Quelle saison! Red Bull, Max Verstappen et Sergio Pérez ne tournent plus rond et sont dépassés depuis le week-end dernier au classement des constructeurs. Ce sont désormais les McLaren – quatre succès au compteur – qui trustent le haut du podium. Logique donc que les monoplaces de l'écurie de Woking soient surveillées de près.
Voire de très près. L'Australien Oscar Piastri a remporté il y a une semaine le Grand Prix d'Azerbaïdjan devant Charles Leclerc et George Russell. Et lorsqu'il était en tête sur un secteur du circuit, les yeux les plus avertis ont constaté une particularité sur son aileron arrière. Celui-ci a semblé présenter une légère déformation. Des images de télévision ont montré que le volet supérieur fléchissait à grande vitesse, avant que tout revienne à la normale au freinage.
Une telle déflection réduit la traînée et pourrait offrir un gain de vitesse situé entre 3 et 5 km/h selon certains spécialistes. Un apport non négligeable en Formule 1, d'autant que le système s'active automatiquement à grande vitesse, sans qu'un dépassement soit préparé. On parle aussi d'une amélioration de deux dixièmes par tour du côté des ingénieurs de l'écurie Red Bull. A l'heure où ils peinent à maintenir un niveau de performance respectable, ils ne voient pas d'un bon œil la technologie développée par McLaren. Ils ne sont pas les seuls.
Devant les critiques émanant du paddock, la Fédération internationale de l'automobile (FIA) a été contrainte de s'emparer du dossier. Elle a affirmé via un communiqué vouloir examiner de près les données recueillies à Bakou.
Cette prise de parole n'a pas empêché les pilotes de partager leur frustration. Taquin, Max Verstappen a estimé que le mini-DRS de la McLaren se voyait «d'un seul œil». «Je veux dire qu'il est clair, bien sûr, que l'aileron se déforme à haute vitesse. C'est peut-être intelligent, peut-être pas, mais au final, c'est à la FIA de décider si c'est légal ou pas, n'est-ce pas? Je crois qu'il est important de clarifier les choses», a-t-il ajouté, de manière à ce que son équipe puisse travailler sur une évolution similaire, si une déformation aussi excessive venait à être autorisée. Son coéquipier Sergio Pérez s'est lui aussi exprimé face à la presse. Or il s'est montré davantage critique et s'est dit «surpris» de voir que l'aileron arrière à faible appui de la McLaren avait réussi les tests initiaux.
Si Charles Leclerc de l'écurie Ferrari comprend désormais mieux sa deuxième place en Azerbaïdjan, et a laissé son ingénieur évoquer cette controverse, le discours est évidemment tout autre du côté des pilotes McLaren. De manière calme et posée, Oscar Piastri a tenté d'éteindre la polémique. «Est-ce trop d’agitation pour quelques millimètres? Je veux dire, c’est légal», a-t-il répondu lorsque le sujet a été abordé en conférence de presse.
Son coéquipier Lando Norris a également rappelé qu'il courait dans la légalité et a partagé sa fierté de faire partie de l'équipe britannique. «Je suis fier, je suis heureux de ce que l'équipe réalise. Ils repoussent les limites et c'est ce qu'il faut faire si vous voulez vous battre au sommet et contre des gens qui sont aussi connus pour faire la même chose», a-t-il déclaré.
Mais en marge du Grand Prix de Singapour, dimanche à 14h, le verdict est tombé. L'équipe McLaren a été sommée par la FIA de procéder à des ajustements sur son aileron arrière. Si le système n'a pas été jugé illégal, l'instance a demandé à ce que la flexibilité excessive soit réduite. Or la directive technique n°34 précise bien que «les conceptions dont les caractéristiques structurelles sont modifiées par des paramètres secondaires (température, charge aérodynamique...) de manière à produire en course une caractéristique de déflexion différente de celle à l’arrêt pendant les contrôles FIA» ne sont pas considérées comme... légales.
L'écurie de Woking doit donc «contrôler la quantité de mouvement de l’élément», au grand dam de son directeur général. «C’est de la Formule 1. C’est une ingénierie intelligente. La FIA est d’accord avec ça. Après, c’est comme d’habitude, les innovations doivent souvent être remisées au placard», a regretté Zak Brown. L'équipe est néanmoins prête à collaborer avec la FIA. Elle apportera des adaptations, a-t-elle précisé dans un communiqué.
McLaren ne comptait pas tirer un quelconque avantage de sa technologie à Singapour. La course se dispute en ville, sur l'un des circuits les plus lents du calendrier. Or à Austin en octobre, il y aura une ligne droite parfaite de 1'200 mètres. Nul doute que les ailerons de McLaren seront scrutés à cette occasion.