On sait de longue date que l'eau de la Seine ne ressemble pas à celle de la piscine de Montchoisi, mais les athlètes n'ont pas seulement été exposés à un risque sanitaire lors des JO de Paris. Ils ont aussi subi un phénomène plus sournois, et pas forcément visible à la télévision: le courant du fleuve.
C'est ce que nous explique Mike Aigroz, ex-triathlète professionnel, vice-champion d'Europe en 2012.
«Le courant était trop fort lors des épreuves des JO, surtout lors du relais mixte disputé lundi. On était pas loin des 2 mètres/seconde. Concrètement, cela signifie que pour pouvoir progresser face au courant, les athlètes devaient nager le 100m sous la minute. C'est un rythme presque impossible à tenir.»
Le départ des hommes le 31 juillet.Image: AP
Lors des épreuves individuelles, les athlètes devaient de surcroît passer sous le pont des Invalides. Or «dès que tu rétrécis l'espace, automatiquement le courant accélère, pointe Mike Aigroz. Du coup, on a vu des filles en difficulté quand il leur a fallu remonter le courant. Ça a créé des scènes de stress, presque de panique».
Le parcours de natation lors des épreuves individuelles. Les athlètes s'élançaient du pont Alexandre III pour deux boucles (en bleu), la première de 910m, la seconde de 590m, en passant à chaque fois sous le pont des Invalides. L'aller était donc dans le sens du courant, mais pas le retour.
On pourrait penser, après tout, que chaque athlète était confronté au même courant, et que ce phénomène naturel n'en a pas avantagé certains et désavantagé d'autres. Mais c'est faux.
«Les meilleurs du monde ont pu choisir leur position de départ sur le ponton, et ils ont tous décidé de s'élancer du milieu de la plate-forme, de sorte à bénéficier d'un courant plus fort à l'aller. Les bons nageurs étaient déjà avantagés car ils étaient au milieu du ponton, donc dans la meilleure position, mais ils avaient en plus l'avantage du courant, si bien que les écarts entre les bons nageurs et les autres s'est accentué.»
Mike Aigroz.
La nage à contre courant a épuisé les organismes. Image: AP
L'ancien triathlète vaudois a commenté les épreuves pour la RTS et il n'en revient toujours pas.
«Je ne comprends pas comment on a pu donner l'autorisation de disputer des épreuves du triathlon olympique dans la Seine. Personne ne pouvait imaginer que l'eau soit propre, ni que le courant puisse être maîtrisé. C'était une loterie complète, au détriment de la santé des participants et de l'équité de la course.»
Mike Aigroz reconnaît qu'à Hawaï, lors de l'IronMan, les triathlètes sont aussi méchamment ballotés. «Mais ils peuvent nager toute la semaine qui précède la compétition, chaque jour à la même heure, de sorte à pouvoir étudier les marées, les mouvements de l'eau, etc.» Une préparation minutieuse à laquelle les participants n'ont pas eu droit dans la Seine puisque la dernière fois qu'ils y avaient nagé, c'était en 2023. Il leur était donc impossible de prendre le moindre repère, d'anticiper les trajectoires en fonction du courant.
«Or la stratégie était importante. On l'a encore vu lundi lors du relais. Certains ont longé les péniches le plus longtemps possible, avant de couper au dernier moment pour sortir. En voyant les meilleurs sortir de l'eau, ceux de derrière ont coupé leur trajectoire plus tôt et ont pris le courant en pleine face. C'est incompréhensible que les triathlètes n'aient pas pu se familiariser avec la Seine avant les épreuves. Si c'était une course de quartier, on ne dirait rien, mais là on parle des Jeux olympiques. C'est un sketch.»
L'épreuve de natation donne lieu à de rudes batailles, comme ici chez les femmes.Image: AP
Ce qu'il s'est passé aux JO de Paris pose finalement une question de fond, que Mike Aigroz résume ainsi:
«Est-ce qu'on privilégie la santé des athlètes et l'équité, et du coup on va courir hors des villes, dans des endroits plus proches de la nature, et il y en a beaucoup en France (sur la Riviera, dans la région d'Annecy, etc.)? Ou est-ce qu'on continue à privilégier les grands centres urbains pour attirer les sponsors, le public et fournir de belles images aux télévisions?»
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