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Football: Fabio Celestini s'expose à des ennuis en Suisse

Fabio Celestini s'expose à de gros ennuis en Suisse
Le coach suisse est passé du FC Bâle au CSKA Moscou.Image: KEYSTONE

Fabio Celestini s'expose à des ennuis en Suisse

La signature de Celestini au CSKA Moscou, club historiquement rattaché à l’armée russe, ne soulève pas uniquement des questions d’ordre éthique. Le technicien vaudois s’expose à des problèmes juridiques et financiers en Suisse.
22.06.2025, 19:0122.06.2025, 22:24
Dario Bulleri
Dario Bulleri
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C’est officiel depuis vendredi: Fabio Celestini, ayant mené le FC Bâle au titre il y a quelques semaines, va diriger le CSKA Moscou durant les deux prochaines années, une nomination qui fait vivement réagir en Suisse.

D’abord sur le plan sportif. Jusqu’ici, Celestini avait laissé entendre qu’il ambitionnait un poste dans un championnat de tout premier plan. Ensuite, sur le plan politique. Le Vaudois s’installe en Russie, un pays engagé depuis plus de trois ans dans une guerre d’agression contre l’Ukraine.

Le choix du club est aussi sensible. Le nouvel employeur du technicien suisse, le CSKA Moscou, entretient des liens directs avec le pouvoir, et donc avec le conflit en Ukraine. Zoom sur ce mastodonte du sport russe, et sur les menaces juridiques et financières qui pèsent sur Fabio Celestini suite à sa signature à Moscou.

Le lien avec l'armée

La proximité entre le CSKA Moscou et l’armée russe est directement visible dans le nom du club. «CSKA» signifie «Club sportif central de l'Armée».

Ce lien ne date pas d’hier. Fondé en 1911 sous l'appelation «OLLS», le club était alors une association de passionnés de ski, comprenant déjà des membres de l’armée impériale russe. Ce n’est qu’en 1928 qu’il affiche clairement son affiliation militaire, en adoptant le sigle «CDKA» pour «Club sportif de la Maison centrale de l’Armée rouge». L'organisation devient alors une vitrine du pouvoir soviétique. La pratique sportive est encouragée chez les militaires, ce qui permet de faire grimper rapidement le niveau des diverses équipes.

Sans doute le joueur le plus renommé de l'effectif actuel du CSKA Moscou: Miralem Pjanic.
Sans doute le joueur le plus renommé de l'effectif actuel du CSKA Moscou: Miralem Pjanic.image: www.imago-images.de

Par la suite, le club moscovite change plusieurs fois de nom, tout en conservant son affiliation militaire. Et même après la chute de l’Union soviétique, le ministère de la Défense reste durant de longues années le principal propriétaire, avant de céder ses parts. Le terme «CSKA» est officiellement porté depuis 65 ans.

Le propriétaire

Si le ministère de la Défense n’est plus impliqué, aujourd'hui, dans la gestion du CSKA, le club reste – comme la majorité des grandes formations russes – entre les mains de l’Etat ou d’acteurs proches du pouvoir. Ainsi, le CSKA appartient à la Banque de développement de la fédération de Russie: la Vnechekonombank (VEB). Les salaires des joueurs, et donc de l’entraîneur Celestini, sont financés par cet établissement.

Mais le rôle de la VEB est fortement controversé. D’après l’agence Reuters, elle a injecté depuis le début de la guerre des milliards de dollars dans des secteurs clés de l’économie de guerre russe. Une étude du Stockholm Institute of Transition Economics montre qu’une part importante du financement de l’effort militaire ne provient pas du budget officiel, mais de banques de développement publiques comme la VEB.

La Banque de développement de la fédération de Russie se cache derrière le CSKA.
La Banque de développement de la fédération de Russie se cache derrière le CSKA.image: www.imago-images.de

La VEB fait donc l’objet de vives critiques en Occident. Peu après le déclenchement de la guerre, elle a été inscrite sur la liste des sanctions de l’Union européenne, rapidement suivie par la Suisse. Depuis, elle est exclue du système financier Swift. Notons que les banques suisses, par exemple, sont tenues de bloquer toute transaction en provenance d’entreprises sanctionnées. En raison de ses liens étroits avec la VEB, le CSKA Moscou est lui aussi visé par ces mesures.

La propagande

Le sport occupe une place de choix dans la propagande russe, et le CSKA Moscou n’échappe pas à cette logique. Comme l’explique Calum MacKenzie, correspondant de la SRF à Moscou, le club s’est déjà illustré plusieurs fois depuis le début de la guerre. Le CSKA a ainsi organisé des collectes de dons et de biens pour les zones dites «libérées» du Donbass, des territoires ukrainiens occupés par la Russie. Le site du club diffuse même des vidéos dans lesquelles des hommes cagoulés remercient le CSKA pour ces envois.

Le CSKA a remporté la Coupe de Russie en 2025.
Le CSKA a remporté la Coupe de Russie en 2025.image: www.imago-images.de

Loin de se limiter à l’aide humanitaire, le club moscovite a affirmé en novembre avoir acheminé 40 motos jusqu’au front, pour équiper l’infanterie de marine.

Dans un tel contexte, on parle souvent de «sportswashing», soit l’utilisation du sport pour redorer l’image d’un pays contesté. L’engagement de Fabio Celestini s’inscrit dans cette logique: recruter un entraîneur à succès comme l’ex-coach du FC Bâle permet à la Russie de montrer qu’elle n’est pas totalement isolée, malgré les sanctions et son exclusion des compétitions européennes.

Des hooligans controversés

Comme d’autres grands clubs russes, le CSKA Moscou entretient des liens avec le bataillon Española, une milice de hooligans issue de milieux d’extrême droite. Ce groupe paramilitaire est actif sur le front ukrainien.

Les hooligans de Moscou sont connectés au bataillon Española.
Les hooligans de Moscou sont connectés au bataillon Española.image: www.imago-images.de

Il n’existe pas de lien officiel entre le club et «Española». Cependant, le CSKA ne s’est jamais publiquement distancé de cette organisation. Stanislav Orlov, commandant du bataillon, serait lui-même issu des ultras du CSKA. En août 2023, Andreï Solomatin, ancien joueur du club, a publiquement annoncé son engagement au sein de cette milice armée.

Les conséquences juridiques et financières pour Celestini

Avec ce transfert au CSKA Moscou, Fabio Celestini voit son image écornée – médias et supporters ayant vivement critiqué sa décision. Mais cela pourrait être le moindre de ses problèmes.

Selon plusieurs sources, l’entraîneur serait généreusement payé en Russie. Mais d’après le Blick alémanique, les millions qu’il percevra à Moscou pourraient devenir inutilisables une fois son contrat terminé. A cause des sanctions contre la VEB et le CSKA, Celestini ne pourra pas rapatrier légalement son argent en Suisse ou en Espagne, un pays auquel il est attaché. Comme mentionné précédemment, les banques sont tenues de bloquer tout versement émanant d’une entreprise sanctionnée. Théoriquement, Celestini pourrait, en Suisse, demander une dérogation au Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO), mais les critères pour l’obtenir sont extrêmement stricts.

Le Vaudois s’expose à d'autres risques. Toute personne résidant en Suisse est interdite de recevoir des paiements provenant d’une entreprise sanctionnée. En cas de mise à l'écart, Celestini ne pourra donc pas rentrer au pays s’il continue de percevoir des versements depuis Moscou. Selon Blick, le non-respect de cette législation peut entraîner une peine de prison pouvant aller jusqu’à cinq ans. La sanction est encore plus sévère en Espagne.

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