Le Grand Prix de Monaco est sans doute le plus prestigieux du calendrier de Formule 1. C'est aussi l'un des plus anciens, puisque sa première édition s'est tenue en 1929 et qu'il figurait au programme du tout premier championnat du monde en 1950.
Son circuit est emblématique. Il parle à tout le monde. Qui n'a jamais vu une monoplace débouler du tunnel le long de la mer pour franchir la célèbre chicane du port? L'événement n'a donc à première vue aucune raison d'être contesté. Or il ne tient plus qu'au bling-bling du micro-Etat et au «m'as-tu-vu» – le sport ayant depuis longtemps fui le rocher monégasque.
Couru en ville, le Grand Prix de Monaco n'a jamais été propice aux dépassements. Mais ceci est encore plus flagrant de nos jours, la faute à des monoplaces toujours plus imposantes. Résultat: il n'y a eu aucun franchissement en 2021. Et cette année, Monaco a été le théâtre d'une triste première en F1: un Top 10 inchangé de l'extinction des feux jusqu'au drapeau à damier.
Pour autant, ce seul argument ne suffit pas. Il ne permet pas de souhaiter la disparition du célèbre Grand Prix de Monaco. La course aurait encore toute sa place dans un calendrier classique, c'est à dire esquissé en suivant les traditions et en prenant en compte l'histoire de la F1. Or ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Les Grands Prix européens sont amenés à disparaître au profit de destinations exotiques. Celui d'Allemagne n'a plus été couru depuis 2019, que ce soit à Hockenheim ou au Nürburgring. Le GP de Belgique a été prolongé jusqu'en 2025, mais il est menacé et subira bientôt l'alternance. A l'avenir, les circuits de Silverstone, Imola et Monza pourraient eux aussi se contenter d'une présence sporadique. Alors quitte à choisir, préservons le Temple de la vitesse et des tifosi, ou Spa-Francorchamps, circuit atypique apprécié des pilotes, parfois cité comme le plus beau du monde et surtout, réputé pour sa diversité permettant de couronner les pilotes les plus complets.
Le récent accord signé entre les organisateurs monégasques et Liberty Media, détenteur des droits de la Formule 1, assure désormais au micro-Etat une place en championnat du monde jusqu'en 2031. Il parait évident que l'argent a joué un rôle important dans les négociations. Le Grand Prix déboursera deux fois plus chaque année pour que les pilotes s'établissent une fois par an sur les yachts de la marina. La course sera également reprogrammée en juin. Ce sont là les deux seuls changements à venir.
Une évolution plus conséquente aurait pourtant été appréciée. Car même si les monoplaces seront plus courtes de 20 centimètres et un peu moins larges à partir de 2026, le Grand Prix doit évoluer pour que son intérêt ne se limite plus à la spectaculaire séance de qualification, lors de laquelle le pilotage en ville à toute vitesse reste un art. Un week-end sprint ou une épreuve de time attack: voilà qui dynamiserait l'événement et lui conférerait une nouvelle légitimité.