» en proposant que le site perde son statut de bien culturel. Le fonctionnaire a ensuite envoyé «la proposition falsifiée, faite sans la participation des experts de conservation de l'Institut», au gouvernement, par «l'intermédiaire du ministère de la Culture».
Le fonctionnaire a ainsi «causé des dommages au patrimoine culturel de la République de Serbie qu'il (...) devait préserver», ajoute le communiqué du procureur.
La société de Jared Kushner n'a pas tardé à se laver les mains de cette erreur «embarrassante», selon les mots du New York Times. Dans une déclaration, Affinity Partners affirme n'avoir joué aucun rôle dans l'évaluation du statut culturel du site. Les travaux sur le site n'ont pas encore commencé et l'avenir du projet est désormais incertain.
Le projet serbe de la famille Kushner-Trump s'inscrit dans le cadre de plusieurs accords récents impliquant des gouvernements étrangers. Parmi eux, citons un engagement de deux milliards de dollars des Emirats arabes unis en faveur d'une société de cryptomonnaies lancée par la famille Trump, ainsi que des projets immobiliers de luxe au Qatar et à Oman. Autant de transactions qui, selon les experts, suscitent une impression, si ce n'est de corruption, au moins de traitement spécial pour la famille du président.
(mbr avec afp)