Lorsqu'on discute avec Alexis Monney, la préparation a semble-t-il été bonne loin du vieux continent. Le skieur de Châtel-Saint-Denis nous confie avoir profité de supers conditions au Chili, là où les descendeurs suisses ont pu skier plus de 20 jours dans une météo hivernale. A cela s'ajoute plus de 10 jours à Saas Fee pour parfaire les détails techniques.
«On devrait compter environ 40 jours de ski avant d’arriver à Beaver Creek», rapporte le Fribourgeois. L'étape américaine sera la première épreuve de vitesse de Coupe du monde au calendrier.
Si les descendeurs commenceront la saison seulement le week-end du 6 décembre, les techniciens sont déjà sur le qui-vive. Le géant de Sölden est prévu le 24 octobre, alors que le slalom de Levi est agendé pour le 17 novembre, ils skient actuellement à Diavolezza, dans les Grisons.
Avant ça, les slalomeurs ont mis le cap sur l'Argentine, à Ushuaïa. Matteo Joris, le chef des slalomeurs, se montre très satisfait du travail accompli cet été. Car cette année, la donne était différente: «On a modifié le planning d'entraînement. On a commencé directement là-bas, en Argentine, avec une semaine de technique sur les skis».
La cause: Zermatt a fermé son glacier aux skieurs professionnels après un imbroglio (qui a fait couler beaucoup d'encre) avec la station valaisanne. Or, on apprend que l'idée de ne pas monter sur les glaciers suisses était déjà prise par le staff de l'équipe de Suisse et les protégés de Matteo Joris.
L'aventure argentine a peut-être validé cette modification. Le Valdotain expose le très bon travail à Ushuaïa: «On a pu skier 19 jours sur 25. On faisait des blocs de 4 jours avant de faire une journée de pause».
L'entraineur des slalomeurs est appuyé par ses poulains. Daniel Yule est aussi convaincu par cette modification: «Il fallait changer un peu le rythme, trouver un nouveau stimuli. Par exemple, après le stage en Argentine, l’envie de skier était toujours forte. A contrario, après un stage sur le glacier, je sentais un peu de lassitude s'installer.»
Le slalomeur suisse le plus prolifique ajoute aussi que l'équipe a pu compter sur «3-4 semaines supplémentaires» pour parfaire la condition physique. Un changement qui brise une forme de routine. «Après plus de 10 ans en Coupe du monde, c’était plaisant de faire autrement.»
Marc Rochat penche aussi pour cette nouvelle manière de faire, rappelant que skier sur le glacier en début d'été n'est plus une étape obligatoire pour les pros: «On a besoin de neige hivernale et de pistes engagées pour produire du ski de qualité», complète le Vaudois.
Pour Yule, cette (fameuse) neige hivernale était également une manière de modifier son attitude sur une neige moins dure (les conditions étaient plutôt douces en Argentine), qui convient moins à ses qualités: «Sur la neige molle, ce qu’on a essayé de changer, ce sont les intentions; avoir la patience de laisser le ski travailler».
Un travail de fond, de nouvelles intentions, des détails sur le matériel pour gommer ces satanés centièmes; les Suisses ont cravaché. Mais il fallait aussi aménager des plages de repos et gérer les «day off». «Le plus difficile c'était de ne pas tomber dans le surentraînement. Même si les conditions sont très bonnes, il faut avoir le courage d'arrêter pour se reposer», renseigne l'entraineur italien de Swiss-Ski.
Marc Rochat fait partie de ces athlètes qui doivent être freinés:
Un spécialiste du virage court a par contre décidé de rester sous nos latitudes. Ramon Zenhäusern n'a pas souhaité prendre part au stage en Amérique du sud. «Pour Ramon, on a pris ensemble la décision. L’année passée, il était tombé malade là-bas; il ne vit pas très bien le fait d’être loin de la maison et entre dans un état de stress», confie Joris.
«La meilleure décision pour lui était de rester ici, pour sa tête et sa confiance. Il a aussi la chance d'habiter à côté de Saas Fee», nous explique Matteo Joris. Le Haut-Valaisan s'est entraîné avec son père cet été.
Mais opter pour un entraînement exclusivement sur glacier demande beaucoup d'énergie:
Les slalomeurs ont aussi chaussé les skis de géant. «Je me sens mieux après des manches de géant. Ces dernières années, je ne pouvais pas faire de géant avec mon dos douloureux. Mais là, ça va mieux», expose Marc Rochat.
Même refrain pour son collègue valaisan Daniel Yule, qui parle de garder «une certaine fraîcheur en slalom grâce à la pratique du géant».
Les slalomeurs ont besoin du géant, une discipline réputée pour être la base du ski alpin. Il y a aussi une importance sur l'alternance des disciplines: «Il faut changer de discipline pour garder du feeling en slalom. Si tu fais toujours du slalom, tu perds de ce feeling et de la sensibilité sur les skis. Il y a comme une routine qui s'installe et on perd en efficacité», présente Matteo Joris, avant de conclure: