Le Montreux Jazz Festival a débuté ce vendredi. Près de 250 000 spectateurs sont attendus sur la Riviera vaudoise ces deux prochaines semaines, et il n'y a aucune raison pour que la population locale ne leur fasse pas bon accueil. Ça n'a pourtant pas toujours été ainsi.
Dans un épisode de la série «Des maisons d'artistes», consacré à Freddie Mercury et récemment diffusé sur la chaîne Arte, on a découvert une réalité méconnue du festival né en 1967. À cette époque, dit la voix off, «Montreux ne séduisait guère que des Anglaises d'un certain âge venues profiter d'un climat méditerranéen». La vie, bercée par les clapotis du lac Léman, y était paisible. On parlait alors de Montreux comme d'une belle endormie.
La petite ville romande (20 000 habitants) rêvait pourtant d'un autre destin. Elle cherchait un moyen de séduire les touristes en visite sur les bords du lac et c'est Claude Nobs, mélomane passionné, qui l'a trouvé en organisant un festival de musique à succès. «Montreux est devenue La Mecque de la pop, au coeur d'une Riviera suisse réputée pour sa tranquillité. Les hippies ont envahi la ville», relate le documentaire, images à l'appui.
Le choc des cultures était inévitable. «Il y avait un grand, grand problème avec la population locale, avec la police, avec tout le monde», retrace Norbert Muller, directeur d'un magasin de souvenirs montreusien, cité dans l'émission.
À l'époque, plusieurs centaines de tentes de camping poussaient dans les jardins proprets de la ville. Les hippies squattaient les bords de la piscine du casino et il n'était pas rare que les habitants qui sortaient leur chien le matin en découvrent certains enroulés dans leur sac de couchage. «Ils n'aimaient pas ça du tout», se souvient Norbet Muller. Pour éviter que la tension ne monte entre deux mondes que tout oppose, la police délogeait les festivaliers à l'aube.
Cette cohabitation de quelques jours était toutefois sans agressivité. Il n'y avait pas d'échauffourées, pas d'alcool à l'excès. La mauvaise humeur des uns ou des autres se dissipait rapidement dans les volutes de fumée. Certaines scènes cocasses ont cependant durablement marqué les participants, comme celle racontée par le chanteur de Deep Purple Ian Gillian dans la série «Des maisons d'artistes»:
Claude Nobs n'a pas été troublé par le vent de panique qui a soufflé sur la Riviera aux premiers jours de son rassemblement musical. Le documentaire souligne qu'il était «au contraire ravi de la nouvelle dimension donnée à sa ville et a continué de défier les frontières musicales». Le Montreux Jazz Festival est devenu au fil des ans un rendez-vous mythique. Il n'a jamais cessé d'innover jusqu'à cette année, date de son 58e anniversaire.