On aurait bien voulu mettre un GPS sur Paolo Tramezzani, samedi dernier, pour connaître le nombre de kilomètres que le coach d'Yverdon Sport a parcouru dans sa zone technique.
Contre Sion (1-1), fidèle à lui-même, le très énergique technicien italien a aligné les allers-retours derrière la ligne de touche, pour motiver ses joueurs. Et souvent au-delà des limites spatiales réglementaires. Oui, comme beaucoup d'autres entraîneurs de foot, Tramezzani s'aventure fréquemment au-delà de sa zone technique, ce grand rectangle devant le banc délimité par des traitillés peints en blanc. Or, c'est interdit par le règlement. En théorie.
«Si cette zone technique existe, ce n'est pas pour rien», pose d'entrée Sébastien Pache. L'ancien arbitre de Super League dégage deux fonctions de ce rectangle:
L'ex-sifflet précise que, durant toute la durée du match, seuls les remplaçants vêtus d'un chasuble sont autorisés à quitter cet espace pour aller s'échauffer. Avec, éventuellement, le préparateur physique. Les soigneurs bénéficient aussi d'une exception. Mais en aucun cas le coach en chef.
Alors pourquoi Paolo Tramezzani et ses nombreux confrères qui transgressent cette règle – on peut citer, par exemple, le volcanique Diego Simeone (Atlético Madrid) – ne sont-ils pas sanctionnés et peuvent ainsi continuer à commettre cette infraction? En fait, la zone technique est avant tout une zone grise.
«C'est l'esprit de la règle qui est important ici», éclaircit Sébastien Pache. Autrement dit: elle n'est pas appliquée littéralement. C'est le bon sens qui prime. «Si l'entraîneur sort de sa zone pour provoquer ou aller à la confrontation avec un autre acteur, alors là, bien sûr, il doit être sanctionné, et ça peut même être un carton rouge», détaille le Vaudois.
Sébastien Pache ajoute toutefois que les coachs qui s'aventurent hors de leur rectangle «prennent un risque», car s'ils empêchent le bon déroulement du jeu – en pénétrant directement sur le terrain ou en touchant le ballon, par exemple –, ils doivent être expulsés.
Ce degré de tolérance est d'autant plus légitime avec un entraîneur comme Paolo Tramezzani samedi. Même s'il est parfois très largement sorti de sa zone (plusieurs mètres, pour être sur la même ligne que ses défenseurs), l'Yverdonnois n'a jamais été agressif contre quiconque.
Et, les rares fois où il a contesté une décision arbitrale, il a directement calmé le jeu en mettant une petite tape amicale dans le dos du quatrième arbitre, par exemple (joli modèle d'intelligence relationnelle, au passage). En plus, quand l'Italien voyait du coin de l'œil qu'il avait laissé loin derrière lui sa tanière, il se dépêchait d'y rentrer.
Mais Sébastien Pache n'aurait pas pour autant laissé passer les escapades du Transalpin. «Je serais venu devant Monsieur Tramezzani, à la vue des caméras TV, pour lui demander de faire attention à rester dans sa zone. Tout ça calmement, avec le sourire». L'ex-directeur de jeu insiste:
Car un match de foot, même quand il est joué dans un très bon esprit comme ce Yverdon-Sion, peut vite tourner à cause des émotions.
Pour que tout se déroule au mieux, Sébastien Pache prône la communication. D'abord entre le quatuor arbitral avant le match, histoire de définir une ligne de conduite. Mais aussi entre les arbitres et les entraîneurs, avant et pendant la rencontre, pour rappeler celle-ci.
«La fonction d'un arbitre, c'est d'instaurer une bonne atmosphère de travail en commun avec tous les acteurs, y compris les entraîneurs», résume le Vaudois.
Nico Gianforte, au sifflet samedi au Stade Municipal, y est parvenu, aidé par les bons comportements de Paolo Tramezzani et de son homologue sédunois, Didier Tholot. L'homme en noir a été inspiré de laisser grise la zone technique.